Actualités – publiée le 19/11/2019 par Équipe de rédaction Santélog

Science

Uune partie des déficiences intellectuelles associées à la trisomie 21 peut être attribuée à une production de protéines altérée dans l'hippocampe

C’est une découverte surprenante et un immense espoir pour les personnes atteintes de trisomie 21 ou syndrome de Down et leurs familles. Sur un modèle animal du syndrome, ces scientifiques de l’Université de Californie – San Francisco (UCSF) sont parvenus, avec des médicaments, à corriger une partie des déficits d’apprentissage et de mémoire associés à la maladie. Leurs travaux, publiés dans la revue Science, révèlent en effet, que certaines des déficiences intellectuelles associées peuvent être attribuées à une production de protéines altérée dans l’hippocampe, une zone clé du cerveau pour l’apprentissage et de la formation de la mémoire.

Bien que les caractéristiques cognitives de ce syndrome soient depuis toujours considérés comme irréversibles, ces travaux suggèrent qu’il serait pourtant possible d’améliorer la fonction cognitive chez les personnes atteintes.

La trisomie 21 ou syndrome de Down est la principale cause génétique d’invalidité cognitive et le trouble chromosomique le plus fréquemment diagnostiqué. Il existe un modèle animal de la maladie, la souris « Ts65Dn », développée pour présenter les caractéristiques génétiques, comportementales et cognitives du syndrome humain.

Dans cette étude, les chercheurs identifient des médicaments qui en ciblant l’un des principaux mécanismes de réponse au stress des cellules cérébrales, ramènent le niveau de protéines à la normale, ce qui inverse une partie des déficits cognitifs chez la souris modèle.

L’approche protéase pour inverser les déficits cognitifs du syndrome de Down

La trisomie 21, causée par une copie supplémentaire du chromosome 21, est généralement étudiée sous l’angle génétique, les équipes de recherche se concentrant principalement sur les voies par lesquelles le chromosome superflu perturbe l’activité génétique. Cette étude se concentre sur le mécanisme de fabrication et de contrôle de la qualité des protéines de la cellule, ou « protéostase ».

« Notre approche est différente : nous tentons ici d’identifier un lien entre les anomalies de protéostase et le syndrome », explique l’auteur principal, le Dr Peter Walter, professeur de biochimie et de biophysique à l’UCSF.

Identifier les anomalies de la protéostase susceptibles de contribuer aux symptômes de la trisomie 21: les chercheurs utilisent la technique de « polysome profiling », une technique qui permet de prendre un instantané détaillé des processus de production de protéines de la cellule en action. L’équipe découvre ainsi que l’hippocampe de ces souris modèles produit 39% de protéines en moins.

Pourquoi une copie supplémentaire du chromosome entraîne une baisse de la production de protéines ? Les chercheurs montrent que les cellules de l’hippocampe chez les souris modèles ont activé la « réponse intégrée au stress » (ISR : integrated stress response), un circuit biologique qui détecte « quand quelque chose ne va pas », ici la présence d’un chromosome supplémentaire. Cette voie déclenche alors une réaction protectrice qui réduire la production de protéines. En d’autres termes, la cellule surveille constamment sa propre santé et en cas de problème, la cellule réagit en produisant moins de protéines, ce qui est généralement une réponse sensée au stress cellulaire. Mais la synthèse protéique est nécessaire pour des fonctions cognitives supérieures, donc lorsqu’elle est réduite, la formation de la mémoire est impactée.

La réponse intégrée au stress est toujours activée : les chercheurs en obtiennent la confirmation en analysant des échantillons post-mortem de tissu cérébral de personnes trisomiques. Et cette réponse est active dans les cellules qui portent le chromosome supplémentaire. Pour les chercheurs, il est alors clair que la réponse intégrée au stress est bien impliquée dans les symptômes de la trisomie 21. Ils recherchent donc ce qui peut bien la déclencher.

4 enzymes peuvent activer la réponse intégrée au stress : ici, les scientifiques révèlent le rôle clé de l’une d’entre elles, « PKR », dans l’activation de la réponse au stress, dans le cas de la trisomie 21, dans les cellules de l’hippocampe. En bloquant l’activité de la PKR, ils parviennent à empêcher ce processus de réponse au stress et à inverser les baisses de production de protéines observées dans le cerveau de souris modèles. Mais plus impressionnant encore, la fonction cognitive de ces souris s’en trouve restaurée.

Des améliorations à la fois physiologiques et comportementales : ces souris « privées » de réponse cellulaire au stress présentent une amélioration de la fonction au niveau des synapses, qui assurent la communication entre les cellules nerveuses et permettent aussi l’apprentissage et la formation de souvenirs à long terme.

Des résultats extrêmement prometteurs qui constituent un tout premier pas important dans la recherche de traitements susceptibles d’améliorer la vie et la santé globale des personnes atteintes trisomie 21. « Nous sommes partis d’une situation qui semblait sans espoir. Mais nous avons peut-être trouvé « une voie en or » ».

Source: Science 15 Nov 2019 DOI: 10.1126/science.aaw5185 Activation of the ISR mediates the behavioral and neurophysiological abnormalities in Down syndrome

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