https://www.jim.fr/e-docs/00/02/C2/A6/carac_photo_1.jpg Publié le 20/12/2019

L’immigration est un traumatisme culturel dont les conséquences à court, moyen et long terme sont innombrables. Le changement de milieu et d’habitudes a certes un impact psychologique majeur, mais il n’est pas sans retentir sur les comportements et les choix alimentaires, eux-mêmes susceptibles de peser sur la morbibité cardiovasculaire et les grands équilibres métaboliques.

Ces notions qualitatives relèvent donc à la fois de la sociologie et de la médecine, mais elles prennent une dimension de plus en plus importante.

Une étude transversale nationale du type cas-témoins menée en Israel donne une idée plus quantitative quoique relative de certaines conséquences cardio-métaboliques de l’immigration. Les données recueillies entre 1992 et 2016 ont principalement concerné l’indice de masse corporelle (IMC) et la pression artérielle (PA), mesurés chez de jeunes immigrants, âgés de 16 à 19 ans, tous d’origine éthiopienne.

Deux groupes ont été constitués selon le pays de naissance, en l’occurrence Israël (n =16 153) ou un autre pays dont l’Ethiopie (n = 23 487). Un groupe de témoins (n = 277 789) a été formé par des adolescents vivant sur le sol israélien depuis au moins trois générations.

Chez les adolescents d’origine éthiopienne nés ailleurs qu’en Israël, la prévalence de la surcharge pondérale et de l’obésité (IMC ≥ 85ème percentile), a été multipliée par 2,5 pour les garçons et 4,00 pour les filles au cours de la période d’observation. En comparaison, chez les adolescents de même origine ethnique nés en Israël, cette prévalence par rapport au groupe des témoins n’a été multipliée que par 1,5, un chiffre identique dans les deux sexes.

Des risques modulés en fonction du sexe et de l’ancienneté de l’immigration

Le risque d’HTA, pour sa part, augmente proportionnellement à la durée du séjour en Israël depuis l’immigration et selon le sexe : pour les sujets de sexe masculin arrivés à un âge compris entre 12 et 19 ans, le risque d’HTA était majoré de 7,3 %, mais il était augmenté de 10,6 % pour ceux venus entre 6 et 11,9 ans, et de 14,4 % pour ceux venus entre 0 et 5,9 ans. Les valeurs correspondantes dans le sexe féminin ont été respectivement de 11,5 %, 16,7 % et 19,3 %.

Quelle que soit la valeur de l’IMC, le risque d’HTA est apparu plus élevé chez les Ethiopiens nés en Israël que chez ceux nés ailleurs, tout au moins ceux des premières générations, ceci après ajustement selon les facteurs sociodémographiques et l’état de santé.

Cette étude israélienne aboutit à des résultats qui pourraient s’appliquer à d’autres populations et contextes marqués par une immigration. En l’occurrence, chez ces immigrants d’origine éthiopienne, le risque d’HTA est directement corrélé au délai écoulé par rapport à l’arrivée en Israël.

La surveillance de ces populations à risque cardiovasculaire élevé doit donc s’exercer de manière ciblée sur le long terme et la remarque vaut autant pour la PA que pour l’IMC, l’obésité étant autant, voire plus à redouter que l’HTA selon sa forme clinique.

Dr Philippe Tellier

RÉFÉRENCE: Hamiel U et coll. : Impact of Immigration on Body Mass Index and Blood Pressure Among Adolescent Males and Females: A Nationwide Study. Hypertension. 2019 ; 74(6): 1316-1323. doi: 10.1161/HYPERTENSIONAHA.119.13706.

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VIH, mortalité maternelle, diabète : la santé des immigrés à l’épreuve