SOCIÉTÉ  –  Par L.C. le 13-12-2019

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Dans un article publié mercredi 11 décembre sur Slate, la doctorante en neuroscience Rachel Anne Barr assure que la consommation excessive de pornographie transformerait le « câblage neuronal de notre cerveau ».

Regarder trop souvent du porno n’aurait pas que des effets bénéfiques sur notre corps, en particulier sur notre cerveau. Selon la doctorante en neuroscience à l’université de Laval, Rachel Anne Barr, la surconsommation pourrait même avoir des effets catastrophiques sur notre santé mentale et notre vie sexuelle.

Avec notamment pour conséquences graves la dépression ou des dysfonctionnements sexuels, en particulier l’incapacité à atteindre l’érection ou l’orgasme. La pornographie transformerait le « câblage neuronal » de notre cerveau. Rachel Anne Barr étudie notamment ce câblage lié au processus d’apprentissage et de mémoire.

Des liens avec la toxicomanie

« Les propriétés des vidéos pornos en font un déclencheur puissant pour la plasticité, la capacité du cerveau à changer et à s’adapter en fonction de l’expérience. Étant donné l’accessibilité et l’anonymat que permet la consommation de pornographie en ligne, cela nous rend plus vulnérables que jamais à ses effets hyper-stimulants », assure l’experte dans son article publié sur The Conversation puis sur Slate.

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Des scientifiques ont déjà étudié ces effets et ont établi un parallèle entre la consommation de contenu pornographique et la toxicomanie. Comme l’indique la scientifique, le cerveau est programmé pour répondre à la stimulation sexuelle par une poussée de dopamine. « Ce neurotransmetteur, le plus souvent associé à l’anticipation de la récompense, sert aussi à inscrire les souvenirs et l’information dans le cerveau. Ainsi, lorsque le corps a besoin de quelque chose, comme de la nourriture ou du sexe, le cerveau se rappelle où il peut aller pour retrouver le même plaisir », indique Rachel Anne Barr.

Ainsi, en cas de désir, les consommateurs de pornographie se tourneraient presque mécaniquement vers ce type de contenu et pas forcément vers des sources naturelles de plaisir. « Des explosions anormalement fortes de récompense et de plaisir provoquent une accoutumance exceptionnellement forte du cerveau », assure l’experte.

Une analyse que partage le psychiatre Norman Doidge : « La pornographie satisfait à toutes les conditions préalables au changement neuroplastique. » Les scènes pornographiques, « déclencheurs hyper-stimulants », provoqueraient en effet des niveaux extrêmement élevés de sécrétion de dopamine.

Dépression et anxiété

Cette habitude provoquerait même l’apparition de dysfonctionnements sexuelles. Pire, elle entraînerait la dépression et l’anxiété. Selon une étude publiée dans le Journal of Sexuel Medecine, les personnes qui consomment du porno signalent des symptômes dépressifs plus forts, une moins bonne santé mentale et une moins bonne qualité de vie que celles qui ne regardent pas de contenus pornographiques.

Découverte stupéfiante : certains d’entre eux déclarent même avoir de plus en plus besoin de porno, alors qu’ils n’apprécient pas réellement les contenus. Une observation également faite par l’institut Max Planck de Berlin (Allemagne), où les experts ont constaté que l’utilisation accrue du porno était corrélée à une activité cérébrale réduite en réponse à des images pornographiques classiques. Selon Rachel Anne Barr, cela pourrait expliquer le fait que les consommateurs de porno se dirigent souvent vers des formes de plus en plus extrêmes de contenu, comme l’inceste ou la violence.

Cette violence risquerait ensuite de se répercuter dans la vie réelle. En effet, les taux d’incidents réels peuvent augmenter en conséquence, assure l’experte qui s’appuie sur une étude de février 2016. Selon Rachel Anne Barr, des scientifiques attribuent cet effet à l’action des neurones miroirs. Des cellules cérébrales qui réagissent lorsque l’individu fait une action, mais aussi lorsque la même action est accomplie par quelqu’un d’autre.

« Le mécanisme miroir dans le cerveau suggère également que nous sommes automatiquement influencés par ce que nous observons, proposant ainsi un mécanisme neurobiologique plausible pour la contagion du comportement violent », indique Marco Iacoboni, professeur de psychiatrie à l’Université de Californie (États-Unis).

Si une surconsommation de porno ne pousse pas nécessairement aux actes violents, Rachel Anne Barr pense qu’elle modifie tout de même le comportement du spectateur.

Autre observation : le visionnage de porno a été corrélé à l’érosion du cortex préfrontal, « une région du cerveau qui abrite des fonctions exécutives comme la moralité, la volonté, le contrôle des impulsions » et qui est sous-développée durant l’enfance.

D’après l’auteure de l’article, les lésions de ce cortex à l’âge adulte, appelées hypofrontalité, « prédisposent l’individu à agir de façon compulsive et à prendre des mauvaises décisions ». Comme les enfants…

[avec The Conversation et Slate]

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