Actualités  –  publiée le 11/12/2019 par Équipe de rédaction Santélog

PLoS ONE

Une formation adaptée à  la « pleine conscience » peut contribuer à réduire la pression artérielle.

Les effets des programmes de méditation sur la pression artérielle restent mitigés, peut-être parce que les pratiques ne sont pas spécifiquement adaptées pour s’attaquer aux déterminants de l’hypertension, relève cette équipe de l’Université Brown (Providence). Les chercheurs confirment ici, dans la revue PLoS ONE, qu’une formation adaptée à  la « pleine conscience » peut contribuer à réduire la pression artérielle. 

Les maladies cardiaques constituent la principale cause de décès dans le monde, avec 18 millions de décès chaque année, selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS). La majorité de ces décès sont dus à l’hypertension artérielle ou à une pression artérielle anormalement élevée.

Ces décès pourraient être évités grâce à des médicaments, ou, de préférence grâce à des modifications du mode de vie, tels qu’une alimentation plus saine, une perte de poids et une pratique régulière de l’exercice, mais de nombreuses personnes ne parviennent pas à observer ces comportements sur le long terme.

« C’est là que la pleine conscience peut être utile », relève l’auteur principal, Eric Loucks, professeur agrégé d’épidémiologie, de sciences du comportement et de médecine à l’Université Brown.

« Nous en savons assez sur l’hypertension pour théoriquement la maîtriser chez tout le monde »

Un patient hypertendu sur 2 est « incontrôlable » dans la réalité. L’hypothèse de l’équipe est que la pleine conscience dont la pratique est souple et adaptable quel que soit le mode de vie, pourrait représenter une approche alternative pour réduire les tensions artérielles trop élevées.

Comprendre ce qui se passe dans l’esprit et dans le corps : l’objectif principal de l’équipe est de développer un programme personnalisé de réduction de la tension artérielle basé sur la pleine conscience, d’en évaluer l’acceptabilité et l’observance, et les effets sur les mécanismes supposés d’autorégulation proximale. Les critères d’évaluation sont les niveaux de pression artérielle et de pression artérielle systolique (PAS) évaluées en clinique.

Les chercheurs ont donc développé leur programme de réduction de la pression artérielle basé sur la conscience, d’une durée de 9 semaines, et l’ont testé auprès de 43 participants présentant une pression artérielle élevée. Ces participants ont été suivis durant un an, après la fin du programme. Les participants ont « appris » à améliorer le contrôle de l’attention, la régulation des émotions et la conscience de soi et de leurs habitudes, (saines et malsaines), de manière, aussi, à apprendre à réduire certains des facteurs de risque de pression artérielle élevée.

Des améliorations significatives dans les capacités d’auto-régulation sont obtenues grâce à cette formation à la pleine conscience, et, en pratique, les participants présentent une réduction significative de la pression artérielle, y compris ceux qui n’adhèrent pas aux recommandations concernant les apports de sel et d’alcool, ou de pratique de l’activité physique.

  • Ces effets positifs sont plus prononcés encore chez les participants souffrant d’HTA non contrôlée de stade 2 (pression artérielle systolique >140 mmHg) ;
  • ces participants présentent une réduction moyenne de la pression artérielle de 15,1 mmHg ;
  • chez l’ensemble des participants, ces effets se maintiennent durant le suivi d’1 an.

En faveur d’une intervention multimodale : les chercheurs suggèrent de combiner, chez ces patients, la formation à la pleine conscience avec les autres stratégies standard de réduction de la pression artérielle (médicaments antihypertenseurs et changements de mode de vie). « Chez ce groupe de patients, la formation à la pleine conscience devrait être intégrée aux soins médicaux standard ».

Et pour les personnes qui n’ont pas de problème de tension artérielle ?  La pleine conscience reste un outil de prévention efficace ! Commencer la pratique de la pleine conscience tôt dans la vie, permet de promouvoir une trajectoire de vieillissement en bonne santé.

Source: PLoS ONE November 27, 2019 DOI : 10.1371/journal.pone.0223095 Mindfulness-Based Blood Pressure Reduction (MB-BP): Stage 1 single-arm clinical trial

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Observatoire de la prévention le 09 décembre

La méditation et la réduction du risque cardiovasculaire

La méditation et la réduction du risque cardiovasculaire https://observatoireprevention.org/wp-content/authors/Dr%20Martin%20Juneau-1.jpg

Dr Martin Juneau, M.D., FRCPCardiologue et Directeur de la prévention, Institut de Cardiologie de Montréal. Professeur titulaire de clinique, Faculté de médecine de l’Université de Montréal.

L’American Heart Association (AHA) a publié en 2017 un énoncé scientifique dans lequel les données des études sur les bienfaits potentiels de la méditation sur le risque cardiovasculaire ont été systématiquement examinées.

Malgré les avancées dans la prévention et le traitement de l’athérosclérose, la maladie cardiovasculaire demeure la principale cause de morbidité et de mortalité dans les pays développés (voir ici et ici).

Et bien que l’éducation, la modification du mode de vie et les interventions pharmacologiques aient diminué la prévalence des facteurs de risque cardiovasculaire, la plupart des Nord-Américains ont toujours au moins un facteur de risque important.

Le traitement des maladies cardiovasculaires entraîne des coûts élevés pour la société et il est estimé qu’ils doubleront ou tripleront dans les quelques décennies à venir. Par conséquent, il est d’intérêt d’introduire de nouvelles interventions thérapeutiques peu coûteuses, comme la méditation, qui pourraient contribuer à la prévention primaire et secondaire des maladies cardiovasculaires.

La pratique de la méditation remonte à plus de 5 000 ans.

Elle est associée aux philosophies et religions orientales, incluant le bouddhisme et l’hindouisme, mais l’on peut trouver des références à cette activité dans la chrétienté, le judaïsme et l’islam. Depuis quelques décennies, la méditation est pratiquée en occident de plus en plus en tant qu’activité thérapeutique et profane, c.-à-d. sans aucun rapport à une croyance religieuse. Le tableau 1 présente un résumé des types de méditation les plus connus.

Tableau 1. Principaux types de méditation. (selon Levine et coll., J. Am. Heart Assoc., 2017)

Méditation
Description
Origines et professeurs connus en Occident
Samatha
Samatha signifie « quiétude » et la méditation Samatha est souvent décrite comme une méditation calme et durable. Ce type de méditation consiste à calmer l’esprit en se concentrant sur un seul point comme la respiration, une image ou un objet.
Pratique bouddhiste, datant de l’époque du Bouddha ou même avant.
Vipassana
(méditation intérieure)
Vipassana est traduit par « voir les choses telles qu’elles sont réellement ». La méditation Vipassana insiste sur la conscience de la respiration, en ajustant la quantité d’air entrant et sortant par le nez. Vipassana apprend à classer les pensées et les expériences au fur et à mesure qu’elles se présentent, en prenant des notes mentales lorsque l’on identifie des sujets qui attirent notre attention. La méditation Vipassana est souvent enseignée lors de retraites d’une durée de 10 jours.
Méditation traditionnelle bouddhiste et indienne. Les professeurs occidentaux les plus connus sont Mahasi Sayadaw, S.N. Goenka, Sharon Salzberg, Joseph Goldestein, Jack Kornfield et Michael Stone.
Pleine conscience
Un terme générique désignant la catégorie des techniques utilisées pour créer la prise de conscience et la perspicacité en pratiquant une attention concentrée, en observant et en acceptant tout ce qui survient sans jugement. Ce type de méditation est également appelé « surveillance ouverte », dans laquelle on permet à son attention de circuler librement sans jugements ni attachements.
Les origines viennent de l’enseignement bouddhiste. Les professeurs occidentaux les plus connus sont Jon-Kabat Zinn, Tara Brach, Sharon Salzberg, Joseph Goldestein, Jack Kornfield et Pema Chodron.
Zen (zazen)
Un type de méditation où l’on concentre sa conscience sur sa respiration et observe les pensées et les expériences qui traversent l’esprit et l’environnement. Dans un certain sens semblable à la méditation Vipassana, mais avec un accent sur un foyer de la respiration au niveau du ventre et sur la posture en position assise.
Méditation bouddhiste du Japon. Les enseignants bien connus comprennent Thich Nhat Hanh et Joan Halifax Roshi.
Raja yoga
Connu aussi sous les appellations de « yoga mental », « yoga de l’esprit », ou Kriya yoga. Une pratique de concentration pour calmer l’esprit et l’amener à un point de concentration. Comprend une combinaison de mantra, de techniques de respiration et de méditation sur les points focaux des chakras et de la moelle épinière.
Pratique hindoue datant de milliers d’années. Introduit en Occident en 1893 par Swami Vivekananda. Enseigné par Paramhansa Yogananda pour l’auditoire occidental.
Méditation
de la
bienveillance
(metta)
La méditation de la bienveillance implique d’envoyer une bonté aimante à soi-même, puis de continuer à l’envoyer à un ami ou à un être cher, à quelqu’un qui est neutre dans sa vie, à une personne difficile, puis à l’univers. Par cette pratique, le méditant cultive un sentiment de bienveillance envers soi-même et envers les autres.
Provient des enseignements bouddhistes, principalement du bouddhisme tibétain. Les instructeurs bien connus incluent Sharon Saltzberg et Pema Chodron.
La méditation transcendantale
Technique de méditation basée sur le mantra dans laquelle chaque pratiquant reçoit un mantra personnel qui est utilisé pour aider à installer l’esprit intérieurement. La méditation transcendantale est enseignée par des enseignants certifiés dans le cadre d’un cours standard de quatre jours. La méditation transcendantale est pratiquée pendant 20 minutes deux fois par jour.
Origines dans les anciennes traditions védiques de l’Inde. Popularisé en Occident par le Maharishi Mahesh Yogi et maintenant enseigné aux États-Unis par la Fondation Maharishi.
Réponse de relaxation
Une pratique à multiples facettes qui peut impliquer la prise de conscience et le suivi de la respiration ou la répétition d’un mot, d’une courte phase, ou d’une prière.
Un terme et une pratique mis au point par le Dr Herbert Benson dans les années 1970, basé dans une partie de la pratique de la méditation transcendantale.

Des études neurophysiologiques et neuroanatomiques ont démontré que la méditation peut avoir un effet durable sur le cerveau, ce qui rend plausibles des bienfaits pour l’état physiologique basal et le risque cardiovasculaire.

Les études sur la méditation et le risque cardiovasculaire se sont penchées sur la réponse physiologique au stress, la désaccoutumance au tabac, la réduction de la pression artérielle, la résistance à l’insuline et le syndrome métabolique, la fonction endothéliale, l’ischémie myocardique et la prévention primaire et secondaire de la maladie cardiovasculaire (voir le résumé des observations du comité de l’AHA sur ces études dans le tableau 2).

Dans l’ensemble, les études sur la méditation suggèrent un bienfait potentiel pour le risque cardiovasculaire, bien que la qualité et, dans certains cas, la quantité des données soient modestes. Étant donné les faibles coûts et les faibles risques de cette intervention, la méditation peut être considérée comme un complément aux directives existantes par ceux qui souhaitent modifier leur mode de vie, tout en sachant que les bienfaits d’une telle intervention demeurent à être mieux établis.

Selon l’AHA, les études à venir sur la méditation et le risque cardiovasculaire sont justifiées et devraient, autant que possible, utiliser des essais randomisés contrôlés, être suffisamment puissantes pour satisfaire aux critères principaux de l’étude, s’efforcer d’obtenir de faibles taux d’abandon, inclure un suivi à long terme, et être menées par des personnes qui n’ont pas de préjugés inhérents quant aux résultats de l’étude. Les observations et suggestions du comité de l’AHA sont résumées dans le tableau 3.

Tableau 2. Résumé des observations sur les études sur la méditation et la réduction des risques cardiovasculaires. (selon Levine et coll., J. Am. Heart Assoc., 2017)

Sujet
Observations
Neurophysiologie et neuroanatomie
• Des études neurophysiologiques et neuroanatomiques suggèrent que la méditation peut avoir des effets durables sur la physiologie et l’anatomie du cerveau.
• Les études sont généralement non randomisées et impliquent un nombre modeste de participants, parfois sous la direction de méditants extrêmement expérimentés (> 10 000 heures).
• Les différentes formes de méditation ont des effets psychologiques et neurologiques différents, et donc les résultats neurophysiologiques et neuroanatomiques d’un type de méditation ne peuvent pas être extrapolés à d’autres formes de méditation.
Réponse psychologique, psychosociale et physiologique au stress
• De nombreuses études, mais pas toutes, rapportent que la méditation est associée à de meilleurs indices psychologiques et psychosociaux.
• Les différences dans les populations, le contrôle des facteurs de confusion potentiels et le type et la durée de la méditation évalués peuvent expliquer les résultats discordants. La petite taille des échantillons et le manque de randomisation sont des limites d’étude courantes.
• Une étude plus approfondie est nécessaire sur la façon dont la méditation influence les processus physiologiques associés à la réponse au stress.
Pression artérielle
• L’ampleur des réductions de la pression systolique observées varie considérablement.
• Les limites de l’étude incluent les méthodes de mesure de la pression artérielle et les biais dans la confirmation des données, les taux élevés d’abandon et les différentes populations étudiées.
Tabagisme et
usage du tabac
• Certaines données randomisées montrent que les instructions de méditation pleine conscience améliorent les taux de sevrage tabagique.
Résistance à l’insuline et syndrome métabolique
• Données limitées sur les effets de la méditation sur la résistance à l’insuline et le syndrome métabolique.
Athérosclérose subclinique
• Quelques études sous-optimales de la méditation et de l’intervention sur le mode de vie suggèrent un bienfait potentiel sur la régression de l’athérosclérose.
• Études limitées par l’approche multimodale, l’attrition et le suivi incomplet.
• Aucune conclusion ferme ne peut être tirée sur les effets de la méditation sur l’athérosclérose.
Fonction endothéliale
• Trois études n’ont montré aucun bienfait de la méditation sur la réactivité brachiale dans l’ensemble des cohortes, bien qu’une étude ait suggéré un bienfait dans un sous-groupe de patients atteints de coronaropathie.
• Aucune conclusion ne peut être tirée sur les effets de la méditation sur la fonction endothéliale.
Ischémie myocardique inductible
• Des études plus anciennes suggèrent que la méditation peut entraîner une amélioration de la durée de l’exercice et une diminution de l’ischémie myocardique.
• Aucune étude contemporaine n’a évalué les effets de la méditation sur le débit sanguin myocardique ou l’ischémie avec des techniques d’imagerie avancées.
Prévention primaire des maladies cardiovasculaires
• Deux études d’intervention à court terme rapportent des réductions de mortalité surprenantes, et donc ces résultats doivent être reproduits dans des études multicentriques plus importantes.
• En général, en raison des données limitées à ce jour, aucune conclusion ne peut être tirée quant à l’efficacité de la méditation pour la prévention primaire des MCV.
Prévention secondaire des maladies cardiovasculaires
• Les données sur les bienfaits potentiels de la méditation chez les patients atteints d’une maladie coronarienne établie peuvent être caractérisées comme étant généralement de qualité modeste et ils suggèrent, mais n’établissant pas un bienfait.
• En raison du temps de suivi généralement limité, il existe plus de données sur la réduction des facteurs de risque cardiaques et des indices psychologiques que sur les critères définitifs (p. ex. décès, infarctus du myocarde).

Tableau 3. Résumé des conclusions et suggestions sur la méditation et la réduction du risque cardiovasculaire par un comité scientifique de l’AHA. (selon Levine et coll., J. Am. Heart Assoc., 2017)

• Les études sur la méditation suggèrent un bienfait potentiel sur le risque cardiovasculaire, bien que la qualité globale et, dans certains cas, la quantité des données soient modestes.
• Le pilier de la prévention primaire et secondaire des maladies cardiovasculaires est l’ensemble des interventions guidées par les lignes directrices de l’American College of Cardiology et l’American Heart Association.
• La méditation peut être considérée comme un complément aux directives existantes pour la réduction des risques cardiovasculaires, par ceux qui souhaitent modifier leur mode de vie, tout en sachant que les bienfaits d’une telle intervention demeurent à être mieux établis.
• D’autres recherches sur la méditation et le risque cardiovasculaire sont justifiées. Ces études, dans la mesure du possible, devraient répondre aux critères suivants :

– Utiliser des essais randomisés contrôlés.
– Décision en aveugle lors de l’évaluation.
– Puissance suffisante pour satisfaire aux critères principaux de l’étude.
– Inclure un suivi à long terme.
– Avoir <20 % de taux d’abandon.
– Avoir >85 % de données de suivi.
– Être effectuée par des chercheurs sans biais financier ou intellectuel inhérent quant aux résultats.