mardi 26 novembre 2019
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Marine Cygler AUTEURS ET DÉCLARATIONS 25 novembre 2019
Boston, Etats-Unis – Comment identifier les femmes à haut risque cardio-vasculaire ? Lister les facteurs de risque CV, en particulier ceux spécifiquement féminins, fait l’objet de recherches actives. C’est ainsi qu’un essai clinique vient de confirmer que les femmes ayant une ménopause précoce, c’est-à-dire avant l’âge 40 ans, présentent un risque cardio-vasculaire particulièrement élevé. Les résultats des chercheurs du Massachusetts General Hospital (Boston, Etats-Unis) ont été présentés aux sessions scientifiques 2019 de l’ American Heart Association (AHA) , et publiés simultanément dans le JAMA[1].
Un facteur de risque fortement suspecté
Alors que les recommandations américaines 2018 de l’American College of Cardiology et de l’American Heart Association sur le cholestérol et celles de 2019 sur la prévention des pathologies cardiaques soulignent l’importance de la prise en compte de l’âge de la ménopause comme facteur de risque CV, le Dr Michael Honinberg et ses collègues écrivent qu’il n’y avait jusqu’à présent pas de preuve suffisante sur ce facteur de risque. Ils ont donc décidé de mener une étude observationnelle rétrospective sur près de 150 000 femmes ménopausées issues de la cohorte UKBiobank.
Cela dit, ce facteur de risque était largement suspecté. « Sur le site Internet du Gemvi, nous proposons une fiche sur l’insuffisance ovarienne prématurée, terme que nous préférons à celui de ménopause précoce. Nous insistons en effet sur le risque cardio-vasculaire », a précisé la Pr Florence Trémollières (directrice du Centre de ménopause de l’hôpital Paule-de-Viguier de Toulouse) pour Medscape édition française.
En France, les dernières recommandations de la Société Française d’Hypertension Artérielle (SFHTA) concernant les femmes, publiées l’année dernière, (Hypertension, hormones et femmes : les nouvelles recommandations de la SFHTA) pointaient aussi du doigt l’âge précoce de la ménopause.
Ménopause avant 40 ans, risque CV majoré
Dans l’étude, parmi les 144260 femmes post-ménopausées de la cohorte, 4904 (3,4%) avaient eu une ménopause précoce naturelle et pour 644 (0,4%), il s’agissait d’une ménopause précoce suite à une ablation chirurgicale des ovaires.
L’âge médian d’entrée dans la ménopause était de 50,3 ans chez les femmes sans ménopause précoce, de 35,4 ans chez celles avec une ménopause naturelle et de 34,2 ans chez celles dont la ménopause était liée à une intervention chirurgicale.
3,9 % (5415) des participantes de l’étude sans ménopause précoce, 6 % (292) de celles avec une ménopause précoce naturelle et 7,6 % (49) de celles ayant eu une ménopause précoce chirurgicale ont développé au moins une pathologie CV pendant les 7 années de suivi.
Les taux bruts d’incidence pour toutes maladies CV (maladies coronariennes, AVC, maladies artérielles périphériques) étaient de 1,5% pour les femmes sans ménopause précoce (n=2143), 2,5% pour les femmes avec ménopause précoce naturelle (n=123) et de 3,7% pour les femmes avec ménopause précoce artificielle (n=24).
En procédant à des ajustements pour l’âge et les facteurs de risque CV classiques (tabac, diabète de type 2, HTA, cholestérol,….), la ménopause précoce naturelle et la ménopause précoce artificielle sont associées aux incidents cardiovasculaires avec des risques relatifs de respectivement 1,36 (IC 95%, 1,19-1,56); P <0,001) et 1,87 (IC95%, 1,36-2,58; P <0,001).
Quelle conduite à tenir ?
« Aujourd’hui, si un gynécologue reçoit une femme âgée de 50 ou 55 ans qui n’est pas sous THM et qui a eu une ménopause précoce, je conseille une très grande vigilance », indique Florence Trémollières qui insiste « Il ne faut pas hésiter à adresser la patiente à un cardiologue d’autant que l’évaluation du risque cardio-vasculaire chez la femme est difficile ».
Il y a d’un côté les patientes qui n’ont pas été prises en charge pour ce facteur de risque particulier lorsqu’elles ont eu leur ménopause précoce, mais aussi celles qui aujourd’hui, à moins de 40 ans viennent consulter. Que proposer à ces « nouvelles patientes » dont le risque cardiovasculaire est clairement établi ? Que penser du THM ?
« Compte-tenu du risque élevé de mortalité CV pour les femmes avec une insuffisance ovarienne prématurée, il faut les traiter au moins jusqu’à l’âge naturel de la ménopause avec un THM. Le petit surrisque de cancer du sein ne se discute absolument pas », considère la Pr Anne Gompel (gynécologue, Hôpital Cochin, Paris).
Quant à Michael Honinberg, il explique dans un communiqué de l’AHA « Qu’il y ait ou non prise de médicaments, manger sainement et faire de l’exercice régulièrement sont deux éléments particulièrement importants pour les femmes qui ont une histoire de ménopause précoce ».
LIENS
- Cœur des femmes : 3 études phares à l’ESC
Infarctus lié au tabagisme, le lourd tribut payé par les femmes - Hypertension, hormones et femmes : les nouvelles recommandations de la SFHTA
- Infarctus de la femme jeune : spécificités
- Maladie cardiovasculaire chez la femme: quels facteurs de risque prendre en compte?
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Citer cet article: AHA : une étude précise le risque CV associé à la ménopause précoce – Medscape – 25 nov 2019.