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https://www.egora.fr/sites/egora.fr/files/styles/290x200/public/visuels_actus/13reasons.jpg?itok=WUh2yBeG egora.fr Par Y. P. le 02-05-2019

Une étude établit un lien entre la série américaine 13 Reasons Why, centrée sur le suicide de son héroïne, et un pic de suicides chez les adolescents. La diffusion de la série est associée à 195 suicides supplémentaires chez les adolescents américains au cours de l’année 2017.

La série 13 Reasons Why n’en est pas à sa première polémique. Diffusée sur Netflix, la série avait déjà suscité l’inquiétude au sein de la communauté médicale pour sa façon de traiter du suicide. D’après une étude épidémiologique récemment publiée par Jeffrey Bridge et ses collègues du Nationwide Children’s Hospital de l’Ohio, sa diffusion en 2017 serait liée à une hausse sensible du taux de suicide chez les adolescents américains.

L’étude vient d’être publiée dans le Journal of the American Academy of Child & Adolescent Psychiatry, une des principales revues scientifiques de pédopsychiatrie. Elle établit que la série est associée à 195 décès supplémentaires d’adolescents de 10 à 17 ans entre avril (début de la diffusion) et décembre 2017, en contrôlant la tendance générale et l’effet de saisonnalité. C’est l’équivalent d’une hausse de 30 %* de la mortalité par suicide dans cette classe d’âge.

La série américaine 13 Reasons Why, diffusée sur Netflix depuis mars 2017, met en scène l’enquête d’un adolescent de 17 ans qui reçoit des cassettes vidéo d’une de ses amies décédée quelques semaines plus tôt, où elle explique les raisons qui l’ont conduite à mettre fin à ses jours. La série a suscité un engouement important chez les adolescents, au point de susciter une hausse perceptible des recherches sur le suicide sur Google dans les jours suivant sa diffusion.

« Le suicide dépeint dans 13 Reasons Why est raconté de manière irréaliste et sensationnaliste », déplore le Dr Jeffrey Bridge, interrogé par l’AFP. Il déplore également que la méthode employée par Hannah, l’héroïne, soit montrée avec des détails macabres. (La scène clé, esthétisée mais explicite, montre l’adolescente s’entailler les deux poignets avec une lame de rasoir dans sa baignoire.)

Comme dans toute étude observationnelle, les résultats sont à prendre avec prudence. Difficile d’établir un lien de causalité entre le visionnage de la série télévisée et cette recrudescence de suicides, d’autant que la hausse de la suicidalité concerne essentiellement les garçons (76 % des cas), contrairement aux attentes des auteurs. Aucune surmortalité n’a été mise en évidence dans les autres tranches d’âge.

Netflix, qui a reconduit la série pour une troisième saison, a indiqué à l’AFP être « en train d’analyser l’étude »du Nationwide Children’s Hospital pour être sûr de traiter le sujet « de manière responsable ». Face aux inquiétudes, la saison 2 de la série, diffusée en 2018, avait été agrémentée d’un message de prévention à l’adresse des spectateurs fragiles.

[Avec AFP]

* Avec un OR de 1,29 (IC 95 % 1,09 – 1,53).

Bridge et al. Association Between the Release of Netflix’s 13 Reasons Why and Suicide Rates in the United States: An Interrupted Times Series Analysis, Jaacap, 2019.

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