Le Quotidien du MédecinDamien Coulomb | 18.04.2019

La lutte contre les contre-vérités sur les vaccins vient de connaître un épisode inédit en Angleterre. La plate-forme de crowdfunding GoFundMe a bloqué une cagnotte visant à financer les travaux du chercheur anti-vax Chris Exley, selon le quotidien britannique « The Time ».

En mars 2018, ce professeur de chimie de l’université de Keele avait publié, dans le « Journal of Trace Elements in Medicine and Biology », les résultats de l’analyse de 10 prélèvements de tissus cérébraux provenant de 5 donneurs décédés atteints d’autismes. Il y constatait des taux d’aluminium « parmi les plus élevés jamais enregistrés », un élément, selon lui, en faveur du rôle de l’aluminium dans le développement de l’autisme, établissant un lien entre la vaccination pédiatrique (l’aluminium viendrait de là) et l’augmentation de la prévalence de cette maladie.

L’étude ne comportant aucun groupe contrôle et reposant sur peu de données, elle a été aussitôt dénoncée par ses pairs qui ont mis en évidence un « conflit d’intérêts total » : Pr Exley avait perçu des fonds de l’institut de recherche sur la sécurité médicale des enfants, un organisme connu pour ses positions anti-vax.

Une filiation avec une étude frauduleuse

Cette étude a en outre une filiation avec la fraude d’Andrew Wakefield. En 1998, ce gastro-entérologue britannique a inventé le lien vaccin ROR-autisme, monté une étude truquée de toutes pièces et l’a popularisée tant est si bien que, malgré la rétractation de ses travaux, le taux de vaccination contre la rougeole au Royaume-Uni a considérablement chuté.

Pas question donc de laisser la chose se reproduire. « Comparé à la frayeur qu’a représentée l’étude frauduleuse d’Andrew Wakefield, il s’agit d’un cas similaire, mais avec encore moins de données », a déclaré le Pr Akbar, président de la société britannique d’immunologie. La campagne de financement participatif des travaux du Pr Exley a été lancée sur GoFundMe par des supporters du scientifique, suite à l’échec d’une demande de bourse publique.

Source : Lequotidiendumedecin.fr

================================================================

« L’obligation vaccinale profite à tous les vaccins », se réjouit Agnès Buzyn

Charlène Catalifaud | 18.04.2019

buzyn vaccinLe Quotidien du Médecin

Crédit Photo : S. ToubonZoom

En amont de la Semaine européenne de la vaccination qui va se dérouler du 24 au 30 avril, Agnès Buzyn a présenté un premier bilan positif de l’obligation vaccinale.

« Les mesures d’extension de l’obligation vaccinale chez les nourrissons et de simplification du parcours pour la vaccination antigrippale ont redynamisé la politique vaccinale française », se félicite la ministre.

Réduction des méningites de l’enfant

Santé publique France a comparé les couvertures vaccinales de janvier à mai 2018 à celles de janvier à mai de 2017. Ce premier bilan confirme les premières tendances que nous présentions en décembre, à savoir une amélioration de la couverture vaccinale, même chez les enfants non concernés par l’obligation.

Concernant le vaccin hexavalent (diphtérie, tétanos, poliomyélite, coqueluche, hépatite B et haemophilus influenzae de type b), la couverture est passée de 93,1 à 98,6 % (+ 5,5 points).

Pour la première dose du vaccin contre le méningocoque C, la couverture est passée de 39,3 à 75,7 % (+ 36,4 points). « Les cas de méningite chez les enfants de moins de 1 an sont passés de 17 à 4 cas entre 2017 et 2018. C’est un très beau résultat », salue François Bourdillon, directeur général de Santé publique France.

La couverture vaccinale de la première dose du vaccin contre le pneumocoque atteint 99,4 % en 2018 contre 98 % 1 an plus tôt (+1,4 point).

« À chaque point de couverture vaccinale, ce sont autant de drames évités dans les familles », commente Agnès Buzyn.

Une légère hausse du taux de vaccination HPV

Les données ne sont pas encore disponibles pour le vaccin ROR (rougeole, oreillons et rubéole), car la première dose est à administrer à 1 an. Néanmoins, les enfants ayant eu 1 an en 2018 et donc non concernés par l’obligation ont été davantage vaccinés que ceux ayant eu 1 an l’année précédente : la couverture pour la première dose est passée de 87,2 à 85 %.

« Cela montre que la confiance dans la vaccination revient au-delà même de l’obligation vaccinale. Le mouvement opéré avec la réforme de l’obligation vaccinale profite à la vaccination au sens large », souligne la ministre.

De manière moins prononcée, la vaccination contre le papillomavirus (non obligatoire) a également bénéficié de ce regain de confiance. Le taux de vaccination (première dose) des jeunes filles de 15 ans est de 29,4 % en 2018 contre 26,2 % en 2017 (+ 3,2 points). Une progression encore bien insuffisante.

Un état des lieux de la sécurité des vaccins

Selon Santé publique France, deux tiers des parents et trois quarts des médecins généralistes sont aujourd’hui favorables à l’extension de l’obligation vaccinale. « Des parents craignent encore les effets indésirables des vaccins, mais les risques de la non-vaccination sont infiniment plus grands », insiste Agnès Buzyn.

La pharmacovigilance reste néanmoins de mise : en juin, l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) présentera un premier état des lieux de la sécurité des vaccins obligatoires chez les enfants de moins de 2 ans vaccinés entre 2012 et 2017. Des données des premiers mois de 2018 seront également intégrées.

« Pouvoir disposer d’un cadre de référence en matière de pharmacovigilance est un préalable nécessaire à l’analyse des données de pharmacovigilance qui suivront », avance la ministre.

Source : Lequotidiendumedecin.fr

================================================================

Vaccin contre la rougeole, des contre-indications qui n’en sont pas

https://www.jim.fr/e-docs/00/02/B4/1E/carac_photo_1.jpeg Publié le 17/04/2019

L’éradication de la rougeole en Europe était l’un des objectifs de l’OMS pour 2015. Objectif non atteint, comme l’attestent les 4 484 cas de rougeole dénombrés dans 30 pays européens entre février 2016 et janvier 2017. Les plus grands nombres de cas ont été rapportés en Roumanie, le Royaume Uni et l’Italie, avec les enfants de moins de 5 ans comptant pour plus de 40 % des patients.

Toujours selon l’OMS, la prévention de la dissémination de la rougeole et son éradication nécessitent, au niveau local, une couverture vaccinale d’au moins 95 %. Au cours de l’épidémie de 2016 en Italie, la Campanie était la région la plus touchée, avec une incidence de 2,9/100 000 habitants. Or, 92 % des enfants de moins de 2 ans avaient reçu au moins 1 dose de vaccin. Il était alors suggéré que l’augmentation de l’incidence de la rougeole dans cette région était l’expression d’une réduction du taux de vaccination chez les enfants plus âgés. En Italie, la vaccination contre la rougeole est préconisée à 12-15 mois, avec un rappel entre 5 et 6 ans.

Moins de 5 % des motifs de refus invoqués sont de réelles contre-indications

L’identification des raisons qui poussent les parents et les soignants à refuser ou à négliger la vaccination semble une démarche essentielle pour améliorer la couverture vaccinale. Une équipe italienne s’y est attelée et a interrogé les familles de 1 141 enfants (âge médian 7 ans ; 47,2 % de garçons). Le taux de couverture vaccinale est de 84,1 % (enfants ayant reçu au moins une dose), et 15,9 % des enfants n’ont pas été vaccinés. Parmi les enfants vaccinés, moins de la moitié (49,6 %) ont reçu les 2 doses.

La couverture vaccinale est inférieure à celle observée pour les autres vaccins recommandés pour l’enfant de plus de 15 mois (DTaP-HB-IPV-Hib) qui est de 97,7 %. La couverture vaccinale varie significativement selon les groupes d’âge, le taux le plus bas étant observé chez les moins de 24 mois (67,8 % vs 83,6 % pour les moins de 6 ans). Parmi les enfants incomplètement ou non vaccinés, seulement 14,4 % des familles expriment leur intention de faire vacciner leur enfant dans un futur proche.

Les raisons évoquées par les familles pour ne pas vacciner leur enfant sont la crainte des effets indésirables (48,7 %), la présence d’une maladie chronique (9,5 %), l’oubli d’un rendez-vous (11 %), le refus de toute vaccination (9,9 %), la présence d’une maladie aiguë au moment de la vaccination (6,8 %) et l’allergie à l’œuf (4,6 %).

En comparant les raisons avancées par les familles avec les indications des autorités sanitaires, seulement 4,7 % de ces raisons sont de réelles contre-indications et 3 % supplémentaires sont sur la liste requérant des précautions.

La couverture vaccinale la plus basse se trouve chez les plus à risque…

Les auteurs notent que l’une des barrières principales à la vaccination est la crainte des effets indésirables, comptant pour près de la moitié des raisons des vaccinations manquantes. Il s’agit notamment de l’hypothèse d’un lien entre la vaccination contre la rougeole et les troubles de la sphère autistique qui continue, 20 ans après sa publication par Wakefield and coll. d’inquiéter les parents, malgré les preuves accumulées de résultats falsifiés. Mais, ainsi que l’indiquent les auteurs, en terme de vaccination, les faits prouvés sont loin d’avoir la même résonance dans les média que les « fausses nouvelles » sur les vaccins.

Ces données font ressortir toutefois que les stratégies pour améliorer la couverture vaccinale devraient impliquer aussi les professionnels de santé, pour qu’ils saisissent toutes les opportunités de mettre à jour le calendrier vaccinal de leurs patients, qu’ils proposent des rattrapages le cas échéant, et s’assurent de l’existence de réelles contre-indications à la vaccination, notamment en ce qui concerne les maladies chroniques et les allergies.

Notons pour terminer que la couverture vaccinale la plus basse se retrouve, dans cette étude, chez les enfants de moins de 2 ans et ceux présentant une maladie chronique, deux catégories les plus exposées à de sévères complications et au décès.

Dr Roseline Péluchon

RÉFÉRENCES : Lo Vecchio A et coll. : Determinants of low measles vaccination coverage in children living in an endemic area. Eur J Pediatr., 2019;178(2):243-251. doi: 10.1007/s00431-018-3289-5.

Copyright © http://www.jim.fr