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Actualités & Opinions > Actualités Medscape   Stéphanie Lavaud AUTEURS ET DÉCLARATIONS  22 octobre 2018

Paris, France – L’activité physique est une thérapeutique à part entière. Le médecin est donc en droit de la conseiller/prescrire au même titre qu’un médicament. Pour l’aider au quotidien, la Haute Autorité de Santé (HAS) vient de publier un guide pratique regroupant socle de connaissances et outils pratico-pratiques pour conseiller l’activité physique à tout un chacun [1]. S’y ajoutent 6 fiches décrivant spécifiquement la démarche à suivre lorsqu’il s’agit d’en prescrire dans les pathologies chroniques suivantes : obésité, diabète de type 2, HTA, maladie coronaire stable, AVC, BPCO.

Bénéfique sur le plan préventif et curatif

« On ne soigne pas seulement avec des médicaments et des bistouris, a affirmé Pr Dominique Le Guludec, présidente du Collège de la HAS, en démarrant sa présentation. L’activité physique est une thérapeutique à part entière dont les bénéfices sont largement démontrés ».

Le médecin va-t-il se transformer en coach sportif ? L’idée n’est pas si saugrenue si l’on part du principe que son rôle est de conseiller/prescrire des thérapeutiques ayant fait la preuve de leur efficacité et dont la balance bénéfice/risque est favorable. Définition dans laquelle, études après études, l’activité physique s’inscrit parfaitement. De nombreuses maladies chroniques et états de santé sont concernés, que ce soit en prévention primaire, secondaire et tertiaire, mais pas que… pour quatre pathologies (diabète, hypertension, troubles lipidiques et dépression), l’activité physique arrive en premier dans les recommandations de prise en charge, a rappelé le Pr François Carré, cardiologue à Rennes.

Dans le diabète de type 2, il est démontré que l’activité physique permet de réduire les traitements. « Pour cette pathologie, elle est plus efficace que le meilleur des médicaments », considère même le Pr Martine Duclos, endocrinologue, médecin du sport et physiologiste (CHU de Clermont-Ferrand). Et dans la dépression légère à modérée, il est prouvé qu’elle diminue les symptômes et le risque de récidives.

Pour le diabète, l’activité physique est plus efficace que le meilleur des médicaments  Pr Martine Duclos

Meilleurs interlocuteurs

Pourquoi impliquer les médecins ? Tout simplement parce que ce sont les « meilleurs interlocuteurs pour convaincre les personnes âgées ou fragiles qu’elles peuvent reprendre une activité physique sans risque », répond la présidente de la HAS. « D’ailleurs, la notion de prescription est importante. Présente sur l’ordonnance, l’activité physique aide le patient à changer ses habitudes de vie, son impact n’en est que plus fort », considère-t-elle.

Le sport sur ordonnance est d’ailleurs déjà entériné chez les patients en affection longue durée (ALD) et une prise en charge sportive est effective dans le Réseau Français des Villes santé de l’OMS, initié par la ville de Strasbourg.

Mais conseiller ou prescrire une activité physique adaptée à un état de santé sans risque ET sur la durée demande un minimum de connaissances (sur l’activité physique, la fréquence l’intensité, les risques, les différents intervenants impliqués, etc.) que les médecins n’ont pas reçues pendant leur formation.

Au départ, les recommandations de l’Organisation Mondiale de la Santé sont simples : tout le monde devrait pratiquer au minimum, par semaine, en 3 à 5 fois, 2h30 d’activité physique d’endurance d’intensité au moins modérée. Mais qu’appelle-t-on « activité physique », qu’est-ce qu’une « intensité modérée », peut-on «fractionner » son activité ? Quels sont les risques ? Autant de questions qui peuvent surgir quand il s’agit, pour les médecins, de conseiller ou de « prescrire » de l’activité physique à leurs patients.

Limiter les freins à la prescription dus au manque d’outils, de repères pour conseiller une activité, ou d’éléments objectifs pour appréhender le risque d’accidents cardiovasculaires, c’est donc là tout l’objectif du guide très complet que publie la HAS. « Cela vaut la peine d’investir du temps dans sa lecture, considère le Pr Carré, car cela en fera gagner beaucoup au moment de la consultation ».

Présente sur l’ordonnance, l’activité physique aide le patient à changer ses habitudes de vie Pr Dominique Le Guludec

L’écueil de l’épreuve d’effort

Il faut savoir d’emblée qu’« activité physique ne veut pas dire sport ». Il s’agit plutôt de privilégier les activités de la vie quotidienne, en particulier les déplacements actifs : marche, vélo, monter les escaliers, en particulier chez les personnes atteintes de maladies chroniques, âgées ou peu motivées que le terme de sport pourrait démotiver d’emblée. Par exemple, « je demande systématiquement à mes patients où ils habitent, et à quel endroit ils travaillent et je vois comment il est possible de transformer leur parcours domicile-travail en parcours de santé grâce à la marche, au vélo classique ou électrique » indique le Dr Alexandre Feltz, médecin généraliste à Strasbourg.

Promouvoir l’activité physique consiste aussi à lutter contre des représentations fausses des patients, comme celle qui voudrait qu’il soit dangereux de faire une activité physique quand on a une maladie chronique. Alors qu’en réalité, « il n’y a quasi aucune contre-indication à une activité physique légère à modérée » souligne le Dr Feltz. Et, de toute façon, « les bénéfices sont bien supérieurs aux risques » insiste le Pr Carré.

Attention aussi à « l’écueil de l’épreuve d’effort, un examen idéalisé qui n’est pas l’assurance tout risque pour faire du sport. Le recours à cet examen doit être ciblé. S’il est nécessaire en présence de symptômes ou de cardiopathies avérées, ou pour une activité physique intense, il est, en revanche, inutile avant de commencer ou d’augmenter une activité physique (AP) comme la marche, la natation ou la pratique du vélo au quotidien » précise le cardiologue.

Il n’y a quasi aucune contre-indication à une activité physique légère à modéréeDr Alexandre Feltz

De la consultation à la prescription

Très concrètement, en l’absence de consultation médicale d’AP dédiée, le médecin qui envisage de conseiller ou prescrire une AP d’intensité au moins modérée, au décours d’une consultation médicale, chez des patients asymptomatiques, peut se contenter d’une évaluation médicale minimale (décrite dans le guide). Pas besoin d’y consacrer plus de temps que d’habitude, « dans les faits, elle est grandement facilitée par la connaissance qu’a le médecin de son patient sur sa santé et ses habitudes de vie » rassure le Dr Feltz.

Ensuite, selon les cas, au terme de son évaluation, le médecin est à même d’établir le niveau de prescription dont relèvera son patient (voir encadré ci-dessous) sachant les patients de niveaux 2 et parfois de niveau 3 pourront bénéficier (au mieux) d’un parcours de santé coordonné, pluri-professionnel centré sur la prescription d’AP par le médecin traitant, à l’image des « parcours sport-santé » développés dans certaines villes ou territoires.

AP : 4 niveaux de prescription

Selon les cas, en particulier de son état de santé et de sa condition physique, le patient peut justifier :

  • d’une phase de rééducation par un professionnel paramédical au préalable à une prescription d’AP régulière dans un but de santé (niveau 1) ;
  • d’une prescription d’AP adaptée (APA) supervisée par un professionnel de l’APA (enseignant APA-S ou paramédical) (niveau 2) ;
  • d’un programme écrit d’AP et/ou sportive ordinaire en groupe, avec ou sans supervision, au besoin de sport-santé avec un éducateur sportif formé (niveau 3) ;
  • ou de conseils oraux ou écrits d’AP et/ou sportifs pour une pratique en solo (niveau 4).

Dans les starting-blocks

Et ce n’est qu’un début. La HAS poursuit ses travaux et publiera en 2019 de nouveaux référentiels pour d’autres situations : les cancers, l’insuffisance cardiaque chronique, la dépression, les personnes âgées et la femme enceinte.

Quant à la promotion de l’activité physique sur prescription médicale, elle devrait poursuivre son développement et s’inscrire dans la Stratégie nationale sport santé qui sera dévoilée début 2019, a assuré une représentante du Ministère des Sports. Les pouvoirs publics travaillent, en effet, à la définition d’un modèle pour faciliter le développement, partout en France de cette pratique, en créant des parcours de santé coordonnés à l’image de ce qui existe déjà dans le Réseau Français des Villes santé de l’OMS. Le tout sous la houlette du médecin traitant.

Soyez prêt pour la médecine de demain, va y avoir du sport !

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Citer cet article: Activité physique : un guide pratique pour la conseiller et/ou la prescrire – Medscape – 22 oct 2018.