Revue de presse Mediscoop du 23-01-2020

Le Parisien

Elsa Mari s’interroge dans Le Parisien : « Abuse-t-on du bistouri en France ? C’est ce qu’affirme ce jeudi toute une profession qui unit ses voix pour crier sa colère. Les radiologues interventionnels, ces chirurgiens sans scalpels, qui opèrent, guidés par l’imagerie, et suivent les artères, veines, pour soigner un organe, une tumeur, montent ensemble au créneau ».

« On enlève trop d’utérus, de prostates dans l’Hexagone, nous révèlent ces professionnels. Pis, selon leur estimation, 20.000 à 25.000 femmes se font retirer l’utérus chaque année alors que cela pourrait être évité », note la journaliste.

Elle explique ainsi que « 3% des femmes de plus de 35 ans développent un fibrome utérin, une tumeur bénigne. Certaines n’ont aucun symptôme, d’autres vivent un calvaire : règles interminables, éprouvantes, anémie, maux de ventre, grande fatigue.

Alors leur gynécologue leur propose une hystérectomie, une ablation de l’utérus, au moins en partie. Ce qu’elles ne savent pas, c’est qu’il existe une alternative, validée depuis 15 ans ».

Le Pr Marc Sapoval, radiologue à l’Hôpital européen Georges-Pompidou (Paris), rappelle : « On utilise une autre technique, l’embolisation, qui permet de guérir tout en conservant l’utérus. Le risque de complications majeures est divisé par deux, l’arrêt de travail est d’une semaine contre deux mois ».

Elsa Mari précise que « cette technique, réalisée en moins d’une heure, sous anesthésie locale, consiste à envoyer des petites billes dans les artères des fibromes pour les boucher, ce qui va entraîner leur mort. […] Les saignements se calment, les douleurs disparaissent, la patiente guérit et revit… ».

La journaliste souligne que « depuis 2011, il est écrit dans les recommandations des gynécos qu’ils doivent informer les patients que l’embolisation existe. C’est loin d’être le cas. En France, elles ne sont que 3% à en bénéficier ».

Le Pr Sapoval déclare ainsi : « Cela me scandalise. On a tout essayé, on est présent dans tous les congrès ! Ce problème est tellement grave qu’on est en train de créer un site Internet avec l’Agence régionale de santé d’Ile-de-France ».

Elsa Mari s’interroge : « Mais comment expliquer tant de résistance ? « La culture des gynécologues, c’est d’opérer», justifie le Dr Cohen [Hôpital européen de Marseille]. Certains n’hésitent pas à aller plus loin, évoquant une question d’argent ».

Le Dr Jean-Philippe Masson, président de la Fédération nationale des médecins radiologues (FNMR), remarque que « tout le monde est payé à l’acte, alors ils n’ont pas envie qu’on leur pique leur marché. Pourtant, une embolisation coûte 4 fois moins cher à la Sécurité sociale ! ».

Le Pr Vidal, radiologue (AP-HM), précise : « Il faut quand même clarifier une chose. Une patiente qui a eu une ablation de l’utérus n’a pas été mal prise en charge, elle a été soignée ».

Elsa Mari ajoute que « l’embolisation permet également d’échapper à des ablations partielles de la prostate, même si la technique, plus récente, n’est pas encore totalement validée. C’est autant de risques liés à la chirurgie évités, comme les troubles de l’éjaculation ».

Le Pr Alexandre de la Taille, hôpital Henri-Mondor (Créteil), note pour sa part que « le problème, c’est que la prostate repousse. Ce n’est pas une technique si miraculeuse que ça, sinon on enverrait tous nos patients ».

Le Parisien publie en outre un entretien avec Hélène Vernhet, présidente de la Fédération de radiologie interventionnelle, remarquant : « Vous dites qu’on fait trop d’ablations de l’utérus. Pourtant, les chiffres ne diminuent-ils pas ? ».

La spécialiste répond que « les gynécologues en retirent moins qu’avant : 42.000 en 2018 contre 60.000 en 2015. Mais ces chiffres en baisse s’expliquent par le recours à des médicaments qui permettent, aujourd’hui, de retarder l’intervention et peut-être une meilleure prévention. L’embolisation, qui consiste à boucher les tumeurs bénignes, elle, ne décolle pas ».

Hélène Vernhet souligne qu’« il y a un déficit d’information. C’est pour cela qu’on s’exprime aujourd’hui. Notre profession reste très mal connue des patients, des généralistes et de certains gynécologues. On ne sait pas trop pourquoi.

Les gens pensent que ces traitements sont réservés à des centres experts, qu’ils ne sont pas accessibles partout. Or, les spécialistes sont maintenant très nombreux. Et l’embolisation est de plus en plus utilisée comme c’est le cas dans le cancer du foie ».

Elle précise : « On fait de la médecine personnalisée. Chez une patiente qui a encore un désir de grossesse, il vaut mieux enlever une partie de l’utérus. Lorsqu’un organe est comprimé par les tumeurs, il faut agir vite et dans ce cas, l’hystérectomie, l’ablation de l’utérus, est le choix idéal.

Si l’on ne désire plus d’enfant, que l’on veut vite reprendre son travail, retrouver une activité sportive, l’embolisation est recommandée. Elle n’est pas toujours la meilleure solution mais les patientes doivent savoir qu’elle existe ».

Hélène Vernhet note enfin qu’ « on est dans une médecine interactive et non plus directive. Les patients se renseignent, découvrent une technique dans les médias, interrogent leur clinicien : est-ce que c’est possible ? Ils veulent participer à la prise en charge de leur traitement, comprendre ce qu’on leur donne.

Et c’est tout à fait normal ».

Le Parisien publie par ailleurs des témoignages de patients qui « ont choisi […] l’embolisation plutôt que l’ablation de l’utérus ou de la prostate ». Ainsi Xavier, 64 ans, qui « a insisté pendant des années pour bénéficier d’une technique qui ne nécessite pas d’enlever une partie de sa prostate. Et il a trouvé ! ».

Ce dernier déclare : « Faites le test. Observez un groupe d’hommes d’une soixantaine d’années, réunis dans la même pièce et vous verrez, ils se lèvent, sans arrêt, direction les toilettes. […] C’était insupportable, en en parlant à mes amis, on vivait tous la même chose. […] Je ne voulais pas qu’on me retire ma prostate ».

Le journal indique que le Toulonnais, « à force de recherches acharnées sur Internet, a découvert le nom d’une technique méconnue : l’embolisation. Il y a pile un an, la parenthèse du calvaire s’est enfin refermée. « Tout a changé », sourit, soulagé, le fringant retraité ».

Xavier ajoute : « Je pense que les médecins, facturés à l’acte, se sont un peu transformés en commerçants. Et puis on entend toujours parler de frottis, de mammographie, de cancer des testicules, mais pour la prostate, rien ! Il n’y a aucune information et les hommes, gênés, n’en parlent pas. […] J’ai tracé mon propre chemin car personne ne m’a montré le bon ».

Date de publication : 23 janvier 2020