Analyse brève 15 10 2017
Les mortalités globale, cardiovasculaire et celle liée au cancer diminuent-elles également chez les sportifs du week-end ?
Analyse de O’Donovan G, Lee IM, Hamer M, Stamatakis E. Association of “weekend warrior” and other leisure time physical activity patterns with risks for all-cause, cardiovascular disease and cancer mortality. JAMA Intern Med 2017;177:335-42. DOI: 10.1001/jamainternmed.2016.8014
Sur la base d’une synthèse méthodique avec méta-analyse, Minerva a pu conclure que, chez l’adulte, il existait une relation statistiquement significative entre le temps passé à des activités sédentaires et la mortalité toutes causes confondues, la mortalité et la morbidité cardiovasculaires, la mortalité liée au cancer et l’incidence du cancer et du diabète sucré (1,2). Une autre synthèse méthodique avec méta-analyse a montré que le risque accru de décès associé au comportement sédentaire, diminue à mesure qu’augmente l’activité physique moyenne par semaine (3,4).
L’OMS recommande donc aux adultes ayant entre 18 et 64 ans d’effectuer des activités physiques d’intensité modérée pendant au moins 150 minutes par semaine ou des activités physiques d’intensité soutenue pendant au moins 75 minutes par semaine, ou une combinaison équivalente d’activités d’intensité modérée et soutenue (5).
La fréquence et la régularité ne sont toutefois pas précisées. Il est donc possible de se conformer aux recommandations soit en effectuant des activités régulièrement ou soit en pratiquant une activité (d’intensité soutenue) une fois par semaine. Les personnes qui pratiquent une activité une fois par semaine sont appelées « sportifs du week-end».
Une étude de cohorte de 2004, menée auprès de 8421 hommes, a montré qu’une activité régulière (exercices au moins 3 fois par semaine) réduisait le risque de décès, versus l’absence d’activité (pas d’exercices physiques) (6). Pour les « sportifs du week-end » (exercices une ou 2 fois par semaine), cette relation ne se retrouve que chez les hommes qui ne présentent pas d’autres facteurs de risque (tabagisme, surcharge pondérale, hypertension artérielle, hypercholestérolémie). Cette étude permettrait donc de conclure que l’activité physique à une moindre fréquence (une ou 2 fois par semaine), protégerait aussi du risque de décès les hommes qui ne présentent pas d’autres facteurs de risque.
Une récente étude (7) a combiné 11 études de cohorte menées entre 1994 et 2012 en Angleterre et en Écosse. Les investigateurs ont étudié l’activité physique, pratiquée durant le temps libre et rapportée par le sujet, chez 63591 adultes ayant plus de 40 ans (âge moyen de 58,6 ± 11,9 ans ; 45,9% étant de sexe masculin ; > 90% étant de type caucasien) et les données concernant la mortalité (mortalité toutes causes confondues, mortalité cardiovasculaire, mortalité liée au cancer) obtenues à partir des registres de santé nationaux (British National Health Service Central Registry). Ils se sont enquis de la fréquence et de la durée des activités physiques au cours des 4 semaines écoulées (promenades, exercices physiques et sport). A partir de leurs réponses, les participants ont été répartis en 4 groupes : 62,8% étaient inactifs (pas d’activité d’intensité modérée à soutenue) ; 22,4% étaient insuffisamment actifs (< 150 minutes/semaine d’activité d’intensité modérée et < 75 minutes/semaine d’activité d’intensité soutenue) ; 3,7% étaient des « sportifs du week-end » (≥ 150 minutes/semaine d’activité d’intensité modérée ou ≥ 75 minutes/semaine d’activité d’intensité soutenue en une ou 2 séances) ; et 11,1% étaient régulièrement actifs (≥ 150 minutes/semaine d’activité d’intensité modérée ou ≥ 75 minutes/semaine d’activité d’intensité soutenue en au moins 3 séances).
Après correction pour tenir compte de l’âge, du sexe, des habitudes de tabagisme, de la présence ou non d’une maladie chronique et de la profession, on a observé, versus le groupe inactif, une mortalité globale plus faible chez les sujets insuffisamment actifs (rapport de hasards (hazard ratio, HR) 0,69 avec IC à 95% de 0,65 à 0,74), chez les sportifs du week-end (HR 0,70 avec IC à 95% de 0,60 à 0,82) et chez ceux qui étaient régulièrement actifs (HR 0,65 avec IC à 95% de 0,58 à 0,73). Le risque était également plus faible chez les personnes insuffisamment actives qui étaient actives durant une ou 2 séances (HR 0,66 avec IC à 95% de 0,62 à 0,72). Le risque de mortalité cardiovasculaire était également plus faible chez les personnes insuffisamment actives, chez les sportifs du week-end et chez les personnes actives, que chez les personnes inactives. En outre, le risque de décès lié au cancer était plus faible chez les personnes insuffisamment actives et chez les personnes régulièrement actives. Il n’y avait pas de différence entre les hommes et les femmes.
Conclusion
Cette étude de cohorte, basée sur les données rapportées par plus de 60000 sujets adultes, montre qu’une ou 2 séances par semaine d’activité physique durant le temps libre sont associées à une réduction de la mortalité toutes causes confondues, de la mortalité cardiovasculaire et de la mortalité liée au cancer, indépendamment du fait que l’on se conforme ou non aux recommandations actuelles concernant leur intensité et leur répartition sur la semaine.
Pour la pratique
L’OMS recommande aux adultes ayant entre 18 et 64 ans d’effectuer des activités physiques d’intensité modérée pendant au moins 150 minutes par semaine ou des activités physiques d’intensité soutenue pendant au moins 75 minutes par semaine, ou une combinaison équivalente d’activités d’intensité modérée et soutenue (5). Il ressort de cette étude de cohorte que différents modèles d’activité physique durant le temps libre réduisent d’environ 30% le risque de décès prématuré, versus un mode de vie sédentaire. Les modèles d’activité d’intensité modérée à soutenue moins fréquente (une ou 2 séances par semaine) durant le temps libre paraissent également être associés à une réduction de la mortalité, même lorsque le niveau d’activité recommandé par l’OMS n’est pas atteint.
- De Cocker K, DeSmet A, Verloigne M. Relation entre le temps consacré à des activités sédentaires et la morbidité, la mortalité et l’hospitalisation. MinervaF 2015;14(6):72-3.
- Biswas A, Oh PI, Faulkner GE, et al. Sedentary time and its association with risk for disease incidence, mortality and hospitalization in adults: a systematic review and meta-analysis. Ann Int Med 2015;162:123-32. DOI: 10.7326/M14-1651
- De Cocker K. L’activité physique peut-elle atténuer, voire faire disparaître, le lien entre sédentarité et mortalité ? Minerva bref 15/05/2017.
- Ekelund U, Steene-Johannessen J, Brown WJ, et al. Does physical activity attenuate, or even eliminate, the detrimental association of sitting time with mortality? A harmonised meta-analysis of data from more than 1 million men and women. Lancet 2016;388:1302-10. DOI: 10.1016/S0140-6736(16)30370-1
- World Health Organization. Global recommendations on physical activity for health. URL: http://www.who.int/dietphysicalactivity/publications/9789241599979/en. Published 2010.
- Lee IM, Sesso HD, Oguma Y, Paffenbarger RS Jr. The “weekend warrior” and risk of mortality. Am J Epidemiol 2004;160:636-41. DOI: 10.1093/aje/kwh274
- O’Donovan G, Lee IM, Hamer M, Stamatakis E. Association of “weekend warrior” and other leisure time physical activity patterns with risks for all-cause, cardiovascular disease and cancer mortality. JAMA Intern Med 2017;177:335-42. DOI: 10.1001/jamainternmed.2016.8014