De The Ocean Race au Retour à La Base, les skippers Imoca ont vécu une saison 2023 exceptionnelle. Retour sur une année riche en records, avec six courses organisées, en équipage, en double et bien sûr en solitaire.
Cette saison 2023 était cruciale pour la qualification au Vendée Globe 2024. | JEAN-MARIE LIOT / ALEA
G.L. Publié le 20/12/2023 à 17h29
Rétrospective. Une année 2023 record pour la classe Imoca (ouest-france.fr)
« C’était onze mois de navigation sans interruption », se remémore le Britannique Sam Goodchild, « content » que l’année 2023 touche à sa fin « pour pouvoir se reposer. »
Sam Goodchild, qui a remporté le championnat Imoca 2023, a des raisons d’être fatigué.
Cette année 2023, six courses ont animé la classe Imoca (un record) et il a été au départ de toutes les épreuves.
Le championnat Imoca Globe Series 2023 a rassemblé 120 navigateurs et navigatrices, issus de 16 pays.
VOIR AUSSI : Sam Goodchild remporte le Championnat Imoca 2023 et rêve de victoire sur le Vendée Globe
The Ocean Race, une première en Imoca
L’année 2023 a commencé en janvier par le départ d’Alicante de The Ocean Race, un tour du monde en équipages par étapes, pour la première fois ouvert à la classe Imoca.
Cinq équipes ont participé à cette épreuve à sept étapes pour les Imoca : le victorieux 11th Hour Racing Team, mené par l’Américain Charlie Enright, suivi sur la deuxième marche du podium par Malizia (Boris Hermann) et trois équipes françaises, Biotherm (Paul Meilhat), Holcim-PRB (Kevin Escoffier puis Benjamin Schwartz) et Guyot Environnement – Team Europe (Benjamin Dutreux), dernier au classement général.
Sur cette édition 2023 de The Ocean Race, les bateaux ont couru la plus longue étape jamais disputée sur The Ocean Race : l’étape 3, entre l’Afrique du Sud et Itajaí au Brésil.
Ils ont fait un tour de l’Antarctique de plus de 30 jours, par les trois caps.
640 milles parcourus en 24 heures, un record
À l’étape suivante, entre Newport (États-Unis) et Aarhus (Danemark), Holcim-PRB a établi un nouveau record absolu de distance parcourue en 24 heures par un monocoque en équipage.
Le voilier a parcouru 640,48 milles (la distance Paris Alicante à vol d’oiseau) en 24 heures, à la vitesse moyenne de 26,78 nœuds.
Époustouflant ! Le lendemain, Malizia a amélioré de peu ce record, en parcourant 640,70 milles.
Mais ce dernier record n’a pas pu être ratifié par le World Sailing Speed Record Council (WSSRC), un mille révolu étant nécessaire pour qu’il soit pris en compte
Comme Charlie Dalin, Yoann Richomme, Damien Seguin ou Franck Cammas, la Britannique Sam Davies a participé à The Ocean Race, avec Paul Meilhat (Biotherm).
« C’était le meilleur cap Horn que j’ai jamais fait », se souvient celle qui a pris la 4e place du championnat Imoca 2023, à l’issue d’une très belle saison où elle a participé à toutes les courses.
Les nouveaux foilers victorieux
Après l’arrivée de la troisième étape de The Ocean Race à Itajaí en avril, Sam Davies est rentrée en Bretagne pour le début de la saison Imoca en France.
La Guyader Bermudes 1000 Race a inauguré la saison française en mai à Brest, avec treize duos en lice.
Après Paul Meilhat en 2018, Sébastien Simon en 2019 et Charlie Dalin en 2022, elle a été remportée par For People (plan Finot Conq-Koch), skippé par Thomas Ruyant et Morgan Lagravière.
Une performance remarquable pour ce foiler neuf sorti de chantier moins de deux mois avant le départ.
« On ne s’y attendait pas en venant à Brest! a alors commenté Thomas Ruyant après sa victoire, au terme d’un peu plus de quatre jours en mer.
On a commencé à découvrir le bateau il y a quelques jours avec Morgan. »
Thomas Ruyant et Morgan Lagravière ont formé un duo gagnant dès le début de la saison, lors de la Guyader Bermudes 1000 Race. | FRANÇOIS VAN MALLEGHEM | GUYADER BERMUDES 1000 RACE
En juillet, MACIF Santé Prévoyance (plan Verdier), un autre nouveau foiler, a remporté la Rolex Fastnet Race, avec à sa barre Charlie Dalin et Pascal Bidégorry.
En septembre, c’était au tour de Charal de s’illustrer lors du Defi Azimut – Lorient Agglomération.
Troisième sur la Route du Rhum 2022 et second sur la Guyader Bermudes 1000 Race, Jérémie Beyou a gagné avec Franck Cammas les 48 heures du Défi Azimut sur Charal 2, devant MACIF Santé Prévoyance et For The Planet.
L’exploit de Thomas Ruyant
La très attendue Transat Jacques Vabre a commencé pour les 40 Imoca au départ le 7 novembre, après neuf jours d’attente au port.
La course a été palpitante, entre les courageux partisans de la route nord, menés par Justine Mettraux et Julien Villion (Teamwork) et ceux ayant fait le choix de la prudence avec la traditionnelle route sud et ses alizés.
L’arrivée à Fort-de-France a consacré un grand marin, Thomas Ruyant, vainqueur pour la deuxième fois d’affilée de la Transat Jacques Vabre, avec son co-skipper Morgan Lagravière.
Après son triomphe en 2022 sur la Route du Rhum, Thomas Ruyant a remporté pour la troisième fois consécutive une transatlantique en Imoca.
Un exploit sans précédent pour un skipper.
À peine arrivés en Martinique, et les voilà déjà repartis, destination Lorient !
Le Retour à La Base a sonné la fin des courses en équipage et en double.
32 skippers Imoca ont participé à la première édition du Retour à La Base, dont le départ a été donné le 30 novembre à Fort-de-France.
Cette course en solitaire est l’une des cinq courses qualificatives pour le Vendée Globe 2024.
Yoann Richomme, 2e de la Transat Jacques Vabre avec Yann Eliès, a livré une magnifique performance et fini en première position, pour sa première course Imoca en solitaire.
Un résultat prometteur !
En gagnant la première édition du Retour à La Base, Yoann Richomme a confirmé sa place de favori du Vendée Globe 2024. | ANNE BEAUGÉ / RETOUR À LA BASE
J’ai rêvé de ce moment où on aurait fait les deux transats, ce moment où tu peux dire OUF.
Jérémie Beyou (Charal) est arrivé dans son sillage, deuxième. Sam Goodchild (For The Planet) a complété le podium, sur un bateau de génération 2019.
Après Mike Golding et Boris Herrmann, il est le troisième skipper non français à obtenir le titre de champion Imoca.
Encore un record battu
Avant de faire face à une série d’avaries sur le Retour à La Base, Thomas Ruyant a battu le record d’Alex Thomson de la meilleure distance parcourue en 24 heures en solitaire en Imoca, en avalant 539,94 milles, à 22,5 nœuds de moyenne.
Une belle consolation pour le skipper qui a dû terminer la course au ralenti et franchi la ligne d’arrivée en 17e position.
Atteint de la dengue quelques jours après le départ, Antoine Cornic (Human Immobilier) a tenu bon et réussi à boucler malgré tout la transatlantique retour, à une 26e place honorable.
Début décembre, il racontait dans une vidéo du bord que c’était, comme on peut l’imaginer, « assez dur. Il faudrait que je mette une autre voile devant, mais je n’y arrive pas.
Je fais un mètre et je m’arrête. Je ne peux pas prendre de risque de tomber dans les pommes. »
LA VIDÉO RÉTROSPECTIVE DE L’ANNÉE 2023 EN IMOCA :
2023 COMES TO AN END (youtube.com)
Une fin heureuse pour les retardataires du Retour à La Base
Parmi les 32 skippers au départ de la transatlantique retour, on comptait deux marins retardataires, Tanguy Le Turquais et Jean Le Cam.
Parti avec 28 heures de retard sur la flotte, Tanguy Le Turquais a remonté la moitié de la flotte et décroché une 20e place flamboyante.
Une course spectaculaire pour celui qui, au départ, espérait rattraper au maximum trois bateaux.
Malgré la fatigué, il a su chasser un à un les Imoca, et oublier que, contrairement à ses concurrents, il n’avait pas vraiment eu le temps de se reposer entre les deux courses…
Tanguy Le Turquais n’est resté que dix heures à Fort-de-France après son arrivée de la Transat Jacques Vabre.
Son retard était dû à une importante avarie à l’avant du bateau, survenue le lendemain du départ de la Transat Jacques Vabre, après une collision avec un OFNI.
Tanguy Le Turquais et son co-skipper Félix de Navacelle avaient dû mettre le cap vers Lorient pour une escale technique de six jours.
VOIR AUSSI : VIDÉO. ENTRETIEN. Tanguy Le Turquais « On a connu plusieurs moments où tout aurait pu s’arrêter »
Quant à Jean Le Cam, parti six jours après ses concurrents, il a franchi la ligne d’arrivée du Retour à La Base ce lundi 18 décembre, avec plus de 24 heures d’avance sur le temps requis pour être classé (il devait terminer dans un temps inférieur à 150 % du temps du vainqueur, ndlr).
Il était bon dernier, mais l’important n’était pas là. Il devait valider cette course pour se qualifier au Vendée Globe 2024.
C’est désormais chose faite, et Jean Le Cam est presque assuré de pouvoir prendre le départ du Vendée Globe, avec son Imoca neuf à dérives, Finistère-Armor-lux (plan Raison), mis à l’eau en octobre 2023.
VOIR AUSSI : INTERVIEW. Le Cam : « Avec ces règles de qualification, je n’aurais pas fait un seul Vendée Globe »
Le soulagement de Clarisse Crémer
Pour Clarisse Crémer, cette année 2023 se conclut finalement très bien.
Après avoir donné naissance à son premier enfant en novembre 2022, elle avait perdu son sponsor Banque Populaire en février 2023.
Elle a finalement retrouvé un partenaire en avril avec le soutien d’Alex Thomson, qui a racheté l’Imoca Banque Populaire (ex-Apivia).
Sous les couleurs de L’Occitane en Provence, elle a signé de belles performances, terminant 9e de la Transat Jacques Vabre et 12e du Retour à La Base, sa première course en solitaire depuis le Vendée Globe 2020.
À son arrivée à Lorient, elle a exprimé son soulagement : « J’ai rêvé de ce moment où on aurait fait les deux transats, que le bateau irait bien, ce moment où tu peux dire OUF, ça faisait quelques mois que je l’attendais ! ».
LE DÉBRIEF DE CLARISSE CRÉMER À L’ARRIVÉE DU RETOUR À LA BASE :
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Enfin, à 22 ans, en terminant 23e du Retour à La Base, Violette Dorange (DeVenir) est devenue la plus jeune navigatrice à avoir traversé l’Atlantique à bord d’un Imoca en solo.
À bord de l’ancien bateau de Jean Le Cam (ex-Yes We Cam !), elle devrait être la plus jeune navigatrice à prendre le départ du Vendée Globe 2024, à 23 ans passés.
Après avoir traversé la Manche en Optimist à 15 ans puis le Détroit de Gibraltar à 16 ans, Violette Dorange s’attaque maintenant au Vendée Globe. | ANNE BEAUGÉ / RETOUR À LA BASE
Sur le plan des engagements environnementaux, la classe Imoca est devenue en 2023 la première classe de course au large à voter la mise en œuvre d’un plafond d’émission de carbone dans ses activités de construction, appelé Cap Carbone.
Un tiers des Imoca ont également été équipés d’un « Hazard Button » pour la Transat Jacques Vabre.
Cet outil permet aux marins de signaler les rencontres et les collisions avec des mammifères marins.
Si collision ou rencontre il y a, ils peuvent ainsi enregistrer le lieu, la nature et le moment des collisions, afin de les limiter le plus possible.
(G.L. avec service presse / Ed Gorman, traduit de l’anglais)
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