Publié le 11/09/2018
Les enfants ne sont pas à l’abri de soins abusifs (« medical overuse »). A l’issue d’une recherche dans PubMed et dans les sommaires de dix revues pédiatriques à fort impact, ER Coon et coll. ont retenu, en fonction de trois critères (qualité méthodologique de l’étude, sévérité et fréquence des effets nocifs), huit articles publiés en 2016 qui délivrent des messages pour éviter des traitements et des diagnostics ayant plus de chances d’être nocifs que bénéfiques pour les enfants.
1. Il ne faut pas imposer aux enfants un soluté de réhydratation orale [SRO] dans les gastro-entérites avec une déshydratation minime. Les enfants qui boivent leurs boissons préférées, plus agréables au palais (jus de pomme dilué au demi, etc.), ont moins souvent besoin d’être réhydratés par voie IV qu’avec un SRO (un essai randomisé en simple aveugle).
2. Les antidépresseurs ont une efficacité discutable dans les dépressions sévères de l’enfant et de l’adolescent, à l’exception notable de la fluoxétine (une revue systématique avec méta-analyse d’essais randomisés, publiés ou non).
3. Les inhibiteurs de la recapture de la sérotonine augmentent la tendance suicidaire et l’agressivité des enfants et des adolescents. Ces effets, signalés par les laboratoires dans les rapports cliniques des demandes d’AMM, sont probablement sous-estimés (une méta-analyse de rapports cliniques).
4. En réanimation pédiatrique, il n’y a pas d’avantage à débuter très tôt une nutrition parentérale [NP]. Par comparaison avec des enfants mis en NP après J7, des enfants mis en NP dès l’admission avaient une mortalité similaire, des complications (infections et choléstase) plus fréquentes, des besoins de techniques (ventilation mécanique, épuration extra-rénale) plus importants et une hospitalisation plus longue. Toutefois, ces enfants n’étaient pas en NP totale (un essai randomisé multicentrique).
5. Une naissance programmée entre 37 sem. et 39 sem., par déclenchement ou par césarienne avant travail, est associée à un risque accru de troubles du développement à 6-7 ans, et ce même quand la grossesse est à bas risque (une étude de cohorte).
6. Les fractures du cartilage de conjugaison sans déplacement de l’extrémité inférieure de la fibula sont rares quand la radiographie de profil de la cheville est négative. Les entorses de la cheville et les fractures-avulsions de l’extrémité inférieure de la fibula sont plus fréquentes (une étude prospective de cohorte).
7. Les hydrolysats de protéines, plus ou moins « poussés », ne protègent pas les enfants à risque allergique élevé d’affections allergiques et de maladies auto-immunes comme le diabète de type 1. Ils sont inutiles dans cette indication (revue systématique de 31 études).
8. Des désaturations prolongées au cours de bronchiolites traitées en ville (SpO2 <90 % pendant ≥ 1 min.) ne traduisent pas forcément une aggravation. Le monitorage de la SpO2 des bronchiolites peut aboutir à des hospitalisations excessives si on se fie aux valeurs de la SpO2 sans tenir compte de l’aspect clinique des enfants (une étude prospective de cohorte).
La diffusion de ces huit messages peut éviter de nuire aux enfants, et de plus réduire les coûts des soins médicaux.
Dr Jean-Marc Retbi
RÉFÉRENCE
Coon ER et coll. : 2017 Update on pediatric medical overuse. A review. JAMA Pediatr., 2018 ; 172 : 482-486. Doi :10.1001/jamapediatrics.2017.5752
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