L’arrêté ministériel du 23 mars 2022 – signé par Annick Girardin, ministre de la Mer -, définit une liste précise de courses au large ouvrant doit à des équivalences pour l’obtention du brevet professionnel Capitaine 200 Voile.
Si elle a le mérite de dissiper un certain flou qui prévalait depuis le décret du 24 juin 2015, cette liste, que nous présentons intégralement, n’en est pas moins assortie de nombreuses limitations.
Nous les détaillons ci-dessous.
La Route du Rhum en Ultim – ici Francis Joyon à l’entraînement sur Idec Sport – vaut équivalence quel que soit son classement, à condition de terminer. | (© JEAN-MARIE LIOT, ALÉA)
Olivier CHAPUIS. Publié le 01/04/2022 à 16h57
“L’Arrêté du 23 mars 2022 relatif à la délivrance de titres de formation professionnelle maritime aux marins relevant de l’activité de course au large” a été publié le 26 mars au Journal officiel de la République française.
Signé par la Ministre de la Mer, Annick Girardin, cet arrêté complète le décret du 24 juin 2015 qui avait établi les dispositions permettant à des skippers de compétition de se voir délivrer tout ou partie des brevets et des certificats d’aptitude maritimes par reconnaissance de leur expérience et de leurs compétences “pour exercer une activité professionnelle et des fonctions à bord d’un navire à voile en complément ou en reconversion de leur activité de sportif”.
Cette procédure est pilotée par la Fédération française de voile (FFV) qui l’appliquait au vu du curriculum vitae nautique du demandeur, tout en préconisant si besoin des formations complémentaires.
Avec le présent arrêté du 23 mars 2022, la nouveauté réside dans la définition d’une liste précise des courses au large ouvrant droit à ces équivalences, pouvant permettre de dissiper un certain flou qui entourait cette prérogative de la FFV (mais peut-être pas tout le flou comme on le verra plus loin).
Un tableau pour les équivalences
Le navigateur doit avoir terminé l’une de ces compétitions d’une part et avoir figuré d’autre part dans le haut du classement selon un pourcentage prédéfini pour chacune d’entre-elles et en fonction de la classe considérée.
En clair, si l’on prend la première ligne du tableau ci-dessous qui figure en annexe de l’arrêté, un skipper doit avoir terminé la Solitaire du Figaro dans le premier cinquième (20 %) du haut du classement général final après jury afin de voir sa performance retenue comme ouvrant droit à équivalence.
Tableau fourni en annexe de l’arrêté. | LÉGIFRANCE
Où l’on voit donc qu’il suffit de terminer classé un Vendée Globe en Imoca ou une Route du Rhum en Ultim (comme toute autre course Ultim) pour être éligible mais qu’il faut figurer dans la moitié haute du classement de la même Route du Rhum en Ocean Fifty ou en Imoca pour y avoir droit alors que l’exigence d’un Ocean Fifty est pourtant aussi élevée que celle d’un vieil Imoca sans foils.
Que sur les transats en équipage des Class 40 telles que Québec/Saint-Malo, seuls sont concernés les skippers et qu’une course très technique comme la Normandy Channel Race exigeant au moins autant de sens marin et de connaissances qu’une transat n’est pas dans la liste.
Sur The Ocean Race pour les Imoca et les VOR, s’y ajoutent les éventuels co-skippers et les chefs de quart mais pas les équipiers. Quant aux Minis 6.50, ils ne sont pas du tout retenus dans le dispositif – même pas pour la Mini-Transat – dispositif qui comporte d’ailleurs une petite imprécision de formulation en évoquant aussi les records océaniques à l’article 2 quand aucun de ces records n’est mentionné dans le tableau ci-dessus.
Le Capitaine 200 fait partie des certifications professionnelles devant être revalidées tous les 5 ans.
Est essentiellement visé par cette équivalence le brevet de Capitaine 200 Voile.
Ce dernier est dans la terminologie officielle “délivré aux marins qui répondent aux conditions de formation pour être en mesure d’assurer les fonctions de capitaine et de chef mécanicien en toute sécurité et dans le respect des réglementations existantes”.
Ce titre polyvalent permet d’exercer “au pont” la fonction de capitaine d’un navire à voile armé à la plaisance (avec une utilisation commerciale) d’une jauge brute inférieure à 200 et sans limite de distance de la côte.
“À la machine”, le Capitaine 200 permet d’exercer la fonction de chef mécanicien sur tout navire d’une puissance propulsive inférieure à 250 kW.
En Class 40, une course très technique comme la Normandy Channel Race (ici en 2021) ne vaut pas équivalence alors qu’une transat si, à condition de terminer dans le premier cinquième du classement. | (© JEAN-MARIE LIOT)
Reste à remplir d’autres conditions : avoir 20 ans minimum, avoir sa licence FFV, être titulaire d’un certificat d’aptitude médicale à la navigation, d’une attestation délivrée par l’École nationale de voile et des sports nautiques (ÉNVSN) justifiant de l’acquisition des compétences en matière de réglementation nationale, de l’attestation de réussite au module M1-1 du Capitaine 200 (en l’absence de ce module, le Capitaine 200 n’est valable “qu’au pont”), du certificat de formation de base à la sécurité (CFBS) pour exercer des fonctions à bord de navires armés au commerce ou à la plaisance (l’ÉNVSN délivre une attestation ouvrant droit au CFBS pour les skippers), du certificat attestant la validation de l’enseignement médical (avec des distances à la côte limitées à 20 ou 200 milles pour les niveaux I et II, seul le III est sans limite), et du certificat restreint d’opérateur (CRO, l’attestation fournie par la FFV quant aux courses précitées y suffit mais pas au-delà de 20 milles en France métropolitaine… sinon il faut un certificat général d’opérateur ou CGO).
Le tout doit bien sûr être en cours de validité.
Étant entendu que le Capitaine 200 fait partie des certifications professionnelles devant être revalidées tous les 5 ans afin de “garantir le maintien des compétences des marins”.
Aux yeux de l’administration française – en l’occurrence de la nouvelle Direction générale des affaires maritimes, de la pêche et de l’aquaculture (DGAMPA) en charge de l’exécution de cet arrêté -, il ne suffira donc pas de gagner le Tour du monde en Ultim en solitaire pour devenir compétent ad vitam aeternam.
O.C.
Le Vendée Globe en Imoca – ici Thomas Ruyant à l’entraînement sur LinkedOut – vaut lui aussi équivalence à condition de le terminer classé. | (© PIERRE BOURAS / TR RACING)
P.S. Mon blog Route fond continue sur cette page Olivier Chapuis .
Celle-ci héberge non seulement les nouveaux articles mais aussi tous ceux publiés sur Route fond depuis le premier, mis en ligne le 1er décembre 2008.