Publié le 09/12/2020

Aux USA, la prévalence de l’hypertension artérielle (HTA), primaire et secondaire de l’enfant et de l’adolescent se situe, selon la plupart des études, autour de 3 à 4 %.

Une HTA essentielle ou primaire est observée le plus souvent au-delà de 13 ans.

Elle est, par définition, sans cause précise mais associée en règle à différents facteurs de risque comme une histoire familiale d’HTA ou un indice de masse corporelle (IMC) élevé.

L’HTA secondaire survient habituellement plus précocement. Ses causes sont variées : génétique, rénale, endocrinienne ou cardiovasculaire.

En 2017, l’American Academy of Pediatrics avait revu les critères d’HTA infantile.

Une pré hypertension est définie, pour les enfants de 1 à 13 ans, par une élévation durable, retrouvée à 3 mesures auscultatoires consécutives, avec des valeurs entre le 90e et le 94e percentile suivant l’âge, le sexe et la taille ou au-delà de 120- 129/80 mm Hg.

Une HTA franche, toujours sur 3 mesures auscultatoires et dans des sites artériels différents, est retenue pour une valeur supérieure au 95e percentile ou de plus de 130/80 mm Hg.

Au-delà de 13 ans, la définition de l’HTA rejoint celle de l’American Heart Association/ American College of Cardiology, quels que soient le sexe ou la taille : pour le stade I, une PA comprise entre 130/80 et 139/ 89 mm Hg et, pour le stade II, une PA supérieure à 140/ 90mmHg.

Il est précisé que la mesure doit être effectuée à la partie supérieure du bras droit, à l’aide d’un brassard adapté à la circonférence brachiale et répétée à 3 visites différentes.

Il est aussi suggéré que, chez l’enfant comme chez l’adulte, une confirmation soit apportée par un enregistrement tensionnel ambulatoire sur 12 ou 24 heures.

Le traitement de l’HTA de l’enfant associe modifications du style de vie (perte de poids en cas d’IMC élevé, activité physique accrue, mesures diététiques et éducation…) et, si nécessaire, prescriptions médicamenteuses.

Dépister entre 3 et 6 ans ?

Avant la mise en route d’un dépistage de l’HTA chez l’enfant, plusieurs facteurs doivent être pris en compte.

Pour une HTA primaire doivent être recherchés en particulier chez des garçons, des facteurs de risque tels qu’une obésité ou un surpoids, une histoire familiale d’HTA, un petit poids de naissance, une origine afro américaine ou hispanique.

Il importe d’envisager, lors de la mesure, l’éventualité de faux positifs et de savoir que les preuves qu’une élévation tensionnelle durant l’enfance est bien associée à la survenue d’événements cardiovasculaires pathologiques à l’âge adulte, sont limitées.

Chez l’enfant de moins de 6 ans, l’HTA est souvent secondaire, intégrée alors à d’autres manifestations de la pathologie causale qu’il revient alors de traiter en priorité afin de contrôler l’HTA.

En pratique quotidienne, de nombreuses institutions recommandent la mise en route d’un dépistage dès l’âge de 3 ans.

Par contre, l’USPSTF (US preventive service take force) retient un début souhaitable pas avant 6 ans, cette recommandation n’ayant pas varié depuis une précédente émise en 2013, le groupe de travail considérant que le rapport bénéfices/risques de la démarche reste, encore, mal déterminé.

Concernant le diagnostic de l’HTA chez l’enfant, une étude US de bonne qualité ayant inclus 247 enfants âgés de 11 à 19 ans a analysé la valeur de 2 mesures tensionnelles effectuées au cabinet, à 2 semaines d’intervalle vs la méthode de référence qui était une surveillance continue.

La sensibilité de la première technique était de 81,6 % et sa spécificité de 70,3 %.

Peu de données sur l’avenir cardiovasculaire d’un enfant hypertendu

Sur un autre plan, 20 études observationnelles ont examiné l’association PA élevée chez l’enfant et devenir cardiovasculaire de l’adulte, avec un suivi allant de 10 à 33 ans.

Malgré des critères très différents selon les travaux, la démonstration a été apportée d’une association entre PA élevée dans l’enfance et HTA à l’âge adulte ; l’odds ratio du risque (OR) étant calculé entre 1,1 et 4,5 et le hasard ratio (HR) entre 2,8 et 3,2 mais avec une extrême variabilité de la sensibilité et de la valeur prédictive positive selon les études.

Pareillement, une association est mise en évidence entre PA anormale chez l’enfant et augmentation de l’épaisseur carotidienne intima-média chez l’adulte au terme d’un suivi de 25 ans, OR à 1,24 (intervalle de confiance à 95 % IC :1,13- 1,37) et HR allant de 2,03 à 3,07.

Il en va de même entre présence d’une HTA dans l’enfance et hypertrophie ventriculaire chez l’adulte, l’OR étant calculé entre 1,30 et 1,59 et le HR entre 1,92 et 3,4.

A l’inverse, aucune étude n’a pu directement associer dépistage d’une HTA dans le jeune âge et survenue ultérieure d’évènements pathologiques CV chez l’adulte ou l’adolescent.

Treize essais randomisés contre placebo de bonne qualité et une méta analyse ont porté sur l’efficacité des différents traitements anti-hypertenseurs chez l’enfant ou l’adolescent, à l’exclusion des HTA sévères et des formes secondaires.

La durée du traitement a toujours été très courte, limitée à 2 ou 4 semaines.

La réduction de la PA systolique est, en moyenne, de l’ordre de – 4,38 mm Hg (IC : – 7,27 à – 2,16) avec les inhibiteurs d’enzyme de conversion de l’angiotensine.

Elle est de – 3,20 mm Hg (IC : -8,69 à + 2,33) pour les β bloquants, de – 3,10 (IC : – 6,52 à 0,45) avec les anticalciques et de – 0,12 (IC : – 3,69 à 3,46) avec les antagonistes des récepteurs des minéralocorticoïdes.

Deux autres essais, de bonne qualité ont démontré le bénéfice apporté par l’exercice physique et d’autres ont souligné l’intérêt d’une alimentation de type DASH, riche en fruits, légumes et pauvre en produits laitiers, ces effets ayant toutefois tendance à disparaitre une fois la période d’intervention terminée.

Il faut aussi de citer l’importance d’un régime pauvre en sel et l’efficacité de la pratique d’exercices de relaxation musculaire.

On ne sait combien retrouveront une PA normale

L’USPSTF n’identifie aucun effet délétère notable en rapport avec les différentes interventions pharmacologiques vs placebo mais il faut rappeler qu’aucun des travaux ne porte sur le long terme et qu’étaient exclus les enfants avec une HTA secondaire.

A distance, de même, les proportions d’enfants hypertendus primaires retrouvant une tension normale sans intervention thérapeutique et de ceux restant hypertendus après passage à l’âge adulte restent inconnues.

Il n’existe, non plus, aucune preuve que le dépistage d’une HTA chez l’enfant puisse être utile pour le diagnostic d’une HTA secondaire.

Au total, les conclusions de l’USPSTF sont les suivantes.

Aucune preuve n’existe, en faveur d’un dépistage systématique d’une HTA chez l’enfant et l’adolescent, de 3 à 18 ans.

Le rapport bénéfices/ risques reste très imprécis.

Des recherches ultérieures devront donc mieux préciser les méthodes de dépistage, établir éventuellement de nouveaux seuils d’HTA, étudier très à distance l’impact des mesures pharmacologiques, notamment parmi les populations pédiatriques à haut risque, afro américaine ou hispanique.

Dr Pierre Margent

RÉFÉRENCE: Krist AH et coll. du US Preventive Services Task Force : Screening for High Blood Pressure in Children and Adolescents. USPSTF Recommandations Statement. JAMA, 2020 ; 324 (18) 1878-1883. doi: 10.1001/jama.2020.20122.

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Deux mesures de PA chez l’enfant pour prédire l’HTA à l’âge adulte