Actualités – publiée le 5/05/2020 par Équipe de rédaction Santélog
Frontiers in Public Health
On savait déjà sans pouvoir l’expliquer que les hommes sont plus susceptibles de développer des formes sévères de COVID-19, la maladie associée au nouveau coronavirus SARS-CoV-2. Les taux de prise en charge en réanimation et de mortalité sont également plus élevés.
Cette étude d’une équipe de la Huazhong University of Science and Technologie (Wuhan), présentée dans la revue Frontiers in Public Health, en concluant à un taux de décès multiplié par 2 chez les hommes appelle à un accès rapide aux soins intensifs pour les patients masculins plus âgés.
Ces données viennent confirmer celles d’une autre étude chinoise qui menée également à la source de l‘épidémie, à Wuhan précisait les caractéristiques des patients atteints d’une forme mortelle de COVID-19. Cette étude concluait à un âge médian des patients décédés de 65,8 ans et pour 72,9% d’entre eux ces patients étaient des hommes.
Le taux de mortalité de COVID-19 est plus que le double chez les hommes vs les femmes
Il s’agit d’une étude visant à identifier les différences entre les sexes dans l’évolution de la maladie COVID-19, et à mieux comprendre pourquoi certaines personnes sont plus sévèrement touchées par le virus SARS-CoV-2 que d’autres. On sait aujourd’hui que les personnes âgées et celles souffrant de certaines comorbidités, en particulier les personnes atteintes d’obésité, sont plus à risque.
Bien que la plupart des personnes atteintes de COVID-19 présentent des symptômes bénins, l’identification des facteurs qui prédisposent les personnes à des formes sévères et peuvent entraîner le décès, pourrait contribuer à identifier et mieux prendre en charge les patients les plus à risque.
L’étude révèle que les hommes et les femmes ont un risque similaire de contracter le virus, mais les hommes sont beaucoup plus susceptibles de développer une forme sévère de la maladie, des complications et d’en mourir. C’est la conclusion du Dr Jin-Kui Yang, médecin à l’hôpital Tongren de Pékin en Chine : « Dès janvier, nous avons remarqué que le nombre d’hommes décédés du COVID-19 semblait plus élevé que le nombre de femmes. Cela a soulevé la question de la vulnérabilité des hommes à l’infection et au développement de COVID-19 ».
L’équipe a donc analysé plusieurs ensembles de données soit celles concernant :
- un groupe de 43 patients soignés par l’équipe même,
- un ensemble de données accessible de 1.056 patients diagnostiqués COVID-19 ;
- et, le SARS-CoV-2 et le SRAS se liant à la même protéine ACE2, sur les cellules hôtes, un ensemble de données de 524 patients atteints du SRAS en 2003.
Cette analyse confirme :
- les 2 facteurs de risque majeurs déjà identifiés, l’âge et la présence de comorbidités,
- un taux d’infection similaire chez les hommes et chez les femmes,
- une tendance nette chez les hommes au développement d’une maladie plus grave.
- plus de 70% des patients décédés sont des hommes, ce qui signifie que le taux de mortalité des hommes est près de 2,5 fois celui des femmes ;
- être un homme est également un facteur de risque majeur d’aggravation de la gravité de la maladie, quel que soit l’âge.
- Dans la sous-analyse des données sur le SRAS, la tendance est similaire, avec un taux de mortalité significativement plus élevé chez les hommes que chez les femmes ;
- les niveaux d’ACE2, la protéine impliquée dans l’attaque virale dans le SRAS et le COVID-19, ont tendance à être plus élevés chez les hommes, ainsi que chez les patients atteints de maladies cardiovasculaires et de diabète.
Mais pourquoi ? Si des recherches supplémentaires sont nécessaires pour déterminer exactement pourquoi les hommes COVID-19 ont tendance à un moins bon pronostic que les femmes, les chercheurs suggèrent que les niveaux plus élevés d’ACE2 peuvent contribuer à expliquer ce niveau de risque plus élevé.
Si ces données n’expliquent pas totalement ce sexe-ratio, elles incitent certainement à une surveillance particulière des hommes plus âgés et atteints de comorbidités qui pourront avoir besoin d’un accès rapide aux soins intensifs.
Source: Frontiers in Public Health 29 April 2020 DOI :10.3389/fpubh.2020.00152 Gender Differences in Patients With COVID-19: Focus on Severity and Mortality
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Lire aussi : COVID-19 : Caractéristiques cliniques observées chez les formes mortelles
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Accueil Spécialités Génétique – PAR BÉATRICE GIRARD – PUBLIÉ LE 05/05/2020
Covid-19 : pourquoi les femmes sont-elles moins touchées?
À Toulouse, des chercheurs du CHU de Purpan-INSERM, pensent que des facteurs hormonaux et génétiques jouent un rôle dans la meilleure immunité des femmes face au Covid.
Crédit photo : Phanie
Les chiffres laissent peu de place au doute. Depuis le début de la pandémie, on constate que les patients gravement atteints par le Covid et admis en réanimation sont à 75 % des hommes.
Les femmes sont moins atteintes que les hommes. Mais si les comorbidités associées – hypertension, obésité, antécédents cardiaques – jouent sans doute un rôle dans cet état de fait, ce n’est peut-être pas la seule explication.
« Cette différence homme/femme a été constatée partout, mais peu de travaux s’intéressent au pourquoi, c’est ce que nous essayons de faire avec l’INSERM, en nous basant sur nos travaux de recherche antérieurs sur les particularités immunitaires hors-Covid », explique le Pr Pierre Delobel, infectiologue au CHU de Toulouse.
L’hypothèse des chercheurs toulousains est que la différence principale entre les hommes et les femmes, se joue au niveau de l’immunité innée, ce qui a déjà été constaté pour des virus à ARN. L’avantage féminin s’appuierait aussi des facteurs génétiques en lien avec le chromosome X.
À l’époque du SARS-CoV-1, une étude américaine avait révélé une plus grande susceptibilité à l’infection virale chez les mâles. « Lorsque des souris mâles sont infectées, elles meurent d’une hyper-inflammation du poumon, alors que les femelles éliminent le virus et survivent.
En revanche, l’effet protecteur est perdu chez les femelles lorsqu’on leur enlève les ovaires. Traitées avec un inhibiteur d’œstrogène, ces dernières développent une hyperactivité inflammatoire et 85 % d’entre elles meurent. L’étude suggère donc que l’effet protecteur pourrait être en partie dû aux œstrogènes », détaille Jean-Charles Guéry directeur de recherche à l’INSERM, spécialiste des différences liées au sexe dans l’immunité.
Le gène TLR7 capteur des virus à ARN
Chez les femmes, en présence de virus à ARN dans l’organisme, la présence de cette hormone sexuelle féminine semble renforcer l’action des cellules dentritiques plasmacytoïdes qui agissent comme de véritables « usines » à fabriquer de l’interféron de type 1. L’activation de ces cellules permet d’initier une réponse immunitaire et de réduire la charge virale. « Un constat qui n’est pas spécifique au Covid », tempère Pierre Delobel.
L’autre piste formulée à propos des différences immunitaires féminines, est génétique, liée aux chromosomes X. « Chez les femmes, le gène TLR7, présent dans les 15 à 20 % de gènes du chromosome X qui échappent à l’inactivation, est un capteur du virus à ARN et joue un rôle contre la charge virale. Si rien n’a encore été démontré pour le coronavirus, on a des molécules qui stimulent le TLR7 en présence du VIH », décrit Pierre Delobel.
Béatrice Girard