Publié le 14/09/2020

Une perte de poids inexpliquée inquiète patient et médecin. A juste titre, puisque, en médecine générale, la probabilité d’un diagnostic de cancer augmente dans les 3 à 6 mois après la première constatation d’une perte de poids inexpliquée.

Toutefois, le caractère non spécifique de ce symptôme crée une situation difficile, où le praticien doit décider s’il est indiqué ou non de lancer des investigations, parfois invasives, à la recherche d’un éventuel cancer. En l’absence de recommandations adaptées à la pratique, ou standardisées, les praticiens reconnaissent avoir des attitudes diverses, de l’abstention totale à l’investigation complète à l’aveugle.

Un diagnostic de cancer dans 1,4 % des cas en l’absence d’autre anomalie clinique ou biologique

Mais quelle est réellement la valeur prédictive, pour le diagnostic de cancer, d’une perte de poids inexpliquée ? Pour le savoir, une équipe du Royaume Uni a mené une étude incluant près de 64 000 adultes. La valeur prédictive était déterminée en fonction de l’âge du patient, de l’existence d’un tabagisme, et de la présence de signes cliniques ou de résultats sanguins anormaux associés.

Dans les 6 mois suivant la première consultation pour perte de poids inexpliquée, un diagnostic de cancer est posé chez 1,4 % de ces patients, quand aucun autre signe clinique ou biologique n’est associé. Cette valeur est inférieure au seuil de 3 %, estimé par le National Institute for Health and Care Excellence comme justifiant de mettre en route des investigations urgentes.

Ces données suggèrent ainsi qu’une perte de poids totalement isolée, chez un patient non fumeur, a peu de risque d’être associée à un cancer et ne justifie pas des investigations invasives. En revanche, une prise en charge spécialisée est justifiée pour les hommes, fumeurs et âgés de 50 ans ou plus, même en l’absence de signes cliniques associés.

Rassuré mais pas tout à fait tranquille

Certains signes cliniques ou certaines anomalies du bilan sanguin, présents dans la période allant de 3 mois avant le constat de la perte de poids et 1 mois après, nécessitent des examens plus poussés à la recherche d’un cancer. Les auteurs en dressent la liste.

Chez les femmes et les hommes, il s’agit de la présence d’une masse ou de douleur abdominales, de perte de l’appétit, d’une symptomatologie thoracique, d’une anémie ferriprive, d’un ictère et d’adénopathies. Il faut y ajouter, chez les hommes, une dysphagie, une hémoptysie et des douleurs thoraciques non cardiaques, et chez les femmes des dorsalgies, des troubles du transit, une dyspepsie ou un accident thromboembolique veineux.

Quant aux résultats sanguins qui doivent attirer l’attention, il s’agit d’une hypoalbuminémie, d’une élévation des leucocytes, du calcium, des plaquettes et des marqueurs inflammatoires.

Les auteurs ajoutent toutefois que la normalité de l’examen clinique et du bilan sanguin, s’ils rassurent le patient, ne doivent pas tranquilliser totalement le praticien, le risque de cancer en cas de perte de poids inexpliquée n’étant jamais inférieur à 0,2 %.

Dr Roseline Péluchon

RÉFÉRENCES: Nicholson BD et coll. : Prioritising primary care patients with unexpected weight loss for cancer investigation: diagnostic accuracy study.
BMJ2020;370:m2651

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