Actualités  –  publiée le 8/12/2018 par Équipe de rédaction Santélog

Neuroscience 2018 et Journal of Comparative Neurology

Plus une espèce possède de neurones corticaux, plus elle vit longtemps et peu importe qu'il s'agisse d'un oiseau, d'un primate ou de tout autre mammifère, de sa taille et de sa rapidité à brûler de l'énergie.

Première question posée et réponse apportée par les chercheurs de l’Université Vanderbilt dans leur communiqué : « Pourquoi les humains mettent-ils si longtemps à mûrir par rapport aux autres animaux ? Regardez vos neurones ! ». Leurs travaux, présentés au Congrès Neuroscience 2018 et publiés dans le Journal of Comparative Neurology suggèrent que la durée de vie une fois la maturité sexuelle atteinte, chez l’Homme et les autres espèces à sang chaud, dépend en fait plus du cerveau que du corps. 

Les chercheurs de Nashville concluent ici plus spécifiquement que ce ne sont pas les animaux dont le corps est le plus grand ou le métabolisme le plus lent qui vivent le plus longtemps ; ce sont ceux qui ont le plus de neurones dans le cortex cérébral, et cela quelle que soit la taille du corps. Leur étude plus anthropologique que psychologique estime ainsi à 75%, le « poids » du nombre de neurones présents dans le cortex dabs la variation de la longévité d’une espèce. L’auteur principal, Suzana Herculano-Houzel, professeur agrégé de psychologie et biologie minimise ainsi, avec ces nouvelles données, l’impact de la taille du corps et du métabolisme, deux influences d’ailleurs souvent incohérentes, sur la longévité d’une espèce.

L’étude examine plus de 700 espèces animales à sang chaud issues de la base AnAge, une base de données exhaustives sur la longévité puis compare ces enregistrements avec le nombre de neurones dans le cerveau des différentes espèces. En pratique, par quelle méthodologie ? L’auteur appelle sa méthode d’analyse « la soupe de cerveau ». Cela consiste à prélever du tissu cérébral, à en extraire les cellules, puis en appliquant des étiquettes fluorescentes aux noyaux flottants dans la « solution », à les compter. L’équipe a produit ainsi le premier décompte précis du nombre de neurones dans le cerveau humain, soit environ 86 milliards, ce qui en fait « simplement un cerveau de primates élargi. Et l’analyse de ces décomptes montre que la longévité est associée de manière dose-dépendante au nombre de neurones dans le cortex cérébral.

  • Plus une espèce possède de neurones corticaux, plus elle vit longtemps et peu importe qu’il s’agisse d’un oiseau, d’un primate ou de tout autre mammifère, de sa taille et de sa rapidité à brûler de l’énergie.

Quid des humains ? Si les humains sont parfois considérés comme une exception évolutive caractérisée par une enfance et une période post-ménopausique prolongées, cette recherche s’inscrit en faux : les humains mettent exactement le temps nécessaire pour « mûrir » tel que prédit par ce nouveau modèle basé sur le nombre de neurones corticaux. Et c’est idem pour leur durée de vie à partir de la maturité sexuelle. Ainsi, l’espèce humaine est caractérisée par une enfance et une adolescence extrêmement longues pour permettre l’apprentissage et les interactions sociales. Les nouvelles données montrent que les humains ne sont pas une exception par rapport autres espèces de mammifères en regard de ce modèle de longévité : compte tenu du nombre de neurones dans notre cortex, les humains mettent le temps nécessaire pour atteindre leur maturité sexuelle et vivent bien la durée associée au nombre de leurs neurones corticaux.

Tout cela est décrit comme « logique » : « plus vous avez de neurones dans le cortex, plus il vous faut de temps pour atteindre la maturité sur le plan physiologique, mais aussi sur le plan mental. Un délai qui laisse aux humains ayant plus de neurones corticaux le temps de l’apprentissage notamment par des interactions plus complexes avec leur environnement ».

Donc davantage de neurones corticaux, des vies plus longues mais aussi plus d’opportunités de transmettre à la descendance…Une théorie certes déjà évoquée mais qui s’appuie ici sur un décompte précis des neurones du cortex.

Quel lien entre les neurones du cortex et la longévité ? « Les données suggèrent que les espèces à sang chaud accumulent les dommages au même rythme que leur âge. Mais ce qui nuit à la vie, ce sont les dommages au cortex cérébral plus qu’au reste du corps. Car contrairement au reste du corps, qui renouvelle ses cellules, les neurones corticaux sont censés durer toute la vie. Pour ces scientifiques, au-delà de sa fonction globalement cognitive, le cortex est donc aussi une clé de la longévité. « Le cortex est la partie de notre cerveau capable de rendre notre comportement complexe et flexible, il donne également à notre corps une adaptabilité, car il apprend à réagir au stress et à le précéder. S’il est essentiel de maintenir des fonctions physiologiques en bonne santé, il est tout aussi essentiel de ressentir, d’analyser et de prévoir, un ensemble de fonctions cognitives déterminantes pour la longévité ».

En pratique, quelles implications ? Le vieillissement commence lorsque les humains et autres espèces atteignent l’adolescence, et il devient alors impossible de récupérer (ou presque) des neurones.

Prendre soin de son esprit et de la santé de ces neurones corticaux, en adhérant à un mode de vie sain par exemple, est donc « le meilleur moyen de vivre longtemps et en bonne santé ».

Source : Journal of Comparative Neurology 23 October 2018 DOI : 10.1002/cne.24564 Longevity and sexual maturity vary across species with number of cortical neurons, and humans are no exception et Neuroscience 2018 30-Oct-2018 Lifespan and sexual maturity depends on your brain more than your body

Plus sur Neuro Blog