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Quel que soit le jour du début de leur affrontement, Emirates Team New Zealand et Luna Rossa Prada Pirelli vont rentrer dans l’aire de départ avec des bateaux et des équipages bien différents. Voici les dix points qui vont jouer un rôle crucial dans leur bagarre.

Foils, cockpit, coque… des éléments qui pourront faire la différence. | GILLES MARTIN-RAGET

Gilles MARTIN-RAGET. Publié le 02/03/2021 à 12h12

1 – Les foils

ETNZ a des foils en T plus petits que ceux de Luna Rossa qui sont de surface supérieure et en V inversé.

La partie inférieure du bras est plus étroite sur Team New Zealand.

A priori, les kiwis sont mieux armés pour aller plus vite en ligne droite et en vitesse de pointe, et les Italiens devraient décoller plus facilement et perdre moins de vitesse lors des changements d’amure.

Reste à voir la puissance que les équipages peuvent tirer de leur « moteur vélique » qui est tout aussi décisive que le frein que représentent les appendices

Les foils d’Emirates New Zealand. | GILLES MARTIN-RAGET

Foils de Luna Rossa. | GILLES MARTIN-RAGET

2 – Les coques

Celle de « Te Rehutai » est plus aboutie sur le plan aérodynamique avec des cockpits plus enveloppants et mieux carénés, un arrière effilé en forme bord de fuite d’aile d’avion, et le bateau est moins épais vu de face, toutes choses qui facilitent la pénétration dans l’air.

Les deux étraves sont également différentes, celles des kiwis ressemblant à celle d’un 470, ce qui ne les a pas empêchés d’enfourner et de dessaler lors des entraînements de décembre 2020.

Les œuvres vives sont elles aussi sensiblement différentes ce qui a une incidence au moment du décollage en cas de tout petit temps.

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La | COQUE DE LUNA ROSSA GILLES MARTIN-RAGET

La coque d’Emirates Team New Zealand. | GILLES MARTIN-RAGET

3 – Les cockpits

Alors que chez les Italiens, les barreurs sont en arrière des wincheurs, seul le régleur de grand-voile étant encore plus en arrière.

Pour les kiwis, le régleur de foils est tout à l’avant, puis suivent deux wincheurs, le poste de barre, et deux wincheurs à l’arrière.

Le winch de foc est juste derrière le barreur.

Les cockpits de Team New Zealand sont tapissés de grands écrans qui permettent notamment de voir le foil sous le vent.

Sur le bateau d’Emirates Team New Zealand, le régleur de foils est tout à l’avant, puis suivent deux wincheurs, le poste de barre, et deux wincheurs à l’arrière. | GILLES MARTIN-RAGET

Sur Luna Rossa Prada Pirelle, les barreurs sont en arrière des wincheurs. | GILLES MARTIN-RAGET

4 – Deux barreurs contre un

James Spithill (à tribord) et Francesco Bruni (à bâbord) ne bougent pas de leur poste et alternent barre (côté au vent), réglage de foil (côté sous le vent), observation du plan d’eau et tactique.

Pietro Sibello, le régleur de Grand-Voile passe d’un bord à l’autre avec son boîtier de télécommande.

Sur le bateau Kiwi, Peter Burling barre et règle la grand-voile, il change de bord à chaque changement d’amure avec Glen Ashby.

Son habituel coéquipier en 49er Blair Tuke règle les foils depuis le poste le plus avancé et change de bord également.

Ces promenades peuvent se révéler handicapantes en cas de combat rapproché.

James Spithill (à tribord) et Francesco Bruni (à bâbord) | GILLES MARTIN-RAGET

Sur le bateau Kiwi, Peter Burling barre et règle la grand-voile | GILLES MARTIN-RAGET

5 – Le close-combat en AC75

Les Italiens auront effectué 23 courses officielles (16 victoires, 7 défaites), plus quelques régates officieuses, lorsqu’ils se présenteront sur la ligne.

Les kiwis eux, n’auront pas régaté depuis plus de 80 jours.

Certes ils ont remporté les AC World Series en décembre (6 courses disputées, 1 défaite) mais sans convaincre quant à leur prestation dans les phases de départ.

Ils se sont entraînés contre leurs tenders et ont enchaîné – comme leurs adversaires – des séances de simulateur, mais l’avantage est clairement dans le camp des Italiens dans ce domaine.

Cela dit, « Pistol Pete » Burling a prouvé en 2017 qu’il savait gagner avec un bateau plus rapide sans trop s’occuper de match racing.

En revanche, Emirates Team New Zealand, parti en campagne plus tôt que tous ses adversaires potentiels, a eu tout le temps de ratisser large dans tous les domaines de sa préparation, un point crucial avec ces bateaux entièrement nouveaux.

Les kiwis eux, n’auront pas régaté depuis plus de 80 jours. | GILLES MARTIN-RAGET

6 – La météo

Luna Rossa s’est toujours montré supérieur aux autres challengers dans le petit temps (moins de 12 nœuds) et a du reste dominé les kiwis lors d’une régate des ACWS avant de tomber dans un trou de vent.

Les kiwis seront certainement à l’aise dans la brise, mais jusqu’à un certain point.

Il se dit qu’à la limite supérieure de vent, le bateau néozélandais aurait tendance à perdre de sa superbe et serait en proie à des problèmes de stabilité.

Luna Rossa s’est toujours montré supérieur aux autres challengers dans le petit temps | GILLES MARTIN-RAGET

7 – Le public

Sur place, il sera clairement en faveur des Néozélandais d’autant qu’à de rares exceptions professionnelles près les étrangers n’ont pas le droit de rentrer dans le pays.

De plus le clan italien a terni son image avec plusieurs problèmes en coulisse depuis le début de la compétition, mais Grant Dalton qui a avoué chercher à organiser la prochaine édition de la Cup à l’étranger de victoire n’a pas que des amis non plus !….

La ferveur de la Cup est telle en Italie que l’équipage italien sait qu’il a un pays entier derrière lui, même s’il est éloigné d’une épaisseur de planète et 12 h de décalage horaire de distance.

Quelques supporters italiens ont fait le déplacement en Nouvelle-Zélande pour encourager leur équipe malgré les restrictions sanitaires. | GILLES MARTIN-RAGET

8 – Les voiles

Clients chez le même fournisseur North Sails, les voiles sont similaires en apparence, mais ce sont les systèmes qui permettent de les régler qui peuvent faire la différence.

Et là : top secret absolu !

Les kiwis ont récemment navigué avec une double grand-voile type « Batwing » inventée par le challenger US American Magic avec une partie supérieure de taille réduite de faible traînée, mais ces tests auront-ils été suffisamment probants pour qu’elle soit utilisée en course dans la brise ?….

Les voiles sont similaires en apparence. | GILLES MARTIN-RAGET

9 – La pression

Comme aux JO et dans les toutes grandes compétitions, elle n’est pas reproductible à l’entraînement et la liste des erreurs de débutants faites lors d’une finale de l’America’s Cup est longue.

Certes Peter Burling et Jimmy Spithill sont des animaux à sang froid et ne sont jamais meilleurs que lorsqu’ils ont le dos au mur, mais ils ne sont pas seuls à bord de leur bateau.

La complexité des AC75 à foil et la synchronisation humaine qu’elle sous-entend peuvent rendre la plus infime erreur très pénalisante.

Les Italiens ont l’avantage d’avoir dû se sélectionner en « mort subite » lors des demi-finales, leur victoire dans la Prada Cup les a sans doute libérés, ils n’ont rien à perdre.

Côté Kiwi, les états d’âme ne sont pas le genre de la maison.

Une erreur peut vite arriver. | GILLES MARTIN-RAGET

10 – Le chavirage

Les Néozélandais ont dessalé trois fois au cours de leur campagne et démontré lors du dernier en date survenu lors de régates informelles en décembre qu’ils savaient remettre leur bateau en place en un clin d’œil et sans douleur.

Certes, en cas de chavirage, la régate est perdue, mais encore faut-il être capable d’être au départ de la suivante si jamais l’incident survient au cours de la première manche du jour.

Les Italiens n’ont jamais chaviré et leur manière de remettre leur AC75 dans le bon sens n’a jamais subi l’épreuve de la grandeur nature.

Les Néozélandais ont dessalé trois fois au cours de leur campagne. | GILLES MARTIN-RAGET

Les Néozélandais ont dessalé trois fois au cours de leur campagne . | GILLES MARTIN-RAGET

Voilà pour les éléments objectifs.

Restent les éléments extérieurs : Covid, arbitrage, météo capricieuse, réclamations en tout genre, manœuvres en coulisse, polémiques diverse et variées, conférences de presse, la performance des équipages sur l’eau n’est généralement pas le seul terrain sur lequel se joue l’America’s Cup.

La preuve : la première régate a dû être reportée de 4 jours.

Le vainqueur de la 36e Coupe de l’America sera le premier concurrent qui aura réussi à remporter 7 manches. Encore faudrait-il pouvoir les courir.

L’aiguière d’argent restera-t-elle entre les mains des Néozélandais ? Réponse en mars. | GILLES MARTIN-RAGET

COUPE DE L’AMERICA AMERICA’S CUP CLASS-AC FOILER TEAM NEW ZEALAND LUNA ROSSA

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