Accueil Course au large Route du Rhum
Philippe Poupon est un immense marin qui a notamment gagné la Route du Rhum en 1986.
Pour la dernière édition de cette course transatlantique, fin 2022, il avait pris le départ sur le trimaran (rebaptisé Flo) avec lequel Florence Arthaud avait remporté l’édition de 1990.
Il raconte pour Voiles et Voiliers cette jolie aventure, qui va faire l’objet d’un long-métrage réalisé par son épouse Géraldine Danon.
Philippe Poupon, skipper du trimaran Flo (ex-Pierre 1er), 7e de la dernière Route du Rhum (2022) en catégorie Rhum Multi. | ALEXIS COURCOUX
Philippe POUPON. Publié le 27/01/2023 à 17h30
L’aventure commence il y a seulement un peu plus d’un an, quand Géraldine écrit le scénario du film sur la vie de Florence.
Je lui dis que s’il y a un bateau qui doit être dans le film, c’est bien celui avec lequel « Mimine » a gagné la Route du Rhum en 1990.
Nous sommes en septembre 2021. Je ne sais si le bateau existe encore, je me mets en quête sur internet et le trouve en vente sur le site de Bernard Gallay.
Le bateau est aux Philippines et plusieurs acheteurs sont intéressés. Il faut trouver un sponsor propriétaire et c’est bien par une opportunité de « bistrot » que je rencontre un autre Philippe (Brillault), qui lui recherche un parrain pour une épreuve corporative en Méditerranée pour le milieu médical.
Il vient me saluer et me demande si cela m’intéresse de parrainer son épreuve.
Rendez-vous est pris le lendemain avec Géraldine car je dois m’envoler pour Tahiti, préparer mon ketch de grande croisière Fleur Australe pour la prochaine expédition en Antarctique.
Géraldine lui parle du projet du film, Philippe Brillault dit « banco » et se lance dans l’aventure pour acheter le trimaran Lakota, ex-Pierre 1 er.
Le trimaran Flo, ex-Pierre 1er, à Saint-Malo quelques jours avant le départ de la dernière Route du Rhum, fin 2022. | ALEXIS COURCOUX
Refit du bateau puis tournage pour un long-métrage
Ancien médecin urgentiste, Philippe attaque ce projet avec passion.
Il négocie l’achat du bateau et pour cause de mesures Covid encore en place en Asie, ce n’est que fin février qu’il s’envole pour les Philippines avec deux amis, pour ce long convoyage.
Ils quittent rapidement le port de Subic avec le marin philippin en charge du bateau et traversent la mer de Chine.
L’aventure ne fait que commencer. Un arrêt au large de Singapour pour refaire les pleins, un autre en Thaïlande pour changer la batterie, et un mois de stand-by au Sri Lanka pour démonter deux fois le moteur.
Ils arrivent à rejoindre Djibouti après une première menace de piraterie en arrivant sur la Somalie.
L’escale permet de préparer le bateau et de démonter le moteur une troisième fois.
L’équipage a repris des forces et s’engage dans la mer Rouge via le détroit de Bab-el-Mandeb, la partie la plus étroite en bas de la mer Rouge.
Un bord les fait se rapprocher des côtes du Yémen. Est-ce que des indicateurs ont informé les pirates ?
Au petit matin, deux canots motorisés avec des hommes armés s’attaquent au trimaran.
Philippe Brillault ne se démonte pas et avec son pistolet à billes, répond aux pirates.
En bordant les voiles il empêche ces derniers de monter à bord. Maurice Uguen, le routeur, avec qui je collabore depuis des lustres, et qui suit le parcours du bateau, déclenche les secours.
Retour sous escorte à Djibouti, où Bernard Stamm viendra épauler un équipage un peu sous le choc.
Tout est bien qui finit bien et le bateau arrive début juillet à Cannes.
Philippe Brillault a rempli son contrat et me « livre » le bateau.
Convoyage vers la Bretagne
J’ai cru qu’il allait l’abandonner dans un port, quelque part sur la route, après tous ces ennuis…
Je prends donc en main le mythique trimaran et le ramène jusqu’en Bretagne où l’équipe du film attend le bateau à Saint-Malo pour un premier tournage fin juillet.
L’équipe s’impatientait, et tout le monde est soulagé de voir le bateau rentrer dans les écluses de la cité corsaire.
Au mois d’août, le bateau rentre en chantier chez Mer Agitée.
Inspection générale du trimaran par Michel Desjoyeaux et Bruno Belmont, un ancien de chez JTA (Jeanneau Techniques Avancées), le chantier qui avait construit le bateau.
La structure du trimaran est en parfait état. Tout est remis à neuf, électricité, mécanique, système de barre et gréement.
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Selfie de « Philou » (Philippe Poupon) au milieu de l’Atlantique pendant sa dernière Route du Rhum, en 2022. | PHILIPPE POUPON
Le bateau retrouve son élément début septembre et enchaîne avec le tournage de plus d’une semaine à La Trinité-sur-Mer.
Tout s’est passé dans un timing très serré, mais on a réussi à assurer le tournage et à préparer la Route du Rhum.
On a eu une navigation par vent fort le dernier jour, au large de Belle-Île, ce qui m’a permis de noter quelques modifications à apporter ; il fallait par exemple revoir le plan de voilure pour la trinquette.
Début novembre, malgré un report du départ pour cause de mauvais temps à venir, je suis serein.
Pas d’objectif ni d’obligation. Je dois m’arrêter le premier jour à Port-La-Forêt pour un problème de chariot de grand-voile sur le mât et en repartant de Bretagne, je découvre un problème sur la trinquette.
Il nous a manqué un ou deux jours de navigation pour tester les dernières modifications.
Après un nouvel arrêt à La Corogne, je me trouve décalé par rapport à la route directe et un peu en retard sur mes collègues.
Pas de prises de risque, j’y vais tranquille
Je prends la décision de ne pas aller affronter les fronts successifs qui sont prévus sur la route.
Il s’agit que le bateau arrive en état en Guadeloupe et cela m’incite à plonger vers le Sud, quitte à rallonger la route.
Choix sage que je ne regrette pas. C’est un super bateau et il est toujours aussi beau.
Il est très agréable, navigue vite en douceur et en sécurité. Il est très solide.
Il l’a encore prouvé en effectuant plus de 10 000 milles cette année.
Au retour de la Route du Rhum en convoyage, le Cap d’Agde et son port accueillent très chaleureusement le célèbre trimaran qui redécouvre la Méditerranée que Florence connaissait si bien.
Avec Philippe Brillault, nous sommes fiers d’avoir ramené ce bateau en France, 32 ans après la victoire de Florence sur la Route du Rhum. C’est un bel hommage que nous lui rendons.
Flo (ex-Pierre 1er) à bon port en Guadeloupe, 32 ans après l’exploit de la regrettée Florence Arthaud. | ALEXIS COURCOUX
Avis aux passionnés, Flo est à vendre !
Flo est désormais en vente et nous espérons qu’il trouvera un nouvel acquéreur afin de poursuivre la belle histoire de ce bateau mythique.
Il a une bonne étoile et m’a ému. Et, « cerise sur le bateau », comme aime à dire mon « vieux » complice Loïck Peyron, le film « FLO », écrit et réalisé par Géraldine Danon, sortira en fin d’année sur les écrans.