Medscape Logo Samedi 22 mai 2021

Actualités & Opinions > Actualités Medscape > ACC 2021 – Marlene Busko – AUTEURS ET DÉCLARATIONS  – 21 mai 2021

Dr Mariana Garcia

Virtuel — Parmi les patients jeunes ou d’âge mur qui ont survécu à un infarctus du myocarde (IDM), ceux qui sont en souffrance psychologique ont deux fois plus de risque de faire un événement cardiovasculaire (CV) sévère dans les 5 ans, selon une étude présentée lors du congrès de l’American College of Cardiology 2021[1].

Et ce, même après ajustement pour les comorbidités et les données sociodémographiques.

Dans ce travail mené par le Dr Mariana Garcia (cardiologie, Université Emory, Etats-Unis), la détresse psychologique importante était définie par un score s’appuyant sur les réponses à un questionnaire évaluant la dépression, l’anxiété, la colère, le stress ressenti et le syndrome de stress post-traumatique.

Lorsqu’ils étaient soumis à un test de stress, les individus avec une forte détresse psychologique avaient aussi des taux sanguins plus élevés pour deux marqueurs de l’inflammation, l’interleukine 6 et la cytokine de type chimiokine monocyte chemoattractant protein-1 (MCP-1), ce qui suggère que l’inflammation liée au stress est impliquée dans l’augmentation du risque d’événements CV sévères.

Au vu de ces résultats, les cardiologues « devraient réaliser l’importance de l’évaluation psychologique après un infarctus du myocarde, et ce en particulier chez les patients les plus jeunes », a indiqué le Dr Garcia à theheart.org | Medscape Cardiology lors d’un entretien.

Ils devraient également explorer les modalités de traitement pour limiter la détresse psychologique : médicaments, techniques de relaxation ou autres approches holistiques, en plus du traitement classique et de la réadaptation cardiaque après IDM.

Enfin, il est important de suivre « les recommandations de prévention secondaire », a-t-elle ajouté, car il est possible que les médicaments anti-inflammatoires comme l’aspirine et les statines « protègent contre les effets du stress dans la vie quotidienne ».

Un risque plus que doublé

On sait peu de choses sur la détresse psychologique et le risque de nouveaux événements cardiovasculaires chez les patients jeunes qui ont eu un infarctus du myocarde récent, a souligné le Dr Garcia.

Pour en savoir plus, les chercheurs ont donc sélectionné pour l’étude 283 adultes dans la cohorte de patients MIMS2 (Myocardial Infarction and Mental Stress-2) des centres associés à l’Université Emory. Ils étaient âgés de 18 à 61 ans et avaient eu un infarctus du myocarde au cours des 8 mois précédents.

Ces survivants à un IDM avaient en moyenne 51 ans, la moitié étaient des femmes et 64% étaient afro-américains.

Le Dr Garcia et coll. ont réparti les patients en tertiles correspondant à une détresse psychologique légère (n = 93), modérée (93) ou élevée (97), sur la base de leurs scores composites de détresse psychologique, déterminés par la méthode utilisée par Blumenthal et coll.

Comparativement aux patients souffrant de détresse psychologique légère, ceux qui souffraient d’une détresse psychologique élevée étaient plus souvent d’origine afro-américaine, de sexe féminin et défavorisés (faible niveau d’éducation, faible revenu, sans emploi). Ils étaient également plus susceptibles de souffrir de diabète, d’hypertension ou d’antécédents de tabagisme.

Quatre-vingts personnes ont été victimes d’un événement CV majeur; 37% dans le groupe « détresse psychologique élevée » et 17% dans le groupe « détresse psychologique légère ».

Les participants ayant une détresse psychologique élevée avaient un risque 2,7 fois plus important d’être victimes d’un événement CV sévère pendant le suivi vs ceux du groupe ayant une détresse psychologique légère.

Aussi, après ajustement en fonction de l’âge, du sexe, de l’origine et du niveau d’éducation, les personnes du groupe ayant une détresse psychologique élevée présentaient un risque toujours 2,5 fois plus élevé.

Cependant, le risque était plus limité après un ajustement supplémentaire sur l’indice de masse corporelle, le tabagisme, l’hypertension, le diabète, la dyslipidémie et les médicaments (HR, 1,9; IC à 95%, 1,0 – 3,8), et il n’était plus significatif après un ajustement supplémentaire pour les taux d’IL- 6 et de MCP-1 (HR, 1,5; IC à 95%, 0,7 – 3,3).

Évaluation de la santé mentale après IDM

« L’étude souligne l’importance d’évaluer la santé mentale et le bien-être mental des survivants à un IDM », a renchéri le Pr Salim S. Virani, président sortant du département de prévention des maladies cardiovasculaires de l’ACC, qui n’a pas participé à cette recherche (cardiologie et recherche cardiovasculaire, Baylor College of Medicine, Etats-Unis).

L’étude souligne l’importance d’évaluer la santé mentale et le bien-être mental des survivants à un IDM. Pr Salim S. Virani

« Les résultats sont importants et soulignent la nécessité de travailler à la fois sur le processus de la maladie athéroscléreuse et sur le bien-être mental de tous les survivants à un IdM », précise-t-il.

L’étude met également en évidence plusieurs groupes de patients présentant des niveaux élevés de détresse psychologique après un IDM – dont les femmes, les patients noirs et les patients issus de milieux socio-économiques défavorisés – qui peuvent avoir besoin de solutions adaptées à leurs besoins tout en recevant des soins de longue durée après un IDM.

Aussi, « le stress psychologique peut empêcher « de suivre un mode de vie sain pour le cœur et d’obtenir une bonne observance thérapeutique, un problème particulièrement important chez les jeunes patients comme l’ont montré plusieurs études auparavant. »

Concernant les limites de l’étude, les chercheurs notent qu’il n’y avait pas de groupe témoin de patients plus âgés, de sorte que ces résultats ne sont applicables qu’aux survivants à un IDM jeunes et d’âge moyen.

Aussi, des analyses complémentaires et de plus larges études seront nécessaires pour mieux comprendre l’association entre la détresse psychologique et les récidives d’événements cardiovasculaires.

En attendant que d’autres résultats soient disponibles, « évaluer la présence d’une détresse psychologique chez tous les survivants à un IDM (jeunes ou plus âgés) est une bonne pratique », recommande toutefois le Pr Virani.

Plus globalement, s’intéresser à la prévention des événements CV sévères chez les survivants à un IDM est essentiel.

« Encourager les patients en post-IDM à participer à des programmes complets de réadaptation cardiaque est particulièrement important, car il a été montré que cela améliore les performances cardiovasculaires chez les patients en post-IDM mais aussi le bien-être physique et mental ».

Encourager les patients en post-IDM à participer à des programmes complets de réadaptation cardiaque est particulièrement important. Pr Salim S. Virani

Le Dr Garcia et le Pr Virani n’ont pas de liens d’intérêt en rapport avec le sujet.

Le texte Cardiac Events Doubled Among Distressed Younger Survivors of MI a été initialement publié sur Medscape.com. Traduit par Aude Lecrubier.

LIENS

Références

  1. American College of Cardiology (ACC) 2021 Annual Scientific Session: Session 1021-05. Présenté le 16 mai 2021.

Actualités Medscape © 2021 WebMD, LLC

Citer cet article: Post-IDM : deux fois plus d’événements CV à 5 ans chez les personnes souffrant d’une détresse psychologique – Medscape – 21 mai 2021.