Actualités – publiée le 8/09/2019 par Équipe de rédaction Santélog
Nature Biotechnology
« Tout se manifeste fondamentalement dans le cerveau. Tout. Toutes nos pensées, nos perceptions, tous types de maladies ». Cette équipe d’Harvard soutient que les implants neuronaux à l’échelle nanométrique constitueront très prochainement le meilleur moyen de traiter tout un spectre de maladies neurologiques, dont la maladie d’Alzheimer ou le syndrome de stress post-traumatique. Ces dispositifs pourraient même permettre d’améliorer les capacités cognitives et bien sûr de contrôler les prothèses ou d’opérer comme des interfaces idéales homme-machine. Bref, pour cette équipe c’est « l’avenir du contrôle de l’esprit ».
Les électrodes implantées dans le cerveau peuvent déjà atténuer certains symptômes neurologiques, comme les tremblements associés à la maladie de Parkinson. Cependant, les implants actuels sont encore trop volumineux et manquent de souplesse : « Le cerveau est fluide et ces implants sont rigides », relève l’auteur principal, le Dr Shaun Patel. Il y a environ 4 ans, il découvrait les alternatives ultra-flexibles de Charles M. Lieber et formait alors cette vision prémonitoire des interfaces cerveau-machine.
Une nouvelle perspective, la Precision Electronic Medicine »
Cette perspective est celle d’une nano et neurotechnologie qui permettra de franchir la frontière de la fusion de la cognition humaine avec des machines, explique en substance le Dr Patel. L’électronique maillée ou en réseau constituerait la base de ces machines tout comme celle de traitements électroniques personnalisés pour les maladies du cerveau.
Les scientifiques savent aujourd’hui identifier les zones du cerveau d’où proviennent la prise de décision, l’apprentissage et les émotions, et, avec plus de difficultés, les comportements associés de groupes de neurones spécifiques. À l’heure actuelle, lorsque les circuits complexes du cerveau commencent à dysfonctionner ou à se dégrader en raison de maladies psychiatriques telles que la toxicomanie ou le trouble obsessionnel-compulsif ou de maladies neurodégénératives, les patients ne disposent que de 2 options d’intervention médicale : les médicaments ou les électrodes implantées.
Deux options existent, mais peu satisfaisantes :
- Des médicaments (comme la L-dopa par exemple dans le traitement de la maladie de Parkinson) peuvent calmer certains symptômes de la maladie. Mais comme les médicaments affectent plus que leur cible, leurs effets secondaires peuvent être sévères.
- Les électrodes -approuvées pour certains traitements par l’Agence américaine FDA- peuvent apporter un vrai soulagement grâce à la stimulation cérébrale profonde. Cependant, chaque électrode « est grosse ». Lors de l’implantation, les patients sont éveillés et les chirurgiens peuvent ainsi calibrer les impulsions électriques. Presque instantanément, le patient reprend le contrôle de lui-même.
Mais, comme les médicaments, ces « grosses » électrodes stimulent plus que les cibles voulues, provoquant des effets secondaires parfois sévères. Et, au fil du temps, le système immunitaire du cerveau traite ces implants trop rigides et trop volumineux comme des corps étrangers : les cellules immunitaires neurales (cellules gliales) engloutissent l’envahisseur en tuant les neurones à proximité et en réduisant la capacité du dispositif à délivrer l’impulsion.
Une nouvelle génération de composants électroniques -ceux du Dr Lieber- n’induit presque aucune réponse immunitaire. Ces implants peuvent collecter des données fiables sur la manière dont les neurones communiquent au fil du temps ou, dans le cas de troubles neurologiques, sur l’échec de certains réseaux de communication. Finalement, la technologie permet de suivre la manière dont des sous-types de neurones spécifiques communiquent, ce qui permet d’obtenir une cartographie plus propre et plus précise des réseaux de connexion impliqués. Ces électrodes du futur peuvent agir avec une plus grande précision, ce qui élimine les effets secondaires indésirables. De plus, elles ont la capacité d’encourager la migration neuronale, guidant les neurones vers les zones lésées (comme en cas d’accident vasculaire cérébral).
Un potentiel qui dépasse les limites de la thérapeutique : les nouvelles électrodes pourraient également fournir un contrôle accru sur les membres prothétiques ou même paralysés. Avec le temps, ils pourraient agir comme des substituts neuronaux, remplaçant des circuits endommagés pour rétablir les connexions et se recalibrer.
Rétablir la communication avec et dans le cerveau de la même manière que le cerveau communique en lui-même. C’est l’objectif de cette équipe mais également celui de quelques grandes entreprises de technologie qui souhaitent développer ces interfaces cerveau-machine. Neuralink d’Elon Musk prévoit ainsi de pouvoir apporter aux patients paralysés la capacité de faire fonctionner des ordinateurs ou des prothèses avec l’esprit. Facebook de permettre d’envoyer des textos directement par la pensée et d’autres équipes de pouvoir ainsi booster les capacités cognitives.
Une simple impulsion électrique (de 500 millisecondes) permet de contrôler la capacité d’une personne à prendre une décision. « Cela dépasse votre conscience », écrivent les chercheurs. Une telle technologie exige un examen éthique approfondi. Par exemple, pour les personnes qui luttent contre la toxicomanie ou le trouble obsessionnel-compulsif, un tel dispositif pourrait être d’une grande aide, mais permettrait aussi d’accéder aux données les plus personnelles de ces patients : leurs pensées.
Améliorer l’apprentissage et la mémoire permettrait de s’acheter un meilleur cerveau, mais à quel prix et à qui ?
Source: Harvard University Sept, 2019 Department of Chemistry and Chemical Biology The future of mind control
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