Un Ultime est une machine redoutable. Un monstre de carbone, capable de filer à plus de 40 nœuds par mer forte… à la force du vent. Yves Le Blevec, sur Actual Leader, skippe l’une de ces machines. | ACTUAL LEADER
Ouest-France Guillaume NEDELEC Publié le 04/10/2019 à 10h15
Un Ultime est une machine redoutable. Un monstre de carbone, capable de filer à plus de 40 nœuds par mer forte… à la force du vent. Yves Le Blevec, sur Actual Leader, skippe l’une de ces machines. Il avait invité Ouest-France à bord pour une sortie en mer : décoiffant !
Il existe différents skippers. Ceux qui sifflent, ceux qui pestent ou ceux qui sourient. Yves Le Blevec est de ceux qui ont une banane radieuse. Surtout depuis qu’il a mis à l’eau son nouvel Ultim 32/23, l’ancien Sodebo de Thomas Coville. Une bête de près de 16 tonnes de carbone, 31 mètres de long, 21 de large, avec un mat de 35 m… De quoi offrir quelque 610 m2 au portant…
En ce jeudi matin, Le Blevec a d’autant plus le sourire. Le vent de sud-ouest, bien établi à 25 nœuds avec des rafales à plus de trente est l’occasion d’un bon galop d’essai avec sa machine. La sortie du port de la Trinité se fait au moteur. Mais la manœuvre prend un peu temps. Un tel Ultim n’est pas simple à manœuvrer, et la demi-douzaine d’équipiers de Le Blevec n’est pas de trop.
Surtout, quand en sortie de chenal, il faut hisser la grand-voile. Pas simple comme effort : il faut tourner les winchs pendant quelques minutes, pour que la voile arrive en haut du mat carbone. Cinq minutes d’effort intense, où le rythme cardiaque monte en flèche. « Et encore, on est quatre à travailler là, sourit Loïc Lingois, responsable du bateau. Imagine quand c’est à faire tout seul. » D’où l’importance de bien réfléchir à ses manœuvres.
Pourtant, l’effort est récompensé à l’instant même. Le J3, la petite voile à l’avant du mat, est sortie rapidement, et Actual Leader se met en branle. D’un seul coup, l’immense structure de carbone se met à siffler, à craquer. Le trimaran accélère. Accélère fort. Ce n’est évidemment pas aussi fort qu’une F1, mais la perception des choses est souvent relative. Et passer de 10 à 35 nœuds en quelques secondes, sur une mer formée est autrement plus impressionnant qu’une Porsche en ligne droite.
Un Ultime est une machine redoutable. Un monstre de carbone, capable de filer à plus de 40 nœuds par mer forte… à la force du vent. Yves Le Blevec, sur Actual Leader, skippe l’une de ces machines. | GUILLAUME NEDELEC
Actual Leader Ulteam se met alors à fendre les vagues, subissant à peine l’effet de la houle. Devant, l’horizon bouché par la bruine glisse sous les trampolines. C’est en regardant sur babord ou tribord que l’on se rend compte de la vitesse. Les embruns filent sous nos yeux, tandis que la cote défile, à une allure presque démentielle. Le Blevec s’amuse : « Depuis que l’on a ce bateau, on ne fait que des heureux ! On est quand même sur l’un des quatre voiliers les plus rapides de la planète. » Tout au long du bord, les 35 nœuds sont tenus.
Un Ultime est une machine redoutable. Un monstre de carbone, capable de filer à plus de 40 nœuds par mer forte… à la force du vent. Yves Le Blevec, sur Actual Leader, skippe l’une de ces machines. | GUILLAUME NEDELEC
Moins d’une heure après notre départ de La Trinité, une tour fait face à nous. « C’est le Four du Croisic », s’étonne presque Amélie Grassi, l’une des navigatrices qui va prendre le départ de la Mini, venue se changer les esprits dans l’attente du départ. En une heure, nous voici aux portes de Nantes. C’est dire la vitesse de ces machines.
Un Ultime est une machine redoutable. Un monstre de carbone, capable de filer à plus de 40 nœuds par mer forte… à la force du vent. Yves Le Blevec, sur Actual Leader, skippe l’une de ces machines. | GUILLAUME NEDELEC
Vient l’heure du virement de bord. Manœuvre effectuée en 10 minutes. On relève un foil, on winche, on vire. La vitesse du bateau, descendue à 10-15 nœuds le temps de virer remonte instantanément. De la houle qui résonnait dans la carcasse, on retrouve ce bruit sourd, ce bourdonnement qui prend toute la carcasse. Le bateau prend de la vitesse, 35, 36… 40 nœuds. Là, ça ne plaisante plus.
« C’est un bateau hyper sain, avec une super équipe autour. On commence à bien le prendre en main, bien voir comment il réagit », explique Yves Le Blévec. Depuis septembre, lui et son équipe travaillent activement à préparer Brest Atlantiques, qui sera la première confrontation entre les quatre Ultimes du plateau que sont Sodebo, Edmond de Rotschild, Macif et Actual Leader. « On a un potentiel de vitesse un peu moins élevé que les autres, admet Yves Le Blevec. Certes, ça se nivelle au large, mais on mise sur d’autres points forts, comme la fiabilité, la configuration du bateau. »
Un trimaran qu’il connaît de mieux en mieux, avec son équipe. « Cela fait quinze jours que l’on navigue chaque jour avec, confie Loïc Lingois. Même lors des sorties sponsors, on arrive à faire pas mal de choses, à en savoir plus sur les réactions du bateau. Au final, sur des sorties comme celle-ci, on fait plus de manœuvres que sur l’Atlantique. »
Un Ultime est une machine redoutable. Un monstre de carbone, capable de filer à plus de 40 nœuds par mer forte… à la force du vent. Yves Le Blevec, sur Actual Leader, skippe l’une de ces machines. | GUILLAUME NEDELEC
Avec l’impression de ne pas être encore allé au bout de la performance, en ce jeudi matin. « C’est clair, on aurait pu pousser encore un peu, sourit Yves Le Blevec. En inclinant un peu le mat, en changeant un peu les réglages. » Mais forcer sur le matériel n’est pas l’idée. Il s’agit plutôt de se mettre en confiance, à quelques semaines du départ de Brest Atlantique, et s’affiner encore un peu, car il y aura un coup à jouer. 20-30 jours de course, c’est autre chose qu’une sortie de deux heures.