Par Lindsey Tanner, Associated Press
03/05/2022
Pendant des années, les pédiatres ont suivi des directives erronées, qui établissaient un lien entre la race et les risques d’infections urinaires et de jaunisse du nouveau-né.
Dans une nouvelle politique publiée le 2 mai 2022, l’American Academy of Pediatrics (AAP) a déclaré qu’elle va passer l’ensemble de ses directives au crible afin d’éliminer la médecine « fondée sur la race » et les disparités en matière de santé qui en résultent.
L’influente AAP a déjà commencé à se débarrasser de ses conseils périmés et elle s’engage à examiner minutieusement l’ensemble de son « catalogue », y compris les directives, le matériel pédagogique, les manuels et les articles d’infolettre, a précisé le Dr Joseph Wright, auteur principal de la nouvelle politique et responsable de l’équité en matière de santé au sein du système médical de l’Université du Maryland.
« Nous sommes beaucoup plus rigoureux dans la manière dont nous évaluons le risque de maladie et les résultats cliniques, explique le Dr Wright.
La révision va donc demander un effort considérable. »
La Dre Brittani James, médecin de famille et directrice médicale d’un centre de santé de Chicago, estime que l’Académie a pris une décision cruciale.
« Ce qui rend cette affaire si monumentale, c’est le fait qu’il s’agit d’une institution médicale et que ce ne sont pas que des mots: ils agissent », dit-elle.
Ces dernières années, d’autres grands groupes de médecins, dont l’American Medical Association, ont pris des engagements similaires.
Ces derniers sont motivés en partie par les mouvements en faveur des droits civils et de la justice sociale, mais aussi par la science qui montre le rôle important que jouent les conditions sociales, la génétique et d’autres facteurs biologiques dans la détermination de la santé.
L’AAP exhorte les autres institutions médicales et groupes de spécialistes à adopter une approche similaire pour éliminer le racisme en médecine.
L’année dernière, l’Académie a retiré une directive fondée sur l’idée non prouvée que les enfants noirs couraient moins de risques d’infection urinaire que les enfants blancs.
Or, une étude a montré que les plus importants facteurs de risque étaient les infections urinaires antérieures et les fièvres de plus de 48 heures, et non la race, prend pour exemple le Dr Wright.
Le Dr Wright précise qu’une révision du guide sur la jaunisse du nouveau-né – qui actuellement suggère que certaines races présentent des risques plus ou moins élevés – est prévue pour cet été.
La Dre Nia Heard-Garris, cheffe d’un groupe académique sur la santé et l’équité des minorités et pédiatre à l’Hôpital pour enfants Ann et Robert H. Lurie de Chicago, souligne que la nouvelle politique propose un court historique « sur la façon dont certaines interventions cliniques fréquemment utilisées ont vu le jour: par le biais de la pseudo-science et du racisme ».
Quelle que fût l’intention, ces interventions ont porté préjudice aux patients, soutient la Dre Heard-Garris, avant d’ajouter que « Cela viole notre serment en tant que médecins – de ne pas nuire – et, pour cette raison, ces interventions ne devraient plus être utilisées. »
De son côté, la Dre Valerie Walker, spécialiste des soins aux nouveau-nés et de l’équité en matière de santé à l’Hôpital pour enfants Nationwide de Columbus, dans l’Ohio, a qualifié la nouvelle politique d’ « étape critique » vers la réduction des disparités raciales en matière de santé.
« Nous ne pouvons pas nous contenter de colmater une fuite dans un tuyau plein de trous et nous attendre à ce qu’il soit réparé, lance la Dre Heard-Garris.
Cette déclaration éclaire les pédiatres et les autres prestataires de soins de santé pour qu’ils trouvent et réparent ces trous.»
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