Accueil Course au large Trophée Jules Verne
Seulement 7 femmes sur 138 marins à la dernière Route du Rhum.
Si les navigatrices sont de plus en plus nombreuses, elles sont encore très peu à skipper les bateaux en équipage.
Avec Famous Project, Alexia Barrier compte bien asseoir les femmes à ce poste sur les maxi-trimarans et tentera en 2025 de s’attaquer au Trophée Jules Verne avec un équipage 100 % féminin. Rencontre.
Une partie de l’équipage de Famous Project. De gauche à droite : Alexia Barrier, Marie Tabarly, Dee Caffari et Élodie-Jane Mettraux. | MARIE CORTIAL
Propos recueillis par Laurène COROLLER. Publié le 09/12/2022 à 08h53
Voiles et Voiliers : Où en est votre projet de Trophée Jules Verne avec un équipage 100 % féminin ?
Alexia Barrier : Ça avance bien. On a deux sponsors qu’on annoncera en janvier.
Je suis en train d’acheter le MOD70 avec lequel j’ai gagné la Middle Sea Race, Mana, ancien Spindrift.
On fera ensuite un an d’entraînement sur ce bateau.
Ensuite on passera en Ultim pour se préparer au Trophée Jules Verne.
On gardera le MOD70 pour s’entraîner et faire naviguer nos partenaires mais également comme plateforme de formation pour les plus jeunes qui ont envie de se mettre au multicoque offshore.
Il n’y a pas vraiment de créneau pour les femmes sur les gros multicoques.
On a déjà le noyau dur de l’équipage et on va continuer à recruter pas mal de filles à tous les niveaux du projet, qu’elles soient ingénieure, préparatrice…
Évidemment ce ne sera pas 100 % féminin. On travaille aussi avec des hommes, des coachs notamment.
Il y a Jonny Malbon qui est project manager, on a des coachs comme Brian Thompson ou Sidney Gavignet comme préparateur mental et puis des ingénieurs, architectes avec VPLP et Renaud Bañuls.
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Gérer un projet, c’est nouveau pour moi
Voiles et Voiliers : C’est la première fois que vous menez un projet d’équipage…
Alexia Barrier : Gérer un projet, c’est nouveau pour moi. Par contre, j’ai beaucoup navigué en équipage, sur Sojana, un superyacht de plus de 30 mètres, avec un équipage international.
J’étais la seule Française avant et c’est pour ça que j’ai l’envie et le besoin d’ouvrir le projet à l’international pour sortir des schémas que l’on connaît en France.
À chaque départ de course et pendant nos campagnes d’entraînement, on va inviter des femmes de différents univers, sportives, cheffe d’entreprise, association de femmes en difficulté, pour leur faire parler de leurs projets.
C’est pour cela que j’ai baptisé ce projet « The Famous Project » pour parler de femmes qu’on ne connaît pas mais qui font des choses extraordinaires sur la planète.
L’année prochaine on devrait aller à Antigua, New York, Les Bermudes, Plymouth, en Méditerranée et en Bretagne. L’année suivante on ira en Asie et dans le Pacifique donc ça devrait être assez rythmé.
Le MOD70 Mana, ancien Spindrift. | MARIE CORTIAL
Voiles et Voiliers : Vous êtes-vous déjà positionné sur un Ultim ?
Alexia Barrier : Non et je n’ai pas envie de penser à ça maintenant.
On a besoin de lever 3 millions par an pour le projet. Donc là je boucle l’achat du MOD70, les contrats de partenariat.
La phase 2 du projet avec l’Ultim va se construire en parallèle, je ne vais pas trop me prendre la tête avec ça.
Je sais qu’après le tour du monde en 2023 des Ultim (Arkéa Challenge Ultim, ndlr), il va se passer beaucoup de choses et ça ne sert à rien de s’exciter tout de suite.
L’idée c’est aussi d’établir un temps de référence féminin
Voiles et Voiliers : La tentative de record du Trophée Jules Verne est prévue pour quand ?
Alexia Barrier : Je pensais au début lancer la tentative en fin 2024. Mais en 2022 on a pu naviguer que sur la Middle Sea Race et ce n’est pas suffisant sportivement parlant de n’avoir eu que l’année 2023 pour se préparer.
Objectivement, je vois plus une première tentative fin 2025 avec un Ultim d’ancienne génération mais j’espère faire évoluer le projet sur un Ultim dernière génération.
L’idée c’est aussi d’établir un temps de référence féminin.
Entraînement sur le MOD70 qu’Alexia s’apprête à acheter. | MARIE CORTIAL
Voiles et Voiliers : Le Maxi Edmond de Rothschild devrait partir sur la tentative cet hiver et pourrait exploser le record. Ça ne vous fait pas peur pour votre projet ?
Alexia Barrier : Déjà il faut qu’il parte. Spindrift est aussi en stand-by depuis un mois déjà.
On verra l’écart de temps avec le temps de Francis Joyon qui sera établi mais je ne me mets pas la pression.
On a un super projet avec des gens qui veulent faire partie de l’aventure.
À nous toutes, on a 12 tours du monde, 54 transatlantiques, 5 transpacifique, 24 records et 18 titres de championne du monde
Voiles et Voiliers : Quelques mots sur ton équipage.
Alexia Barrier : J’ai fait une pré-sélection. Les filles à qui j’ai demandé de participer au projet devaient me répondre en moins de trois minutes pour que je sente vraiment leur envie de le faire, leur motivation…
Le Trophée Jules Verne pour une navigatrice, ce peut être un rêve de petite fille sans avoir jamais osé se projeter dans ce type de projet.
Les sept à qui j’ai demandé ont tout de suite dit oui. Il y a Dee Caffari, Marie Riou, Marie Tabarly, Sara Hastreiter, Helena Darvelid, Élodie-Jane Mettraux et Joan Mulloy.
À nous toutes, on a 12 tours du monde, 54 transatlantiques, 5 transpacifique, 24 records et 18 titres de championne du monde. Sur le papier, on a un groupe solide mais il faut aller naviguer pour voir comment on articule tout ça.
Une partie de l’équipage de Famous Project. | MARIE CORTIAL
On va aussi faire rentrer des jeunes issus de l’olympisme pour compléter l’équipe.
L’idée c’est d’avoir comme au foot, 10 titulaires et 10 remplaçants qui pourront ensuite se projeter sur des projets d’envergure.
On souhaite donner envie aux femmes d’oser et de se lancer. La place de skipper n’est pas encore acquise pour les femmes sur les maxi-trimarans mais tout le monde va vite s’habituer.
On doit ouvrir ce sport à d’autres personnes que des mâles blancs.