Publié le 25/10/2019
L’hypertriglycéridémie est de mauvais aloi, surtout quand elle atteint des sommets en cas de diabète mal contrôlé ou d’alcoolisme. Dans la hiérarchie du risque cardiovasculaire en matière de lipides, le LDL-cholestérol (LDL-C) occupe indéniablement la première place. Néanmoins, plusieurs études épidémiologiques jointes à des considérations cliniques et physiopathologiques tendent de plus en plus à considérer les trigycérides (TG) comme des ennemis potentiels de la paroi artérielle.
Les recommandations restent imprécises sur l’attitude à adopter, en dehors des correctifs nutritionnels. Il est vrai que les hypolipémiants disponibles n’ont qu’un effet modeste, même si réel, sur la triglycéridémie. Les essais randomisés consacrés au traitement des dyslipidémies se sont focalisés sur l’hypercholestérolémie, surtout le LDL-C considéré comme ennemi public numéro un chez les patients à risque, mais leur analyse fouillée révèle que, dans la plupart d’entre eux, les variations des taux de TG ont été prises en compte. De la sorte, il est possible avec des méta-analyses et des méta-régressions de faire un peu de lumière sur leur rôle en matière de risque cardiovasculaire.
Précisément, une revue systématique des essais et une analyse par méta-régression ont porté sur trois classes d’hypolipémiants, censés réduire davantage les taux de TG que ceux de LDL-C : les fibrates, la niacine et les acides oméga-3 d’origine marine. Pour être inclus, les essais devaient être nécessairement randomisés et faire état de la survenue d’évènements cardiovasculaires majeurs dans leurs objectifs. Par ailleurs, ont été également incorporées des données provenant de 25 essais contrôlés consacrés à l’évaluation des statines.
L’objectif principal de cette approche synthétique était l’estimation du risque d’événement cardiovasculaire majeur (ECVM) associé à la réduction des principaux paramètres lipidiques, sous la forme d’un risk ratio (RR), classe par classe. Au total, l’analyse a porté sur 197 270 participants issus de 24 essais portant sur d’autres médicaments que les statines, totalisant 25 218 ECVM et 177 088 participants issus de 25 essais portant sur les statines, totalisant 20 962 ECVM. En tout, 374 358 patients et 46 180 major ECVM.
Des mesures diététiques appropriées
La réduction du non-HDL-C – qui est un marqueur du VLD-C et du LDL-C- d’une mmol /l a été associée à une diminution du risque d’ECVM, le RR correspondant étant en effet de 0,79 (intervalle de confiance à 95 % IC 95 %, 0,76-0,82; p < 0,0001; 0,78 pour 40 mg/dl).
Une analyse multivariée par méta-régression a établi qu’une réduction des taux de LDL-C d’1 mmol /l était associée à un RR de 0,80 (IC 95 % 0,76-0,85; p < 0,0001 ; 0,79 pour 40 mg/dl). Pour la réduction des taux de TG d’1 mmol//l, la valeur du RR est de 0,84 (IC 95 %, 0,75-0,94 ; p = 0,0026 ; 0,92 pour 40 mg/dl). Après exclusion de l’étude REDUCE-IT (Reduction of Cardiovascular Events With Icosapent Ethyl-Intervention Trial) dont les résultats étaient par trop discordants, les RRs précédents ont été modifiés, les valeurs obtenues étant en effet respectivement de 0,79 (IC 95 %, 0,76-0,83 ; p < 0,0001 ; 0,78 pour 40 mg/dl) et de 0,91 (IC 95 %, 0,81-1,006 ; p = 0,06 ; 0,96 pour 40 mg/dl).
Chaque gramme d’acide eicosapentaénoïque administré par jour a été associé à une diminution de 7 % du risque d’ECVM, le RR étant en effet de 0,93 [IC 95%, 0,91-0,95]; p<0,0001). En revanche, aucune association de ce type n’a été établie dans le cas de l’acide docosahexaénoique, le RR étant de 0,96 [IC 95%, 0,89-1.03] ; NS).
De cette analyse colossale par méta-régression portant sur plus de 374 000 patients inclus dans 49 essais randomisés, il ressort que la réduction des taux de TG conduit à une diminution du risque d’ECVM, même après ajustement prenant en compte la baisse du LDL-C. L’effet est certes moindre que celui obtenu après réduction des taux de LDL-C et s’atténue significativement quand l’essai REDUCE-IT, consacré aux acides oméga-3, est exclu de l’analyse.
Le bénéfice cardiovasculaire de ces derniers, notamment quand il s’agit de l’acide eicosapentaénoïque administré à des doses élevées, semble par ailleurs relever d’autres mécanismes que le seul effet hypolipémiant.
Quoi qu’il en soit, l’hypertriglycéridémie mérite la plus grande attention et appelle des mesures diététiques appropriées – à défaut d’une pharmacothérapie efficace- pour réduire son potentiel athérogène qui s’ajoute souvent à celui du LDL-C.
Dr Catherine Watkins
RÉFÉRENCE : Marston NA et coll. : Association Between Triglyceride Lowering and Reduction of Cardiovascular Risk Across Multiple Lipid-Lowering Therapeutic Classes: A Systematic Review and Meta-Regression Analysis of Randomized Controlled Trials. Circulation. 2019 ; 140(16): 1308-1317. doi: 10.1161/CIRCULATIONAHA.119.041998.
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