AUDITIONLe Quotidien du Médecin

13.03.2019 – Crédit Photo : PHANIEZoom

L’audition des jeunes se dégrade, et ils n’en ont pas conscience. C’est ce qui se dégage du sondage « Les oreilles des Français sous pression : quels impacts sur la santé ? » réalisé par l’Ifop (sur 1003 personnes de plus de 15 ans) et commandité par la Journée nationale de l’audition (JNA). Cette association organise l’événement éponyme qui aura lieu demain et vise à sensibiliser la population à la santé auditive, en particulier sur le volet préventif.

Ainsi, alors que 89 % des jeunes (15-17 ans) interrogés estiment avoir des capacités auditives de bonne ou de très bonne qualité, 70 % indiquent qu’ils ont des difficultés de compréhension de la parole dans des environnements bruyants, selon le sondage. Des résultats qui témoignent d’une méconnaissance de l’audition. « Les gens ne font pas le lien entre mal entendre et ne pas comprendre dans le bruit, explique le Pr Jean-Luc Puel, directeur de recherche à l’Institut des neurosciences de Montpellier, et président de la JNA. Pour eux, quand ils éprouvent une gêne dans le bruit, c’est le bruit qui est en cause, et pas leur audition. Or la dégradation dans le bruit est déjà le signe précurseur des problèmes auditifs.»

En effet, il est possible d’avoir un audiogramme normal, témoin de cellules ciliées intactes, tout en éprouvant des difficultés dans le bruit. C’est ce qu’on appelle des surdités cachées, qui se traduisent par des pertes de fibres du nerf auditif n’affectant pas l’audition dans le silence.

Un tiers des jeunes seulement se protège contre le bruit lors des loisirs bruyants

La JNA s’intéresse également aux habitudes de la population concernant la protection contre le bruit. Là aussi, les résultats du sondage alertent. Seulement un tiers des actifs interrogés déclarent se protéger contre le bruit sur leur lieu de travail. Dans le cadre de loisirs bruyants, ils sont un peu plus d’un tiers à se protéger. Chez les jeunes, cette proportion chute à un quart, d’après le sondage !

Tout n’est pas noir, tempère néanmoins le Pr Puel : « Dans la population générale, l’idée de se protéger a bien fait son chemin. On ne voit plus d’ouvrier avec un marteau-piqueur sans casque anti-bruit. Des bouchons sont distribués dans la plupart des concerts, etc. Mais chez les jeunes, on n’évalue pas les risques. En outre, le bruit est un excitant. Chez eux, l’idée a plus de mal à percer. »

D’ailleurs, l’étude montre une augmentation des acouphènes chez les jeunes. 56 % disaient en ressentir en 2018. Ils sont 65 % en 2019. « Soit ils ont en effet plus d’acouphènes parce qu’ils ont davantage de problèmes auditifs ou qu’ils vivent dans des milieux de plus en plus bruyants, soit ils sont plus sensibilisés à cette pathologie », explique le Pr Puel, qui rappelle que ces résultats sont déclaratifs et que l’audition des sondés n’a pas été testée.

En médecine du travail, pourquoi pas un dépistage auditif ?

Quoi qu’il en soit, la JNA prône une meilleure sensibilisation à la santé auditive, une prise en charge précoce et des dépistages plus fréquents. « Nous proposons notamment deux mesures simples. La première, que la santé auditive soit enseignée à l’école, au même titre que les cours sur la sexualité, par exemple. La deuxième, qu’un dépistage soit effectué lors de la visite médicale à la médecine du travail. On y fait un test visuel, mais jamais auditif ! » 

Toujours concernant le dépistage, Jean-Luc Puel plaide pour que les médecins généralistes le pratiquent. Mais il rappelle que les audioprothésistes le réalisent souvent gratuitement et que de plus en plus d’applications smartphone, comme celle de la JNA, proposent des tests de l’audition.

Bruno Scala

Source : Lequotidiendumedecin.fr

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