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mis à jour le 15/03/2023

L’homme est-il réellement plus fort que la femme dans le monde de la performance sportive ? | valdemarne.fr

Dans le monde du sport, il est classique d’entendre que les femmes sont moins performantes et moins « fortes » que les hommes.

En effet, si l’observation directe des résultats permet de mettre en avant le genre masculin, la réalité ne mérite pas d’être simplifiée à ce point.

L’analyse des capacités physiques ne doit pas se limiter à la mesure exclusive de la performance selon si elle est réalisée par un homme ou une femme.

Les potentialités de progrès et d’adaptation, ainsi que la prise en compte des caractéristiques anatomiques doivent amener à une prise en considération spécifique du travail de la force chez les femmes.

Le genre féminin est-il réellement le « sexe faible », comme certains aiment l’affirmer ?

Pourquoi l’homme est-il « plus fort » ?

Depuis le retour de l’ère de l’olympisme moderne (et après l’autorisation faite aux femmes de participer aux sports), les épreuves sportives sont genrées : les hommes et les femmes concurrent en fonction de leur sexe biologique.
Cela peut se justifier par le fait d’un réel décalage entre les valeurs enregistrées.

Cependant, El Helou, après avoir observé divers sports (patinage de vitesse, cyclisme sur route et sur piste et natation) a montré que l’écart des performances entre les deux genres s’était réduit avec le temps, mais que ce dernier restait constant depuis 25 ans.

Il semble qu’en moyenne les performances féminines soient 10% inférieures à celles des hommes.

En termes de force et de valeur absolue, il existe de réels écarts. Koulmann & Malgyore constatent que les femmes peuvent avoir un déficit de force ou de puissance de 40 à 60% pour les membres supérieurs et de 25 à 30% pour les membres inférieurs.

Cette différence de force absolue explique en partie les différences de performance dans certains domaines entre les deux sexes.

Les différences de performance des deux sexes peuvent être attribuées à plusieurs facteurs :

  • En ce qui concerne les dimensions corporelles, les hommes possèdent en général des os plus longs, donc des leviers anatomiques plus grands, facilitant des productions de forces supérieures comparativement aux femmes.
  • En ce qui concerne la composition corporelle, durant l’adolescence, la production de testostérone chez le garçon stimule la formation osseuse et permet un net accroissement de la masse musculaire.

A l’âge adulte, l’homme possède donc une masse musculaire plus importante : cette dernière, représente en moyenne près de 38% du poids de corps pour l’homme, alors qu’elle est seulement de 25% chez la femme.

A 20 ans, le taux moyen de testostérone dans le sang d’un homme est de 3 à 8 microgrammes/litre et de 0,1 à 0,9 pour une femme.

Connaissant le rôle anabolisant de cette hormone, on comprend donc mieux les différences existantes.

La masse grasse est moins importante chez l’homme (15-20% contre 20 -25% chez la femme), ce qui impacte directement l’expression de puissance musculaire.

  • Cette différence hormonale influence les qualités de souplesse : les hormones féminines vont rendre les articulations des femmes plus laxes ce qui peut avoir un impact sur la capacité à restituer l’énergie élastique accumulée lors d’un mouvement.

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Des femmes bien plus fortes que ce que l’on ne pourrait le croire …

La capacité de force de la femme doit être relativisée d’un point de vue expression de la force et de sa masse musculaire.

Dans cette configuration, la différence homme/femme tend à disparaître et met à égalité les potentialités de chacun au regard de différents critères.

A.Broussal rapporte que le potentiel de force est identique lorsqu’on s’attarde au rapport force/surface de section musculaire.

Les caractéristiques neuromusculaires inhérentes à l’expression de la force semblent être finalement très proches entre les deux sexes.

Enfin, les femmes possèdent une résistance à la fatigue musculaire plus élevée que les hommes.

Cette sous-estimation du potentiel de force féminine s’explique par des biais statistiques et sociaux.
A. Chalabaev, précise que l’homme est plus performant en moyenne que la femme, mais qu’il existe (et existera) des femmes qui sont plus fortes que certains hommes.

Ce biais de généralisation abusive ne décrit pas la réelle diversité des profils que nous pouvons rencontrer.

Elle précise d’ailleurs que « […] dès que l’on regarde la distribution des garçons et des filles autour de la moyenne de leur groupe, on constate des chevauchements très importants pour toutes les compétences physiques : vitesse, force, distance de lancer, même endurance ».

Il faut donc relativiser, avant toute chose, les valeurs absolues de force qui donnent l’avantage à l’homme.

Par ailleurs, dans le monde du travail, les biais sociaux ont tendance à ne pas exposer le sexe féminin à du travail de force, ce qui a donc tendance à ne pas favoriser… le développement de la force chez cette dernière.

Nous entrons donc dans un cercle vicieux : la femme est considérée comme « faible » à la base, et sans s’entraîner à la force, on la considère faible face à des hommes… qui s’exposent à des charges qui permettent le développement de la force.

Comme le souligne A. Broussal, « les femmes peuvent ainsi sauter, courir, squatter, arracher comme les hommes » (Ebben et Jensen, 1998).

Existe-il une différence d’entraînabilité entre les femmes et les hommes ?

Pour répondre à cette question, Roberts et coll. (2020) se sont intéressés à l’hypertrophie et à l’augmentation de la force, que ce soit pour le membre supérieur ou inférieur, à la fois chez la femme ou chez l’homme.

Après avoir analysé une quarantaine d’études, ces auteurs en concluent que les potentiels d’hypertrophie des deux sexes semblaient être identiques : les études montrent qu’il n’existe pas de différence significative sur les gains musculaires (gains de force relative sur les membres inférieurs notamment).

Cependant, on note que les progrès en force sur les membres supérieurs sont plus importants chez la femme comparativement à l’homme.

Ces dernières progressent donc plus en force sur le train supérieur lorsqu’elles sont exposées à un type de travail identique au regard de leurs possibilités.

Les auteurs précisent qu’il faut des recherches supplémentaires pour savoir si ces progrès sont plus liés aux facteurs nerveux ou musculaires.

Cette méta-analyse tend à montrer donc que l’entraînabilité de la femme à la force est la même que chez l’homme.

Il semble ainsi opportun de ne pas différencier les protocoles du développement de la force entre les deux sexes.

Cependant, il convient de considérer les différences physiologiques existantes, comme le cycle menstruel, qui peut jouer à la fois sur la perception du travail ou de la fatigue.

Conclusion

Alors que dans l’absolu, la femme est en moyenne moins forte que l’homme, le potentiel de développement de la force de cette dernière est égal à l’homme, voire plus important en ce qui concerne les membres supérieurs.

Par des biais à la fois statistiques et sociaux, le développement de la force de la femme est peu considéré par notre société, alors qu’il devrait en être tout autre.

Tout plan d’entraînement digne de ce nom doit exposer le public féminin au développement de la force afin de favoriser à la fois son potentiel de performance mais aussi viser l’amélioration de sa santé.

Benjamin DUMORTIER

Références