Revue de presse Mediscoop du 21-10-2019
Soline Roy note en effet dans Le Figaro qu’« une campagne de prévention orchestrée par une association représentant la filière viticole provoque la colère des professionnels de la santé publique ».
La journaliste cite ce « slogan [qui] en a fait bondir plus d’un dans le monde de la santé publique » : « Un bon vin peut bien attendre neuf mois », expliquant que « son auteur n’est pas n’importe qui : il s’agit de Vin & Société, structure qui « représente les 500.000 acteurs de la vigne et du vin ». D’aucuns dénoncent un mélange des genres douteux et s’inquiètent de voir les autorités laisser un lobby se charger d’alerter sur les dangers du produit qu’il promeut… ».
Soline Roy précise ainsi : « Un visuel associant la rondeur d’un verre de vin à celle du ventre d’une femme enceinte, un bracelet délicat et une influenceuse pour la touche glamour, un message appelant à s’abstenir « par précaution » mais laissant croire (à tort !) que les dangers de l’alcool pendant la grossesse ne font pas consensus, une diffusion dans la presse féminine et parentale… ».
Le Pr Michel Reynaud, psychiatre addictologue et président du Fonds Actions Addictions, réagit : « C’est terrifiant ! Tout est utilisé pour se donner une bonne image. Pour octobre rose, ils ont vendu des bouteilles de vin rosé en reversant une partie du prix à la Ligue contre le cancer, sans même préciser que l’alcool était un facteur de risque reconnu de cancer du sein ! ».
Soline Roy relève que « la campagne évoque bien le gravissime syndrome d’alcoolisation fœtale, mais fait «fi des déformations faciales, des dommages sur les organes vitaux, des handicaps psychiques et moteurs, des risques de fausse couche, prééclampsie, naissance prématurée, bref de ces dommages terribles que l’alcool peut provoquer durant la grossesse », liste Guylaine Benech », consultante formatrice en santé publique.
Krystel Lepresle, déléguée générale de Vin & Société, remarque de son côté : « Nous ne remplacerons jamais les professionnels de santé (…). En revanche, nous sommes les mieux placés pour donner le bon mode d’emploi de notre produit ».
Soline Roy souligne que « la tactique ne semble pas nouvelle » puis cite Bernard Jomier, médecin et sénateur écologiste (apparenté PS) de Paris, « qui raconte avoir « essayé de se mettre autour d’une table avec l’industrie », convaincu « qu’on peut concilier santé publique et filière économique ». Mais cela supposerait de « revoir le modèle économique » de la filière ».
Le médecin observe que « la prévention doit rester le domaine des acteurs de santé publique. […] On est dans un contournement très subtil et très bien mené de la loi Évin ».
Guylaine Benech ajoute : « Cette campagne est typique de ce que j’appelle le “piratage de la prévention”, c’est-à-dire le détournement d’un message de prévention à des fins de promotion indirecte d’une filière économique. En l’occurrence, le thème du “zéro alcool pendant la grossesse” est instrumentalisé pour faire passer un message favorable au vin en général ».
Date de publication : 21 octobre 2019