Publié le 30/01/2019
La prise en charge d’un enfant obèse nécessite de faire le point sur sa prise alimentaire. La sous-déclaration de cette consommation (additions, omissions, substitutions, portions imprécises…) peut biaiser le bilan du patient et les résultats des investigations nutritionnelles. Dans ce travail, les auteurs ont étudié les particularités des enfants « sous-déclarants », dans une cohorte avec des antécédents d’obésité chez les parents.
Six cent trente enfants bien portants âgés de 8 à 10 ans, sans régime restrictif, avec au moins un parent obèse (IMC > 30 kg/m² ou tour de taille > 102 cm chez les pères et 88 cm chez les mères), ont été recrutés au Canada et suivis pendant 2 ans. Leur consommation alimentaire a été relevée en début d’étude à l’aide de 3 questionnaires de rappel alimentaire de 24 heures, remplis par les enfants, avec l’assistance des parents si nécessaire. Le niveau d’activité physique était mesuré par accéléromètre, sur au moins 4 jours, 10 heures/j. Les paramètres physiques, cliniques et biologiques étaient mesurés au laboratoire de recherche.
La sous-déclaration était calculée par l’équation de Goldberg, basée sur le rapport entre la prise énergétique déclarée et le métabolisme de base calculé en intégrant poids, taille, activité physique et leurs coefficients de variabilité.
500 kcal passés sous silence
Cent soixante-quinze enfants se sont révélés être sous-déclarants. Au sein de la cohorte, ils étaient plus âgés, avec un IMC plus élevé : la probabilité d’être obèse était de 37,1 % chez les sous-déclarants et 3,2 % chez les normo-déclarants; leur consommation énergétique déclarée était en moyenne de 1 348 kcal/j, contre 1 822 kcal/j pour les normo-déclarants (p < 0,001 respectivement). Leurs parents avaient des revenus plus faibles et un IMC plus élevé. L’âge et l’IMC des enfants étaient les plus forts déterminants de la sous-déclaration. La pression artérielle, les triglycérides et le LDL cholestérol étaient significativement plus élevés chez les sous-déclarants, et le cholestérol HDL plus bas. Leur activité physique était aussi plus basse.
Pour l’ensemble du groupe, les auteurs n’ont pas retrouvé de lien entre consommation énergétique au départ et IMC à deux ans. Toutefois, après exclusion des enfants sous-déclarants ou ajustement sur l’indice de déclaration, la relation devenait positive.
Pourquoi cette sous-déclaration ? Les auteurs excluent un régime hypocalorique puisqu’il s’agissait d’un critère d’exclusion au départ, et évoquent un acte volontaire pour des raisons d’approbation sociale ou de valorisation.
Cette étude montre que chez les enfants obèses, la sous-déclaration énergétique est très fréquente et importante, et il faut donc en tenir compte en mettant autant que possible le patient en confiance, point sans doute essentiel pour aborder la prise en charge.
Dr Viviane de La Guéronnière
RÉFÉRENCES : Suissa K et coll. : The Cardiometabolic Risk Profile of Underreporters of Energy Intake Differs from that of Adequate Reporters among Children at Risk of Obesity. J Nutr., 2019, publication avancée en ligne le 2 janvier. doi: 10.1093/jn/nxy209.
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