Accueil Sport de glisse et voile légère  windsurf

Sa toute nouvelle vidéo à l’appui, le windsurfer français Thomas Traversa raconte à Voiles et Voiliers comment il a navigué en pleine tempête au cap Figuer, au Pays Basque, sur des vagues très longues atteignant parfois 10 mètres et déroulant sur plus de 200 mètres.

Très spectaculaire !

Franchir les énormes vagues n’a pas été chose facile et quelques chutes spectaculaires ont émaillé cette navigation hors-norme. | CAPTURE ÉCRAN STEF VIDÉO / STÉPHANE DEBUIRE

Christophe FAVREAU. Modifié le 30/03/2021 à 19h52

Après sa session spectaculaire sur la plus grosse vague d’Europe à Nazaré (Portugal), le windsurfer français Thomas Traversa nous raconte sa sortie au cap Figuer, à la frontière entre la France et l’Espagne, lors de la tempête Bella.

Deux jours de navigation intense en compagnie de ses acolytes Julien Taboulet et Marco Juliot sur un spot exigeant, qui ne se prête à la navigation en planche à voile que très rarement…

Il vient de publier une nouvelle vidéo, très spectaculaire, que nous vous invitons à découvrir ici avant de lire son entretien ci-dessous.

LA NOUVELLE VIDÉO « MISSION BELLA » ICI :

Mission Bella: Thomas Traversa au Pays Basque – YouTube

Certaines vagues dépassaient les 10 mètres

Voiles et Voiliers : Thomas, peux-tu nous resituer le contexte de ces deux journées exceptionnelles pendant lesquelles ont été tournées cette nouvelle vidéo ?

Thomas Traversa : Le vent était très fort la première journée, en mode tempête avec de gros grains, de grosses vagues qui se sont maintenues malgré la baisse du vent le lendemain.

Le spot s’appelle cap Figuer et se trouve à l’extrême sud du Pays Basque, à la frontière de la France et de l’Espagne.

Nous nous sommes mis à l’eau du côté espagnol, à un kilomètre seulement au sud de la baie d’Hendaye.

La première journée, le vent était vraiment très irrégulier et oscillait entre 20 nœuds et des rafales qui dépassaient largement les 40.

A un moment j’ai même dû attendre un peu au large tellement le vent était fort, pour laisser un grain passer.

C’était vraiment la tempête.

Côté vague, il y avait vraiment une grosse houle et la tempête toute proche générait des vagues désordonnées, dont la taille, de souvenir, dépassait par moment les 10 mètres.

Grains très forts, houle énorme… La tempête Bella a planté un décors très intimidant pour les windsurfers qui ont osé se mettre à l’eau ce jour-là… Mais quel spectacle ! | CAPTURE ÉCRAN STEF VIDÉO / STÉPHANE DEBUIRE

A part finir à la nage on ne risque pas grand-chose

Voiles et Voiliers : Quelles sont les spécificités de cet endroit ?

Thomas Traversa : Ce qui caractérise ce spot c’est que les vagues s’enroulent autour de ce petit cap et cassent sur une dalle rocheuse à 45°.

Mais il faut que ce soit à marée basse et que la houle soit grosse car il y a pas mal de fond.

C’est un spot qui marche très rarement en windsurf, notamment à cause du vent qui doit avoir une dominante sud, alors que les vents habituels dans le pays Basque viennent plus souvent du nord ou de l’ouest.

C’est pour cette raison que c’est la troisième fois seulement que je navigue ici en 10 ans, après une session en 2010 et l’autre en 2016.

L’avantage est que les vagues déroulent bien et permettent de finir dans la baie d’Hendaye, ce qui est très appréciable en termes de sécurité pour un spot de grosses vagues.

A part finir à la nage, on ne risque pas grand-chose…

VOIR AUSSI

Le windsurfeur qui a échappé à la mort dans une vague géante se confie

EN IMAGES. Un jeune windsurfer affronte une vague géante de 10 mètres dans le Finistère !

TEMOIGNAGE EXCLUSIF. Vague géante bretonne : Pierre Marchand raconte comment il a surfé le monstre

VIDÉO. Un windsurfeur s’envole dans les vagues de Bretagne Nord

Windsurf. Sarah Hauser surfe une vague de plus de 10 mètres et entre dans le livre des records

Pour se mettre à l’eau, une zone rocheuse un peu abritée a permis aux windsurfeurs de franchir plus facilement l’énorme barre. | CAPTURE ÉCRAN STEF VIDÉO / STÉPHANE DEBUIRE

Les vagues déroulent ici sur 200 ou 300 mètres…

Voiles et Voiliers : Les vagues générées par ce relief semblent également très longues…

Thomas Traversa : Exactement. Contrairement à Nazaré où les vagues font des pics, celles-ci déroulent sur 200 ou 300 mètres, en conservant la même taille.

Une fois que l’on se lance dans la vague, on surfe vraiment sur un mur qui garde sa hauteur, ce qui est rare pour un spot de grosses vagues, où celles-ci sont généralement courtes, du fait qu’elles cassent sur un haut fond localisé.

Au cap Figuer, cela ressemble plus au spot de vagues de roches, où les vagues sont de taille plus habituelle.

Au large de la baie d’Hendaye, a marée basse et par forte houle, les vagues forment des murs qui permettent aux windsurfeurs de prendre beaucoup de vitesse, au point de voir leur voile se déventer ! | CAPTURE ÉCRAN STEF VIDÉO / STÉPHANE DEBUIRE

Voiles et Voiliers : Il faut être affûté au niveau de la météo pour faire ton métier !

Thomas Traversa : C’est vrai ! Je dépends de ça donc il faut que je sois très attentif aux conditions exceptionnelles qui permettent de naviguer dans des endroits comme ça.

J’attendais depuis 4 ans que ce spot marche à nouveau.

Cette attente faut partie du plaisir que l’on a à naviguer quand toutes les conditions sont réunies.

Et puis je trouve cela très intéressant, de croiser tous ces paramètres.

Et puis il faut également qu’il fasse jour !

D’autant que cela se passe généralement en hiver…

Bref, là nous avons eu la chance de naviguer deux jours, même si le vent n’était pas parfaitement orienté.

Toute proche de la baie d’Hendaye, le cap Figuer représente un haut fond sur lequel viennent se briser d’énormes vagues que seules certaines conditions très rares permettent d’affronter en windsurf. | GOOGLE MAP

Il allait dans le même sens que le déroulement de la vague.

Du coup, lorsque l’on surfe dans le même sens que le vent, on perd de la puissance dans la voile.

En général je préfère quand le vent vient un peu de terre, pour garder le vent un peu au travers et conserver de la puissance.

Même s’il y avait une trentaine de nœuds, nous allons tellement vite dans la vague dans de telles conditions que la voile se dégonfle et nous manquons de puissance disponible pour prendre des risques, faire des courbes plus engagées, surtout qu’il y avait également pas mal de clapot.

La première journée de navigation, le 28 décembre, a été marquée par des grains très violents, au point que Thomas Traversa a préféré parfois attendre un peu au large avant de revenir dans l’arène. | CAPTURE ÉCRAN STEF VIDÉO / STÉPHANE DEBUIRE

Le plus souvent je casse mon matériel et je rentre à la nage

Voiles et Voiliers : Sur la vidéo, on te voit te mettre à l’eau en te jetant des rochers.

La barre (limite de déferlement des vagues) était-elle vraiment impossible à passer ?

Thomas Traversa : Le seul endroit où j’aurai pu me mettre à l’eau à part celui que l’on voit sur la vidéo aurait été la baie d’Hendaye mais avec une telle houle, les vagues atteignaient 6 mètres, et fermaient sous la forme de barre ce qui les rendaient quasiment impossibles à passer.

Partir de cette zone de rochers avancés qui fait face à la vague, dans la partie de la baie la plus abritée était tout simplement la seule solution.

Le plus compliqué sur ce spot est plutôt la sortie de l’eau !

Là, il y a plusieurs possibilités.

D’abord le plus souvent je casse mon matériel et je rentre à la nage.

Une autre solution est de tirer un bord jusqu’à la plage d’Hendaye, mais cela suppose que quelqu’un vienne nous chercher pour revenir au point de mise à l’eau, passe la frontière, etc.

Sinon il reste une plage de rocher plus proche de la vague mais les énormes mouvements d’eau à cet endroit-là, d’une amplitude qui peut atteindre les deux mètres, rendent son approche délicate.

L’absence de vent du fait que cette zone soit abritée, les courants à cette endroit-là ont fait que je me suis fait piégé la première journée à quelques mettre près et je suis arrivé sur des gros cailloux.

Cela m’a coûté un gréement complet et une petite blessure au pied.

La houle énorme était « intimidante » nous explique Thomas Traversa. On le croit ! | CAPTURE ÉCRAN STEF VIDÉO / STÉPHANE DEBUIRE

Les chutes peuvent être très violentes

Voiles et Voiliers : Justement, en termes de protection, on voit que tu utilises un gilet de flottaison qui fait également office de protection au-dessus de ton harnais non ?

Thomas Traversa : Oui c’est ce que l’on appelle une « impact vest » (Littéralement une veste d’impact, NDR) qui est un peu l’équivalent d’un gilet de ski nautique.

C’est un peu l’ancêtre des vestes qui sont aujourd’hui utilisées en surf tracté et qui sont équipée de mini bonbonnes de gaz pour être gonflées en cas de chute dans les grosses vagues, pour remonter plus vite.

Mais comme c’était une sortie d’hiver, je portais déjà une grosse combinaison (qui aide à la flottaison, NDR), un harnais plus ce gilet donc je n’avais pas besoin de plus, même si cet ensemble reste moins efficace qu’une veste que l’on peut gonfler comme un ballon.

Avoir suffisamment de flottabilité permet également de pouvoir se reposer un peu en se laissant flotter plus facilement dans l’eau, au large, sans compter que cela représente effectivement également une protection…

Très utile dans des chutes qui peuvent être très violentes !

WINDSURF THOMAS TRAVERSA VAGUE TEMPÊTES