Actualités – publiée le 17/03/2018 par Équipe de rédaction Santélog
The Journal of Physiology
La sarcopénie, caractérisée par la perte de fibres musculaires, touche environ 10 à 20% des personnes de plus de 65 ans. En cas de forme sévère, cette perte musculaire avec l’âge, peut aboutir à l’impossibilité d’accomplir les activités du quotidien, à la perte d’autonomie et à la dépendance. Et s’il est possible de ralentir ou de prévenir la perte musculaire par l’exercice ou la kinésithérapie, cela ne permet pas de récupérer les fibres perdues. Ces scientifiques britanniques soutiennent dans le Journal of Physiology, que cette perte musculaire considérée comme inévitable pourrait être arrêtée : en effet, ils montrent comment le corps compense la perte de fibres musculaires par une augmentation de l’activité nerveuse dans le muscle. Un processus de protection naturel dont il serait peut-être possible de tirer parti pour préserver la force musculaire avec l’âge.
Avec le vieillissement, les muscles perdent en masse et en force. Ainsi, la sarcopénie définie par cette faiblesse de masse et force musculaires OU par une vitesse de marche très ralentie. Précisément, deux phénomènes sont à considérer, rappellent les auteurs, la perte de fibres musculaires et la réduction du nombre de nerfs qui forment les faisceaux de fibres musculaires. La combinaison d’une cellule nerveuse (motoneurone) avec une connexion à la fibre musculaire est appelée « unité motrice ».
Les chercheurs de l’Université de Manchester voulaient savoir s’il existe une différence dans la taille et le nombre d’unités motrices entre les hommes plus jeunes et les hommes plus âgés, en bonne santé ou atteints de perte musculaire liée à l’âge. L’étude a été menée auprès de 95 hommes âgés de 65 à 90 ans (13 exempts de sarcopénie, 53 « pré-sarcopéniques » et 29 sarcopéniques) et ont comparé leurs muscles et les niveaux d’activité nerveuse dans ces muscles, avec ces mêmes données chez 48 hommes plus jeunes (âgés de 18 à 40 ans). Les chercheurs ont pris en compte l’IMC, la composition corporelle, la qualité et la quantité de muscles en utilisant l’imagerie par résonance magnétique (IRM) ou l’échographie, ainsi que la densité osseuse des participants. Pour évaluer les unités motrices, les chercheurs ont utilisé l’électromyographie (EMG), une technique qui permet, à l’aide d’électrodes de détecter l’activité musculaire. L’analyse constate que :
- tous les participants plus âgés présentent moins de fibres musculaires que les participants plus jeunes ;
- les participants plus âgés possèdent un nombre réduit de 63 à 65% d’unités motrices que les hommes plus jeunes qu’ils aient ou non une sarcopénie ;
- les participants plus âgés avec sarcopénie légère ou modérée présentent des niveaux plus élevés d’activité nerveuse dans le muscle restant : comparativement aux hommes plus jeunes, l’activité nerveuse dans chaque unité motrice est accrue de 26% chez les hommes âgés non sarcopéniques et de 41% chez les hommes âgés pré-sarcopéniques.
La qualité et la quantité de muscle varient ainsi avec le vieillissement : la perte d’unités motrices survient relativement tôt dans le processus de vieillissement, l’expansion des unités motrices existantes suggère que le corps s’adapte pour préserver le muscle. Ces données apportent une meilleure compréhension de la façon dont la perte musculaire peut être ralentie ou évitée, écrivent les chercheurs dans leur communiqué. En particulier en favorisant cette adaptation naturelle de l’activité nerveuse des unités motrices.
Cependant, dans l’attente de nouvelles thérapies, la meilleure méthode pour maintenir sa force musculaire est d’opter pour un régime alimentaire sain et équilibré et de maintenir une activité physique conforme aux recommandations dont des exercices de « renforcement » au moins 2 fois par semaine.
Source : The Journal of Physiology March 11 2018 DOI: 10.1113/JP275520 Failure to expand the motor unit size to compensate for declining motor unit numbers distinguishes sarcopenic from non-sarcopenic older men
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Revue de presse Mediscoop du 14-03-2018 – « Sarcopénie, la maladie du vieillissement musculaire » –
Damien Mascret constate dans Le Figaro que « plus d’un senior sur dix manquerait de muscle, notamment dans les jambes, au point d’être menacé d’une perte d’autonomie. Une véritable maladie appelée sarcopénie, qui n’a pourtant été identifiée qu’en 1988 par l’Américain Irwin Rosenberg et reconnue comme telle en 2016 par l’OMS dans sa classification des maladies ! ».
Le journaliste précise que « le mécanisme est en revanche encore mal connu » et indique que « des chercheurs de l’université de Manchester (Royaume-Uni) et de l’université de Waterloo (Canada) viennent de confirmer [dans The Journal of Physiology] l’intérêt de l’une des pistes physiopathologiques : la perte des motoneurones, les nerfs qui arrivent sur les muscles ».
« Ils ont en effet comparé les cuisses de 95 hommes âgés de 65 à 90 ans avec celles de 48 hommes plus jeunes, âgés de 18 à 40 ans, tant en IRM, pour le volume musculaire, qu’avec des mesures électromyographiques, pour l’impulsion électrique », indique Damien Mascret.
Le journaliste retient que ces travaux « confirment l’existence un mécanisme appelé dénervation, ou perte des motoneurones. Les chercheurs remarquent d’une part que les motoneurones sont moins nombreux dans les muscles des seniors, et d’autre part qu’un mécanisme de compensation se produit chez certains, évitant la sarcopénie, grâce à une augmentation de la taille des unités motrices ».
Le Pr Marc Bonnefoy, chercheur Inserm et professeur de gériatrie à Lyon (université Claude-Bernard), précise ainsi : « Pour qu’un muscle se contracte il faut une contraction synchrone des fibres musculaires qui le forment, ce qui nécessite des motoneurones. On savait déjà qu’il y avait une diminution de la force musculaire proportionnelle à la diminution des motoneurones, cette étude ouvre des pistes intéressantes qui devront être confirmées par d’autres études, notamment de suivi mais aussi pour voir l’effet de l’exercice physique ».
Damien Mascret note que « les chercheurs voudraient maintenant vérifier les possibilités de récupération d’unités motrices ».
Le Dr Vincent Mouly, chercheur à l’Institut de myologie (Paris), indique que « pour que les cellules fonctionnent bien, il faut que les noyaux fonctionnent bien, malheureusement le noyau d’une cellule musculaire à une durée de vie d’environ dix ans. Pour assurer le renouvellement il faut des cellules-souches musculaires mais malheureusement on en possède dix fois moins vers 70-75 ans qu’à l’âge adulte ».
Damien Mascret remarque en outre : « Pourquoi se produit-il une dénervation musculaire ? ». Le Pr Bonnefoy déclare que « le mécanisme est bien connu lors d’une immobilisation, en quelques jours on va perdre de la masse et de la force musculaire qu’il faudra 3 mois pour récupérer lors de la rééducation, et plus on est âgé et sarcopénique, et plus la récupération sera longue ».
Le journaliste note que « le mécanisme est moins clair pour la sarcopénie progressive », puis relève que « tant que la sarcopénie n’est pas mieux expliquée, les experts en restent aux recommandations classiques pour lutter contre le problème », comme une « activité physique régulière » et une « alimentation suffisante en calories et en protéines ».
Date de publication : 14 mars 2018
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