http://www.jim.fr/e-docs/00/02/B1/39/carac_photo_1.jpg Publié le 04/03/2019

De nombreux pays tentent de lutter contre la résistance aux antibiotiques en sensibilisant aux prescriptions inutiles ou inappropriées. La réduction de l’utilisation des antibiotiques peut être obtenue de plusieurs façons : en réservant les antibiotiques aux cas qui le nécessitent réellement, en adaptant les choix d’antibiotiques aux conditions spécifiques et en limitant les durées des traitements. Ce dernier critère n’a pas toujours été d’actualité. Historiquement en effet, les traitements longs étaient encouragés. Les travaux montraient en effet l’émergence de résistances en lien avec des doses suboptimales de pénicilline dans le traitement des infections à Streptococcus Pneumoniae.

Actuellement, le développement de résistances chez les bactéries commensales communes, plutôt que chez celles responsables d’infections, tend à rendre ce raisonnement caduque : plus l’exposition aux antibiotiques est prolongée, plus grand est le risque de développement d’une résistance au cours des infections suivantes. Sans compter que les traitements prolongés exposent les patients à un risque élevé d’effets indésirables. Pour guider les praticiens, la durée de l’antibiothérapie au cours des infections les plus courantes fait désormais l’objet de recommandations.

Avec l’objectif d’évaluer la durée des traitements antibiotiques en pratique de ville et son adéquation avec les recommandations, une équipe londonienne a mené une étude transversale incluant près de 1 million de consultations de médecine générale ayant donné lieu à une prescription d’antibiotiques, pour une ou plusieurs indications : sinusite aiguë, pharyngite aiguë, toux aiguë et bronchite, pneumopathie, exacerbation de broncho-pneumopathie chronique obstructive, otite moyenne aiguë, cystite et prostatite aiguës, pyélonéphrite, cellulite, impétigo, scarlatine, gastro-entérite. Le critère principal était le pourcentage de prescriptions d’antibiotiques dont la durée excédait les recommandations, et le nombre total de jours supplémentaires prescrits par rapport aux recommandations, pour chaque indication.

Une durée supérieure à ce qui est recommandé pour 80 % des infections respiratoires hautes

Dans cette cohorte, les deux tiers des prescriptions d’antibiotiques ont pour motif une infection du haut appareil respiratoire, une toux aiguë ou une bronchite. Force est de constater que 80 % de ces traitements ont des durées supérieures aux recommandations. La sinusite aiguë fait exception, avec seulement 9,6 % des prescriptions supérieures à 7 jours ainsi que la pharyngite aiguë, pour laquelle seulement 2,1 % des prescriptions dépassent 10 jours (les récentes recommandations au Royaume Uni préconisent 5 jours).

La cystite de la femme est un autre domaine où les prescriptions ne suivent pas les recommandations, la moitié d’entre elle dépassant les durées préconisées. En revanche, pour les pyélonéphrites, cystites masculines, impétigo, cellulites, seulement 4 à 18 % des prescriptions dépassent les durées préconisées.

Au total, pour les consultations incluses dans cette étude, si les durées prescrites respectaient les recommandations, environ 1,3 millions de jours d’antibiothérapie seraient évités. Rapporté à la population du Royaume-Uni, cela équivaut à 1,1 million de jours d’antibiothérapie évités pour les infections respiratoires et 100 000 jours pour les cystites de la femme.

Les auteurs estiment nécessaire que de futurs travaux s’attachent à expliquer pourquoi les praticiens ne suivent pas les durées préconisées (ignorance, septicisme vis à vis des recommandations ? ).

Dr Roseline Péluchon

RÉFÉRENCES : Pouwels KB et coll. : Duration of antibiotic treatment for common infections in English primary care: cross sectional analysis and comparison with guidelines. BMJ 2019;364:l440

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