http://www.jim.fr/e-docs/00/02/B0/8A/carac_photo_1.jpg cid:image002.png@01D4CB5D.AB432B50 Publié le 20/02/2019

Influence des perturbateurs endocriniens contenus dans les produits d’hygiène et les cosmétiques sur le développement pubertaire des filles et des garçons.

Depuis quelques dizaines d’années, la puberté des filles, et vraisemblablement des garçons, débute de plus en plus précocement. De nombreux facteurs peuvent être à l’origine de ce phénomène, et parmi eux l’exposition aux perturbateurs endocriniens.

Rôle possible des phtalates, des parabènes et des phénols contenus dans les produits d’hygiène et les cosmétiques

Des études chez l’animal ont montré que certains de ces composés chimiques, contenus dans les produits d’hygiène, tels que des phtalates, parabènes et phénols, sont associés à des modifications du développement pubertaire.

– Les phtalates de bas poids moléculaire : le di-éthyle phtalate (DEP) utilisé comme parfum dans les shampoings, savons et déodorants, le di-n-butyle phtalate (DnBP) et le di-isobutyle phtalate(DiBP) utilisé dans les vernis à ongle ont des effets anti-androgéniques chez l’animal, et provoquent des retards pubertaires chez le rat mâle.
– Les parabènes : le méthylparabène et le propylparabène, utilisés comme conservateurs dans les produits cosmétiques, ont montré une faible activité œstrogénique et modifient le timing de la puberté chez le rat femelle.
– Les phénols : le triclosan, antibactérien, a montré dans les études chez l’animal une activité œstrogénique, et peut perturber les sécrétions de FSH, LH et de la testostérone ainsi que le timing pubertaire chez le rat femelle. La benzophénone-3 (oxybenzone), filtre ultra-violet, a aussi une activité œstrogénique faible in vitro et dans les études animales.

L’exposition à ces perturbateurs endocriniens est largement répandue puisque plus de 96 % des femmes participant à la National Health and Nutrition Examination Survey(NHANES) ont des taux détectables de DEP, DnBP, ou de DiBP, dans leurs urines. D’autres études montrent que 90 % des femmes ont du méthylparabène et du propylparabène dans leurs urines, 75 % du triclosan, et 97 % de la benzophénone-3.

Une étude menée, dès 1999, par le Center for Environmental Research and Children’s Health (CERCH) de l’université de Berkeley (Californie) s’est penchée sur les corrélations éventuelles entre les concentrations urinaires de ces différents perturbateurs endocriniens ou de leur métabolites, chez les mères pendant la grossesse, ou chez les enfants à l’âge de 9 ans, et le développement pubertaire des garçons et des filles.

Au total 338 enfants, 159 garçons et 179 filles, ont été examinés tous les 9 mois entre 9 et 13 ans, le stade pubertaire a été établi selon la classification de Tanner et l’âge des premières règles (ménarche) a été noté chez les filles.

En accord avec les données du groupe ethnique auquel appartient la population étudiée (latino-américaine), chez les filles, l’âge médian de la thélarche était de 9,2 ans, de la pubarche 10,3 ans et de la ménarche 11,7 ans ; chez les garçons, l’âge médian de la gonarche était de 10,8 ans et de la pubarche 12,2 ans.

Les filles davantage concernées

La mesure des taux urinaires des perturbateurs endocriniens chez la mère et l’observation du déroulement de la puberté chez les filles montre que chaque doublement du taux de MEP (mono-éthyl phtalate, métabolite du DEP) est associé à une avancée de l’âge de la pubarche de 1,3 mois (intervalle de confiance à 95 % [IC] : – 2,5 à -0,1) et que chaque doublement du taux du triclosan est associé avec une avancée de la ménarche de 0,7 mois (IC : -1,2 à -0,2).

La mesure des taux urinaires des perturbateurs endocriniens chez les filles à 9 ans et l’observation du déroulement de leur puberté montre que chaque doublement du taux de méthylparabène est associé à une avancée de l’âge la thélarche de 1,1 mois (IC : -2,1 à – 0,0), de la pubarche de 1,5 mois (IC : -2,5 à – 0,4), et de la ménarche de 0,9 mois (IC : -1,6 à -0,1), alors qu’un doublement du taux du 2,5-dichlorophénol retarde la pubarche de 1,0 mois (IC : 0,1 à 1,9).

On ne retrouve pas de modification du timing de la puberté des garçons en relation avec les taux des perturbateurs endocriniens urinaires maternels, mais chaque doublement du taux urinaire de propylparabène en période pré-pubertaire s’accompagne d’une avancée de la gonarche de 1,0 mois (IC : -1,8 to – 0,1).

Ces données apportent des éléments supplémentaires aux travaux suspectant les perturbateurs endocriniens de modifier le timing de la puberté.

Dr Catherine Vicariot

RÉFÉRENCE: Harley KG, Berger KP et coll. : Association of phthalates, parabens and phenols found in personal care products with pubertal timing in girls and boys. Human Reproduction, 2019 ; 34 : 109–117,

Copyright © http://www.jim.fr