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Vincent Richeux  – AUTEURS ET DÉCLARATIONS  17 février 2023

Plongée sous-marine : focus sur les contre-indications cardiologiques (medscape.com)

Paris, France — La plongée sous-marine peut-elle être pratiquée en cas d’hypertension artérielle, après une coronaropathie ou en présence d’une arythmie ?

Au cours des Journées Européennes de la Société Française de Cardiologie (JESFC 2023), le Dr Marc Bedossa (CHU de Rennes) est revenu sur les contre-indications cardiologiques à la pratique de cette activité [1].

Le cas particulier du foramen ovale perméable (FOP) a également été évoqué.

Alors que la tâche était auparavant réservée aux médecins ayant suivi une formation spécifique, « tout médecin peut désormais délivrer un certificat médical de non-contre-indication à la plongée sous-marine », sauf dans certaines situations, après un accident de plongée notamment, a rappelé le Dr Bedossa.

« Un certain nombre de praticiens estiment toutefois ne pas avoir la compétence », a-t-il ajouté.

Ce changement, qui est intervenu en 2014, a été voulu par la Fédération française d’études et de sports sous-marins (FFESSM) pour faciliter l’accès à cette activité.

Pour aider les médecins, la fédération met à disposition sur son site internet les documents nécessaires, comme le modèle de certificat médicalla liste des contre-indications, ainsi que les diverses recommandations émises par sa commission médicale.

« Tout médecin peut désormais délivrer un certificat médical de non-contre-indication à la plongée sous-marine. »

350 accidents de plongée par an

Selon les données de la FFESSM, on compte 300 000 plongeurs en activité en France, avec une moyenne d’âge de 42 ans.

Près de 20% d’entre eux ont plus de 60 ans. Or, les plongeurs avançant dans l’âge, même expérimentés, sont plus exposés au risque d’accident de plongée en raison des contraintes environnementales.

Chaque année, on recense 350 accidents de plongée, soit un accident pour 10 000 plongées environ.

Ils surviennent dans 70% des cas sur la côte méditerranéenne principalement l’été et sont à l’origine de 5 à 10 décès par an.

HTA : possible dans certaines conditions

Selon ces recommandations, l’hypertension artérielle (HTA) fait partie des contre-indications temporaires à la plongée.

L’activité est d’autant plus à risque que le patient est symptomatique ou qu’il présente des facteurs de risque supplémentaires (âge> 55 ans, tabagisme, diabète, dyslipidémie…).

« Le risque avec une hypertension artérielle est de développer un œdème pulmonaire d’immersion », précise le Dr Bedossa, également membre de la commission médicale et de prévention de la fédération.

La survenue de ce type d’œdème, qui touche principalement les plus de 50 ans et hypertendus, semble liée à l’effort physique, au froid et aux efforts inspiratoires.

En ce qui concerne les particularités du traitement de l’HTA chez des patients souhaitant pratiquer la plongée sous-marine, il est recommandé d’éviter les diurétiques qui « favorisent les hypovolémies et les accidents de saturation ».

La contre-indication est levée lorsque la HTA est contrôlée et stabilisée par les anti-hypertenseurs sous une tension artérielle < 140/90 mm Hg et ce, « tant que le patient prend bien son traitement » et qu’il s’assure que sa tension est bien équilibrée.

En cas d’HTA légère (140 à 160/ 90 à 100 mmHg), la plongée peut être pratiquée, mais en évitant de plonger en eau froide et sans dépasser les 30 mètres de profondeur pour réduire le réduire le risque vasculaire.

En revanche, la contre-indication temporaire est maintenue lorsque la HTA reste modérée à sévère (> 160/100 mmHg).

« Un suivi médical régulier » est à mettre en place chez les plongeurs hypertendus, conseille la commission.

« Des maux de tête inhabituels, un essoufflement, un malaise ou une douleur à la poitrine » survenant pendant la plongée sont des symptômes qui doivent conduire le plongeur à stopper la plongée, voire à demander de l’aide.

Coronaropathies : soumis au test d’effort régulier

Chez les patients atteints de coronaropathie, la plongée sous-marine est contre-indiquée en cas d’athérosclérose diffuse (atteinte tritronculaire ou du tronc coronaire gauche, même revascularisée), de spasme coronaire ou d’atteinte de la fonction cardiaque (FEVG <50%), indique la commission, qui a émis des recommandations spécifiques pour cette population [2].

« Étant donné leurs risques évolutifs difficilement prévisibles, les atteintes tritronculaires et du tronc coronaire gauche doivent faire contre-indiquer la plongée sous-marine, même chez un sujet revascularisé et asymptomatique », précise-t-elle.

« Les atteintes tritronculaires et du tronc coronaire gauche doivent faire contre-indiquer la plongée sous-marine, même chez un sujet revascularisé et asymptomatique. »

En dehors de ces conditions, la pratique de cette activité « peut se discuter » après un délai de six mois minimum à compter du dernier événement coronarien clinique (épisode aigu) ou de la revascularisation.

« Pendant cette période, le sujet doit être resté totalement asymptomatique sans nécessité d’un traitement par dérivés nitrés ».

Pour valider l’activité, « un test d’effort, sans ischémie, ni arythmie, doit démontrer que le sujet pratique un entraînement sportif régulier ».

Le patient doit ensuite bénéficier d’un suivi cardiologique régulier.

La réalisation d’au moins un test d’effort par an est recommandé, ainsi qu’une actualisation régulière des traitements.

Par ailleurs, les facteurs de risque modifiables doivent être contrôlés. L’arrêt du tabac est notamment fondamental, a rappelé le Dr Bedossa.

« Même s’il est asymptomatique, un coronarien présentant un risque cardio-vasculaire élevé ne doit pas plonger », l’activité étant « très contraignante pour le système cardio-vasculaire ».

Troubles du rythme : déconseillé en cas d’atteinte ventriculaire

S’agissant des arythmies, « la contre-indication est absolue en cas de tachycardie jonctionnelle » non traitée. Après ablation, la pratique de la plongée peut être envisagée après un délai de trois mois « sans récidive », précise la commission dans un autre document[3].

En revanche, en cas de fibrillation auriculaire (FA), la contre-indication n’est pas systématique.

Selon le cardiologue, « tout dépend de la tolérance [à l’effort] et surtout de la qualité du muscle cardiaque ».

Lorsque le trouble du rythme est ventriculaire, la plongée est déconseillée, « sauf en cas de petites extrasystoles bénignes ».

Chez les patients porteurs d’un pacemaker, il ne s’agit pas d’une contre-indication, tant que la plongée ne dépasse pas 30 mètres de profondeur, le bon fonctionnement de l’appareil n’étant plus garanti par les fabricants au-delà de cette limite.

En revanche, l’activité est contre-indiquée chez les porteurs de défibrillateurs.

En général, « il faut éviter les attitudes trop intransigeantes, mais la prudence doit rester de mise, avant une décision de non-contre-indication aux activités subaquatiques », estime la commission. Un recul suffisant de six mois minimum est nécessaire « pour juger de la stabilité du rythme ».

« Il faut éviter les attitudes trop intransigeantes, mais la prudence doit rester de mise, avant une décision de non-contre-indication aux activités subaquatiques. »

La fermeture du FOP à envisager

Enfin, le Dr Bedossa a évoqué la question du foramen ovale perméable (FOP), une malformation fréquente qui augmente nettement le risque d’accident de décompression.

Le FOP se caractérise par la persistance d’un orifice dans la cloison séparant les deux oreillettes. Le risque serait deux à cinq fois plus élevé selon la taille de l’orifice et le type de shunt.

On estime qu’un quart de la population présente cette anomalie.

Pour autant, le dépistage systématique n’est pas recommandé. La recherche d’un FOP est à considérer uniquement en cas d’accident de décompression avec atteinte neurologique ou cutanée, a précisé le cardiologue.

La découverte d’un FOP n’est plus une contre-indication définitive à la plongée.

Cependant « l’activité doit être limitée le plus possible ».

« Si ce n’est pas possible, on peut envisager la fermeture du FOP », avec une approche chirurgicale. La procédure est remboursée uniquement pour les plongeurs professionnels.

Après fermeture du FOP, le plongeur doit patienter au minimum trois mois avant de reprendre son activité.

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Références

  1. Bedossa M, Cardiologie du sport et environnements extrêmes: plongée et maladies cardiovasculaires, JESFC2023, Présentation du 13 janvier 2021, Paris, France.
  2. Brouant B, Finit G, Krafft R, conditions particulières de pratique de la plongé sous-marine de loisir pour les patients atteints de coronaropathie, Groupe de travail « coronaropathies et plongée » de la Commission Médicale et de Prévention de la FFESSM, oct 2007.
  3. Brouant B, Houriez P, Lafay V, Pratique de la plongée et des sports subaquatiques par les patients présentant des troubles de la conduction ou du rythme cardiaque : Recommandations pour la FFESSM, Groupe de travail « Arythmie et plongée » de la Commission Médicale et de Prévention de la FFESSM; jan 2009.

Crédit de Une : Dreamstime – Actualités Medscape © 2023

Citer cet article: Plongée sous-marine : focus sur les contre-indications cardiologiques – Medscape – 17 févr 2023.