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Le chantier CDK de Lorient est en ébullition pour achever la construction du maxi-trimaran d’Armel Le Cléac’h. Concentré d’innovations et de technologies de pointe, Banque Populaire XI prend forme.

À un mois de la mise à l’eau, prévue fin avril, nous avons eu droit à une visite en avant-première en compagnie de Gautier Levisse, responsable du bureau d’études au sein du team Banque Populaire.

Désormais assemblé, le trimaran géant de 32 mètres révèle ses formes. La construction du Maxi Banque Populaire XI entre dans sa phase finale. | OLIVIER BOURBON

Olivier BOURBON. Publié le 23/03/2021 à 12h05

Fiabilité accrue, optimisation du vol et de l’aéro

Gautier Levisse : « Nous nous sommes inspirés de notre précédent Ultim (Banque Populaire IX) pour ce nouveau bateau.

 Pendant la Route du Rhum 2018, BP IX a heurté quelque chose, ce qui a entraîné par la suite la rupture du bras avant puis un chavirage.

Cette expérience nous a poussés à beaucoup renforcer Banque Populaire XI, qui pèse une tonne de plus que son prédécesseur (BP IX faisait 14 tonnes, NDLR).

Ce sont surtout les bras avant qui ont été renforcés.

Ils ont une structure primaire et une structure secondaire.

Si le carénage devant casse, on peut quand même ramener le bateau dans un port.

D’autres renforts ont été ajoutés un peu partout, dans les bras arrière, les flotteurs, les foils…

C’est une suite logique après la mésaventure de la Route du Rhum, nous voulons une fiabilité accrue sur notre nouveau bateau.

Cela induit une prise de poids mais c’est un compromis : pour gagner des courses, il faut franchir la ligne d’arrivée. Chaque élément non structurel du bateau a été optimisé pour ne pas entrer dans une spirale trop importante en termes de poids.

Par ailleurs, nous ne trouvions pas normal de ne pas pouvoir détecter une avarie comme celle survenue sur la Route du Rhum.

Nous avons donc mis des fibres optiques de détection d’impacts dans les parties inaccessibles et non visibles de l’équipage.

Pour rester dans des considérations générales, outre la fiabilité, deux autres lignes de conduite ont guidé les changements par rapport à Banque Populaire IX : optimiser le vol et se concentrer davantage sur l’aéro (avec des carénages et des bâches). »

La coque centrale de Banque Populaire XI affiche une carène tendue, agressive. | OLIVIER BOURBON

Une géométrie différente

Gautier Levisse : « Les flotteurs ont été construits dans les moules de ceux de Banque Populaire IX.

Mais ils ne sont pas strictement identiques : ils ont été élargis sur leur partie arrière car les systèmes de safrans sont plus volumineux.

La coque centrale est entièrement nouvelle.

Sa carène est plus tendue, plus agressive, plus fine, avec une masse optimisée.

Quant aux bras avant et arrière, outre les renforts, ils affichent également une géométrie différente de celle de Banque Populaire IX.

Ils ne sont pas installés à la perpendiculaire de la coque centrale mais affichent une géométrie dite en « X » (les bras avant et ceux de l’arrière forment une croix, NDR). Ce choix a été dicté par des contraintes de raideur, pour avoir une stabilité de vol plus aboutie. »

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Ce qui frappe avec le cockpit de Banque Populaire XI, c’est le fait qu’il soit très rabaissé et aérodynamique. | OLIVIER BOURBON

Un cockpit protégé et aérodynamique

Gautier Levisse : « Le cockpit est plus rabaissé et plus profond que ne l’était celui de Banque Populaire IX.

La casquette de protection est tout en longueur, elle s’étire du bras avant jusqu’à la barre d’écoute, soit presque 12 mètres de long.

Cela permet d’abaisser le centre de gravité et d’optimiser l’aéro en ayant le moins de résistance possible à l’avancement.

Le cockpit, fermé, est très protégé des embruns et de l’exposition à la mer.

Les deux postes de barre permettent de sortir la tête dehors, grâce à une trappe refermable.

On devrait être assez « confort » pour naviguer, il sera possible de manœuvrer au sec, tout en gardant une bonne vision vers l’extérieure, la plus panoramique possible. Banque Populaire XI est conçu à la fois pour naviguer en équipage réduit et en solitaire. Toutes les commandes du bateau sont à portée de main.

La barre est très proche des winchs qui sont eux-mêmes très proches de la cabane, la partie névralgique de la vie à bord. On peut sortir du cockpit pour aller à l’avant du bateau de façon assez simple. »

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Bien que très protégé, le cockpit offre une belle vision panoramique sur l’extérieur. | OLIVIER BOURBON

L’idée n’est pas de voler plus tôt, mais de le faire de façon plus stable

Gautier Levisse : « Comme je le disais, l’un des grands enjeux de Banque Populaire XI est d’optimiser le vol.

L’idée n’est pas de voler plus tôt, mais de le faire de façon plus stable.

Nous ne voulons pas battre des records de vitesse absolue car ce n’est pas le programme du bateau.

Nous souhaitons plutôt garder des vitesses moyennes élevées.

Les foils sont plus grands, avec plus d’allongement.

Idem pour les safrans qui ont davantage de surface portante.

Plus un appendice est grand, plus sa poussée est générée rapidement.

Les foils ou les safrans ne font pas voler le bateau à eux seuls.

Pour que cela fonctionne, il faut une bonne cohésion entre les quatre appendices immergés : la dérive à plan porteur, le foil sous le vent, le safran de flotteur sous le vent et le safran de coque centrale.

On ne cherche pas à voler haut, mais plutôt à faire légèrement décoller les coques. BP XI ne va pas évoluer sur une mer plate mais dans un univers de large avec des trains de houle.

Il faut donc enfoncer les appendices le plus profond possible dans l’eau pour éviter qu’ils décrochent. »

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Voici la vision sur le bateau qu’aura Armel Le Cléac’h quand il sera à la barre de Banque Populaire XI. | OLIVIER BOURBON

La grand-voile est beaucoup plus élancée

Gautier Levisse : « Dès le début de la conception, nous avons fait des études sur le plan de voilure.

L’objectif : déterminer le meilleur ratio entre les voiles d’avant et la grand-voile pour trouver de l’allongement et avoir, à surface égale, moins de traînée aéro.

La grand-voile est beaucoup plus élancée.

Elle fait quasiment la même surface que celle de Banque Populaire IX mais elle est plus haute et plus courte en bôme. Le mât est assez classique, la bôme également, même si elle a été raccourcie de deux mètres.

Les surfaces des quatre voiles d’avant augmentent un peu. En tout, nous aurons cinq voiles : GV, J0 (gennaker), J1 (petit gennaker), J2 (génois) et J3 (foc). »

Responsable du bureau d’études au sein du team Banque Populaire, Gautier Levisse connaît sur le bout des doigts le nouveau trimaran. | V.CURUTCHET – BPCE

La phase de fiabilisation et d’optimisation va durer toute la vie du bateau

Gautier Levisse : « Une fois Banque Populaire XI mis à l’eau, il faudra s’assurer que tous les éléments conçus et montés sont fonctionnels.

Cette phase de fiabilisation et d’optimisation va durer toute la vie du bateau.

Il y a tellement de systèmes, tellement de capteurs…

Les bras, les flotteurs et les appendices sont truffés de fibre optique.

Il y a un nombre de données considérable à exploiter pour faire en sorte qu’Armel Le Cléac’h puisse avoir un bateau fiable, cohérent et exploitable au meilleur de son potentiel. »

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