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Cette vidéo exclusive filmée par une source qui veut rester discrète puis transmise par un tiers montre les Italiens de Luna Rossa, challengers de la prochaine Coupe de l’America, à l’entraînement dans un vent relativement fort. Pour Voiles et Voiliers, un spécialiste de l’America’s Cup devant lui aussi rester anonyme pour des raisons professionnelles décrypte ces images spectaculaires de l’AC 75 italien en vol. Ce n’est pas de l’espionnage, puisque la France n’est pas concurrente !

Toujours très spectaculaires, les vols du challenger italien de l’America’s Cup ont parfois besoin d’un peu d’explications techniques. | LUNA ROSSA PRADA PIRELLI TEAM

Propos recueillis par Christophe FAVREAU. Publié le 20/06/2020 à 12h00

Si la vidéo de cette manœuvre à la bouée sous le vent est devenue un classique des bateaux à foils, tels qu’on les connaît depuis la Coupe de l’America aux Bermudes en 2017 ou sur le circuit Sail GP, elle a rarement été filmée en AC 75. Le décryptage de notre spécialiste après la vidéo.

LA VIDÉO CI-DESSOUS :

https://voilesetvoiliers.ouest-france.fr/regate/coupe-de-l-america/video-un-vol-spectaculaire-de-luna-rossa-decrypte-par-un-specialiste-de-l-ac-75-c07c2fb8-b2c3-11ea-9c25-8163a2d013f7

Crédit vidéo : Vittorio d’ALBERTAS

« Ces images montrent un AC 75 au portant qui vole en équilibre sur son foil sous le vent. Il semble avoir une bonne VMG (Velocity Made Good que l’on peut traduire par meilleur compromis Cap / Vitesse, NDR).

La bouée est malheureusement légèrement plus basse que le VMG et pour l’atteindre il faut soit empanner 2 fois de façon très rapprochée, soit abattre plein vent arrière. Mais dans cette situation, la puissance des voiles devient insuffisante pour permettre au bateau de maintenir le vol. Le second foil est donc baissé et l’AC 75 vole maintenant sur ses 3 foils plein vent arrière.

La voile ne génère plus que très peu de puissance. Quand la bouée est par le travers, le bateau peut reloffer. La voile génère à nouveau sa pleine puissance et il est alors possible de relever le foil au vent tout en enroulant la bouée pour revenir au près » explique notre expert.

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Haut au portant, bas au près

Les images montrent également une navigation très basse au près, alors que l’AC 75 Luna Rossa vol beaucoup plus haut au portant : « La hauteur de vol est dépendante du ‘cant’ du foil, c’est-à-dire l’angulation du bras du foil par rapport à la coque. Quand il est relevé au vent, on a un ‘ ’cant’ de 70°et plus. Le foil qui travaille est baissé entre 10° et 20° ».

« Plus le foil est ‘ canté’ vers le bas, plus l’AC 75 va voler haut, plus la coque va être séparée de l’eau, mais moins il va y avoir de couple de redressement. Le point d’application de la force antidérive est donc plus près du centre de poussée vélique. La partie immergée est identique donc la traînée reste toujours la même. On vole à la même marque sur le foil mais quand on a moins de ‘ cant’. La coque est plus éloignée de l’eau ».

« Plus le foil est ‘ canté’ vers le bas, plus l’AC 75 va voler haut, plus la coque va être séparée de l’eau, mais moins il va y avoir de couple de redressement ». | LUNA ROSSA PRADA PIRELLI TEAM

« Au vent arrière, les AC 75 ont besoin de plus de marge sous la coque car les vitesses sont très rapides et toucher peut être très pénalisant, surtout dans le type de clapot que nous montrent ces images. Il y a moins besoin de force antidérive donc moins besoin de ‘canter’ au près » poursuit notre spécialiste.

Et l’expert de conclure : « Au près, le rappel est le levier le plus important pour aller vite donc les hommes de Luna Rossa essaient d’écarter au maximum le point d’application de la force antidérive de la force vélique, comme des équipiers au trapèze.

Ou comme si on pouvait élargir les bras d’un catamaran. La limite c’est quand la coque touche trop souvent l’eau ou que le foil sort de l’eau ».