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Réseaux sociaux interdits, portable limité… Les pontes de la Silicon Valley protègent leurs enfants de leurs propres produits.
Bill Gates, cofondateur de Microsoft, à New York (Etats-Unis), le 22 février 2016. (SHANNON STAPLETON / REUTERS) franceinfo France Télévisions publié le 14/12/2017
Troubles de l’attention, retard de langage, addiction… En mai, les professionnels de la santé et de la petite enfance ont publié une tribune dans Le Monde dénonçant les « graves effets d’une exposition massive et précoce des bébés et des jeunes enfants à tous types d’écrans ». « Nous recevons de très jeunes enfants stimulés principalement par les écrans, qui, à 3 ans, ne nous regardent pas quand on s’adresse à eux, ne communiquent pas, ne parlent pas, ne recherchent pas les autres, sont très agités ou très passifs », écrivaient-ils.
Au-delà des professionnels de santé, des personnalités plus inattendues mettent en avant les risques des écrans ou des réseaux sociaux pour les plus jeunes. A l’image de Chamath Palihapitiya, un ancien cadre de Facebook, qui défend à ses enfants de toucher à « cette merde », comme il l’a expliqué lors d’un débat organisé en novembre à la Stanford Graduate School of Business. Et il n’est pas le seul cadre de sociétés high-tech qui limite l’utilisation des produits qu’il a lui-même contribué à créer.
Chez Bill Gates, pas de smartphones avant 14 ans
Bill Gates a beau être le fondateur de Microsoft, auteur d’innovations qui ont fait de lui l’un des hommes les plus riches du monde, il a limité le temps que ses enfants pouvaient passer sur leurs écrans quand sa fille a commencé à développer un attachement malsain à un jeu vidéo, explique Business Insider*.
« Il faut toujours chercher dans quels cas les écrans peuvent être utilisés d’une bonne manière – les devoirs, ou rester en contact avec ses amis – et dans quels cas cela devient excessif, détaille Bill Gates dans une interview au Mirror*. Nous n’avons pas de téléphone à table lorsque nous prenons nos repas, nous n’avons pas donné de portable à nos enfants avant leurs 14 ans, même quand ils se plaignaient que des camarades en aient déjà. »
Pas d’iPad pour les enfants de Steve Jobs
Non, la maison de Steve Jobs ne ressemblait pas à un palace technologique où chacun déambulait avec un iPhone. Une journaliste du New York Timesse rappelle avoir demandé au cofondateur d’Apple : « Alors, vos enfants doivent adorer l’iPad ? » et s’être vu répondre, à sa grande stupéfaction : « Ils ne l’ont pas utilisé, (…) nous limitons la technologie que nos enfants ont le droit d’utiliser à la maison. »
« Chaque soir, Steve insistait pour dîner sur la longue table dans leur cuisine, pour discuter de livres et d’histoire », raconte au New York Times* Walter Isaacson, auteur de la biographie Steve Jobs. « Jamais personne ne sortait un iPad ou un ordinateur. Les enfants n’avaient pas l’air accros à ces appareils. »
Pas de Facebook chez… un ex-cadre de Facebook
Chamath Palihapitiya, ancien vice-président chargé de la croissance de l’audience de Facebook, interdit à ses enfants d’utiliser le réseau social. Il a tiré un trait dessus, et assure utiliser au minimum « cette merde », rapporte The Verge*.
D’après lui, les réseaux sociaux « sapent les fondamentaux du comportement des gens ». « Je pense que nous avons créé des outils qui déchirent le tissu social », juge-t-il aujourd’hui, en faisant part de « son immense culpabilité », selon des propos cités par Quartz*.
Jamais d’écran dans la chambre chez le PDG de 3D Robotics
Chris Anderson, l’ancien rédacteur en chef du magazine américain Wired et actuel PDG de 3D Robotics, limite l’utilisation des appareils technologiques et gadgets par ses enfants. Sa règle n°1 ? Jamais d’écran dans la chambre à coucher.
« Mes enfants nous accusent, ma femme et moi, d’être des fascistes exagérément préoccupés par la high-tech, et ils disent qu’aucun de leurs amis n’ont les mêmes règles, a-t-il expliqué à une journaliste du New York Times*. C’est parce que nous sommes des témoins directs des dangers de la technologie. Je l’ai vu sur moi-même, et je ne veux pas que cela arrive à mes enfants. »
Une école non connectée au cœur de la Silicon Valley
Au sud de San Francisco, la Waldorf School of the Peninsula, une école à la pédagogie alternative, se targue de délivrer un enseignement sans aucun outil technologique. Pas d’écran en vue, seulement des livres, du papier et des crayons. De nombreux enfants d’employés d’eBay, Google, Apple et Yahoo! y sont scolarisés, selon le New York Times*.
« L’idée qu’une app ou un iPad puisse mieux enseigner à mes enfants comment lire ou faire des maths est ridicule », a lâché Alan Eagle, un cadre de Google, au New York Times. « Les écoliers qui utilisent très souvent des tablettes et des ordinateurs ont tendance à moins bien réussir que ceux qui les utilisent modérément », confirme au Guardian* Andreas Schleicher, le directeur de l’éducation de l’OCDE. Les ingénieurs et développeurs californiens ont bien saisi le message.
* Lien en anglais
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Facebook est-il mauvais pour votre santé mentale ?
18/12/2017 à 19h22 Bigstock
Accusé d’asservir le cerveau de ses utilisateurs, la plate-forme de Mark Zuckerberg reconnaît que les réseaux sociaux peuvent générer du mal être et enjoint ses abonnés à ne plus consommer passivement ses contenus.
Facebook semble soudainement soucieux de notre bien-être. Le groupe vient de publier une étonnante synthèse scientifique sur les conséquences des réseaux sociaux sur la santé mentale de ses utilisateurs. Avec une réponse en demi-teinte : tout dépend de la façon dont on les consomme.
Un phénomène de comparaison sociale négative
Les effets seraient parfois dévastateurs dans les cas où les internautes resteraient passifs devant les contenus. Ce qui pourrait provoquer un risque accru d’isolement, de solitude, voire de dépression… et même de suicide face au bonheur étalé par les autres, du fait d’une comparaison sociale négative.
Mais il en résulterait aussi des bénéfices, à condition d’interagir avec les gens et de communiquer davantage avec les proches qui comptent vraiment. Cette possibilité de contact accrue provoquerait un sentiment de joie et inciterait à s’engager davantage dans des communautés.
Et Facebook n’hésite pas à réinventer la roue au détour de cette phrase magnifique. « Les effets positifs sont plus forts quand les gens parlent en ligne avec leurs proches amis. Mettre à jour son statut ne suffit pas ; les gens doivent interagir en tête à tête avec d’autres dans leur réseau ». Ou comment nous réapprendre à avoir une vie sociale !
Les critiques au vitriol se multiplient
La publication de ce texte ce 15 décembre ne doit rien non plus au hasard. Il répond à une salve récente d’attaques émanant d’anciens collaborateurs. La semaine dernière, l’ancien vice-président de la croissance du groupe Chamath Palihapitiya s’est lâché lors d’une conférence Stanford Graduate School of Business. « Mes enfants ne sont pas autorisés à utiliser cette merde », a-t-il déclaré en parlant de Facebook. Des propos aussitôt rapportés par le site The Verge. Son constat est aujourd’hui est sans appel vis-à-vis de la société de Mark Zuckerberg : elle ne ferait que détruire du tissu social et asservir les cerveaux des utilisateurs… qui renonceraient à leur indépendance intellectuelle.
Sean Parker, ancien investisseur et président de Facebook, a formulé exactement les mêmes reproches il y a un peu plus d’un mois lors d’un événement Axios à Philadelphie. Pour lui, les réseaux sociaux exploiteraient les faiblesses psychologiques de leurs utilisateurs et les rendent dépendants en leur livrant des petits shoots de dopamine alimentés par des likes et des commentaires.
Pas sûr donc que la réponse de Facebook suffise à calmer cette vision critique.
Amélie Charnay