Revue de presse Mediscoop du 04-03-2022 – Date de publication : 4 mars 2022
Camille Gaubert remarque en effet dans Sciences et Avenir que « notre cerveau ne peut porter attention qu’à un stimulus à la fois, mais passe rapidement de l’un à l’autre.
Chez le bébé, ce processus existe dès l’âge de 5 mois, dans une version 6 fois plus lente que chez l’adulte, d’après une nouvelle étude lyonnaise. Une vitesse de traitement de l’information qui double… en seulement 3 mois ! ».
La journaliste explique que « d’après [ces] travaux […], il faut attendre l’âge de 3 ans pour que la capacité à passer d’un stimulus à un autre soit à peu près aussi rapide que celle d’un adulte.
L’étude est parue dans la revue Current Biology ».
Camille Gaubert note ainsi : « En regardant une photo comportant deux visages, impossible de tous les analyser simultanément.
Vous percevez la présence de ces visages de façon simultanée, mais pour savoir qui ils sont, il vous faut les traiter l’un après l’autre.
Notre cerveau procède en deux étapes pour percevoir consciemment un stimulus externe ».
« La première est une étape sensorielle et inconsciente, qui peut intégrer de multiples stimuli en parallèle (…).
Vient ensuite le traitement conscient du stimulus, qui repose sur des ressources attentionnelles limitées (…).
Pendant cette deuxième étape de traitement conscient, il est impossible de percevoir un nouveau stimulus : c’est ce que les chercheurs appellent le clignement attentionnel », continue la journaliste.
Jean-Rémy Hochmann, premier auteur, précise que « c’est un goulot d’étranglement dans la perception, qui fait que pendant la brève période de temps où le système est occupé à traiter un premier stimulus, il va être aveugle à un second stimulus – tout comme un clignement d’œil nous rend momentanément aveugle ».
Camille Gaubert observe que « ce clignement attentionnel est très court et dure environ seulement quelques centaines de millisecondes chez l’adulte. Mais chez le bébé, c’est une tout autre histoire ».
Camille Gaubert explique ainsi qu’« au laboratoire lyonnais Babylab de l’Institut des Sciences Cognitives Marc Jeannerod, les chercheurs font asseoir 48 bébés de 5 mois, autant de bébés de 8 mois et 24 de 3 ans sur les genoux de leurs parents, face à un écran.
Apparait alors un premier visage au milieu de l’écran, puis un second sur le côté.
En traquant le regard des bébés et en variant la durée entre l’apparition des deux visages, les scientifiques parviennent à mesurer le clignement attentionnel des bébés. […]
Ces expérimentations sont reproduites avec des adultes, qui servent de point de comparaison ».
La journaliste retient que « ce clignement existe bien chez les bébés, mais il est nettement plus long que chez l’adulte. Chez les bébés de 5 mois, le temps du clignement attentionnel était 6 fois plus long, soit 1.150 millisecondes (plus d’une seconde !) contre 175 ms chez l’adulte ».
Elle relève que « chez les bébés de 8 mois, les chercheurs observent un clignement attentionnel réduit de moitié (500 ms) par rapport aux bébés 3 mois plus jeunes.
En revanche, les jeunes enfants de 3 ans avaient un clignement attentionnel presque identique à celui des adultes, à 200 ms ».
Jean-Rémy Hochmann observe ainsi que « les mécanismes qui pourraient mener à la conscience semblent être déjà présents chez les bébés, mais beaucoup plus lents.
Ça suggère que le bébé est peut-être moins en prise avec son environnement que peut l’être l’adulte, qu’il prend plus de temps à voir son environnement ».
« L’accélération du stade de traitement tardif est massive au cours de la première année de vie, ce qui pourrait constituer un mécanisme clé dans le développement de la conscience perceptive », ajoute le chercheur.
Il s’interroge : « Cette accélération est-elle due à la maturation génétiquement programmée du cerveau, ou à une certaine durée d’expérience visuelle (donc à l’âge du bébé), ou une interaction des deux ? ».
Camille Gaubert note que « pour le savoir, des travaux déjà en cours reproduisent ces expérimentations avec des bébés prématurés, dont le cerveau a une maturation retardée par rapport aux bébés de leur âge nés à terme.
Les chercheurs suspectent d’ores et déjà l’implication du processus de myélinisation, c’est-à-dire la formation d’une gaine d’une protéine appelée myéline autour des connexions neuronales ».