https://www.jim.fr/e-docs/00/02/BA/DE/carac_photo_1.jpg Publié le 09/08/2019

Le syndrome métabolique prédispose les individus à un risque accru de développer une obésité, un diabète de type II avec un impact lipidique et cardiovasculaire bien connus. Or, on sait maintenant que le microbiote intestinal est impliqué dans l’apparition de troubles liés à l’obésité.

Chez l’homme, des études ont mis en évidence une corrélation négative entre l’abondance d’Akkermansia muciniphila et le surpoids, l’obésité, le diabète de type 2 non traité ou l’hypertension artérielle. Dans cette étude pilote bruxelloise, c’est l’impact d’une supplémentation en bactéries A. muciniphila chez des volontaires en surpoids ou obèses résistants à l’insuline qui a été étudié. Quarante sujets ont été inclus et 32 ont terminé cet essai clinique randomisé en double aveugle, contrôlé versus placebo. Les principaux critères d’évaluation étaient l’innocuité, la tolérance et les paramètres métaboliques (c’est-à-dire la résistance à l’insuline, les lipides, l’adiposité viscérale et la masse corporelle). Les critères secondaires étaient la fonction de barrière intestinale (c’est-à-dire les lipopolysaccharides plasmatiques) et la composition du microbiote intestinal.

Des paramètres améliorés

Les résultats montrent que la supplémentation orale quotidienne de 10 milliards de bactéries A. muciniphila (vivantes ou pasteurisées) pendant trois mois est sans danger et reste bien tolérée. La bactérie colique a amélioré la sensibilité à l’insuline (+28,62 ± 7,02 %), a réduit l’insulinémie (−34,08 ± 7,12 %) et le cholestérol total plasmatique (−8,68 ± 2,38 %). La supplémentation d’A. muciniphila pasteurisée a légèrement diminué le poids corporel (−2,27 ± 0,92 kg) par rapport au groupe placebo ainsi que la masse grasse (−1,37 ± 0,82 kg) et le tour de hanche (−2,63 ± 1,14 cm) par rapport aux valeurs initiales. Après trois mois de supplémentation, A. muciniphila a permis une réduction des concentrations de lipopolysaccharides plasmatiques et des enzymes hépatiques, sans altérer la structure globale du microbiome intestinal.

Cause ou conséquence ?

Les études réalisées sur les souris et les humains ont clairement montré que le microbiote influence le métabolisme de l’hôte, en jouant un rôle de « caloric gatekeeper », produisant des calories à partir de substrats nutritifs inaccessibles. Une alimentation, riche en graisses et sucres d’absorption rapide, favoriserait alors la composition de cette flore, riche en Firmicutes et pauvre en Bactéroïdetes, avec l’absorption de calories supplémentaires. Il est cependant difficile de savoir s’il s’agit d’une adaptation du microbiote à un milieu hostile ou de la véritable cause d’une douzaine de maladies telles que l’obésité, le diabète, l’athérosclérose et le cancer.

Des probiotiques bénéfiques

Une méta-analyse de Ma et coll. avait inclus 4 études concernant les probiotiques VSL#3, lactobacillus, bifidobacterium et streptococcus, qui diminuaient la perméabilité intestinale et l’endotoxémie. Ces bactéries régulaient l’extraction énergétique des nutriments et agissaient sur les cytokines pro-inflammatoires, ainsi que sur les gènes modulant le métabolisme des substrats. Enfin, ces probiotiques réduisaient les transaminases, le cholestérol et l’insulino-résistance (IR) des patients porteurs d’une stéatose non alcoolique, souvent associé au syndrome métabolique.

Des résultats prometteurs

Cette nouvelle étude avec A. muciniphila pasteurisée confirme les premiers résultats clinico-biologiques et métaboliques de l’équipe franco-belge (Dao et coll. en 2016) sur 49 obèses traités durant 6 semaines avec cette même bactérie. Elle ouvre la voie vers de futures manipulations bactériennes censées protéger les individus obèses en ayant des informations plus précises sur leur adiposité viscérale. L’ingestion d’une seule espèce de bactérie parait cependant beaucoup plus sûre et bien tolérée contrairement aux récents décès notifiés lors la transplantation fécale pour le traitement de colite à clostridium difficile réfractaire aux antibiotiques.

En conclusion, cette étude ciblée de type « proof of concept » montre que la supplémentation orale en A. muciniphila pasteurisée améliore plusieurs paramètres du syndrome métabolique et que cette intervention semble sans danger et bien tolérée. Des études plus larges sont cependant nécessaires pour prouver l’amélioration significative de la biologie et des paramètres anthropométriques du syndrome métabolique sur le long terme.

Dr Sylvain Beorchia

RÉFÉRENCE : Depommier C et coll.: Supplementation with Akkermansia muciniphila in overweight and obese human volunteers: a proof-of-concept exploratory study. Nat Med 2019 ; 25: 1096-1103.

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